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Édition du mardi 18 juin 2024
Biodiversité

Le règlement européen sur la restauration de la nature définitivement adopté

Le règlement sur la restauration de la nature a été définitivement adopté in extremis hier par le Conseil de l'Union européenne. Le texte impose notamment aux États membres de restaurer d'ici 2030 au moins 30 % des habitats (rivières, zones humides, forêts, montagnes, etc.) en mauvais état.

Par Lucile Bonnin

C’est un retournement de situation de dernière minute qui est à l’origine de l’adoption du règlement européen sur la restauration de la nature. Hier, le texte a finalement été soutenu par 20 États membres sur 27 au Conseil de l’Union européenne, dont la France. Le texte a finalement pu obtenir la majorité grâce au vote de la ministre autrichienne de l'Environnement qui comptait jusqu’au dernier moment s’abstenir. Le règlement va donc – après deux ans de pourparlers agités – pouvoir être promulgué au Journal officiel de l’Union européenne dans les prochaines semaines. 

80 % des habitats naturels en mauvais état en Europe 

« Le règlement sur la restauration de la nature est un texte majeur du Pacte vert, dont la biodiversité est une composante essentielle, estimait le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires Christophe Béchu en 2022 lors de l’adoption de l’orientation générale du projet. C'est un rendez-vous avec nos engagements passés mais aussi avec l'héritage que nous laisserons aux générations futures. » 

Considérée comme étant la première réglementation européenne contraignante votée depuis la Directive Habitat (1992), cette nouvelle législation impose notamment aux États membres de restaurer au moins 30 % des habitats dégradés sur leur territoire national (forêts, prairies, zones humides, rivières, lacs et fonds coralliens) d’ici 2030, puis 60 % d’ici 2040 et pour arriver à 90 % d’ici 2050. Une priorité devra être donnée à la restauration des zones protégées Natura 2000, qui couvrent les espèces et les habitats les plus précieux et les plus menacés d’Europe. 

Le texte poursuit d’autres objectifs comme : « remettre progressivement en eau les tourbières (30 % en 2030 et 50 % en 2050) », « inverser le déclin des populations de pollinisateurs d’ici 2030 », « améliorer la biodiversité des écosystèmes forestiers, en laissant par exemple davantage de bois morts dans les forêts ou en plantant trois milliards d’arbres supplémentaires d’ici 2030 »  ou encore « reconnecter les 25 000 kilomètres de rivières européennes »  (voir article Vie publique). 

Cette adoption « vient rappeler l’importance cruciale de l’Europe en matière de protection de la biodiversité, qui a pourtant été la grande absente des débats lors des élections européennes », selon Allain Bougrain Dubourg, président de la LPO. Rappelons que selon le dernier rapport sur l'état de conservation de la nature de la Commission européenne, plus de 80 % des habitats naturels sont en mauvais état de conservation. « Les prairies, les dunes, les tourbières, les marais et les marécages présentent de fortes tendances à la détérioration » , peut-on lire dans le rapport. 

Pour la coalition RestoreNature, composée de BirdLife Europe, ClientEarth, EEB et WWF : « Le vote d'aujourd'hui est un tournant pour la nature et les citoyens européens qui appellent depuis longtemps à une action immédiate pour lutter contre le déclin alarmant de la biodiversité. Les États membres doivent maintenant la mettre en œuvre correctement et sans délais en collaboration avec tous les acteurs concernés. » 

Plans nationaux de restauration et financements 

La France va donc devoir développer son plan national de restauration afin de mettre en œuvre les objectifs fixés par la loi. Chaque état membre devra établir un plan national de restauration des écosystèmes avec une cartographie des habitats concernés par le règlement (urbain, agricoles, forestiers, etc.), leur état de conservation, ainsi qu’un plan d’action. Les 27 pays ont désormais deux ans pour élaborer ces plans. 

« Une année supplémentaire sera consacrée à l’échange avec la commission avant adoption, peut-on lire sur le site genieecologique.fr. Ces plans d’actions doivent définir les cibles à atteindre à 2050, 2040, 2030, les indicateurs retenus et mesures les plus appropriées pour y parvenir y compris les coûts, financements favorables et défavorables à supprimer. Les Etats sont également engagés pour combler les lacunes de connaissance et pour favoriser la participation des citoyens. En France, son élaboration sera pilotée par le ministère de l’Écologie et associera étroitement toutes les parties prenantes, avec l’appui de l’OFB. » 

Selon une journaliste du média Contexte, de nombreux États ont souligné le besoin de financements de la part de l'Union européenne pour mettre en œuvre ce nouveau règlement. La commission des Affaires européennes de l’Assemblée nationale a donné un avis politique sur la proposition de règlement en mai de l’année dernière. La Commission insistait « sur la nécessité de prévoir un financement européen complémentaire pour atteindre les objectifs de restauration de la nature ». Finalement à ce jour, aucun financement spécifique n’est prévu en dehors du cadre financier pluriannuel pour la période 2021-2027 qui consacre déjà 7,5 % du budget européen à la biodiversité à partir de 2024, puis 10 % à partir de 2026, pour un montant total d’environ 100 milliards d’euros.

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