Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du lundi 16 octobre 2023
Budget

Le PLF pour 2024 rejeté par la commission des finances

La commission des finances de l'Assemblée nationale a rejeté, dans la nuit de vendredi à samedi, la partie Recettes du projet de loi de finances pour 2024, ce qui pourrait amener le gouvernement à dégainer plus vite que prévu l'article 49-3. Plusieurs associations ont malgré tout souhaité que le gouvernement entende les oppositions notamment sur les questions de logement. 

Par Franck Lemarc

Après l’examen de presque 3 000 amendements, la commission des finances a finalement rejeté, vendredi soir, la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2024. Au cours de l’examen, la majorité avait déjà essuyé plusieurs revers avec notamment le rejet du « recentrage »  du PTZ (prêt à taux zéro) sur les zones tendues et l’habitait neuf collectif, estimant qu’il s’agissait d’un « abandon des territoires ruraux »  ; ainsi que sur le fiscalité des meublés touristiques (type AirBnB) (lire Maire info de vendredi). 

Il faut toutefois rappeler que pour les textes financiers, les règles ne sont pas les mêmes que pour les autres projets ou propositions de loi : le rejet du texte par la commission des finances n’empêchera pas le texte d’être présenté, à partir de demain, en séance publique. Même s’il avait été adopté par la commission des finances, il aurait été présenté en séance dans sa version initiale : comme le précise l’article 42 de la Constitution, « la discussion en séance des projets de loi de finances (…) porte sur le texte présenté par le gouvernement ». 

La majorité Renaissance n’a toutefois pas apprécié le rejet de la première partie du PLF par la commission (rejet voté par 19 voix contre 16). Le rapporteur général du budget, Jean-René Cazeneuve (Renaissance, Gers), s’est désolé sur X (Twitter) que « l’axe de l’irresponsabilité Nupes/RN (ait) fait échouer l’examen du PLF en commission des finances », ajoutant « malgré plus de 50 amendements adoptés, ce n’est jamais assez ». Il a une nouvelle fois annoncé en filigrane l’utilisation de l’article 49-3 : « Nous prendrons nos responsabilités pour doter le pays d’un budget ». 

Notons qu’il est un peu réducteur d’incriminer uniquement « l’axe Nupes/RN », puisque les députés LR ont également voté contre le texte en commission. 

Meublés et PTZ

Durant le week-end, plusieurs organisations ont exprimé le souhait que le gouvernement, lors du débat en séance publique, soutienne certains amendements qui ont été défendus en commission. 

C’est le cas notamment de France urbaine, sur la question des meublés de tourisme. L’association, face à « la croissance exponentielle des meublés de tourisme »  qui amène à rejeter « en dehors des centralités urbaines »  les populations fragiles, demande que les communes et intercommunalités soient « dotées de moyens juridiques, financiers et humains permettant de mettre en œuvre et contrôler les dispositions régulatrices des meublés ». Un amendement, co-présenté par le groupe Renaissance et les socialistes, visait à « rééquilibrer le marché locatif en harmonisant, à un taux de 40 %, les abattements fiscaux relatifs aux meublés touristiques – notamment la niche fiscale dite "AirBnB" – sur ceux de la location de longue durée ». En effet, expliquaient les signataires de l’amendement, « en créant des effets d’aubaine trop importants, cette niche contribue à assécher le nombre de biens en location longue durée et à faire monter les prix ». 

Cet amendement a été rejeté par la commission des finances. France urbaine a exprimé ce week-end son « soutien à cet amendement transpartisan »  pour « mettre à égalité fiscale les meublés touristiques avec les formats locatifs de longue durée ». L’association espère que cet amendement reviendra en séance publique. 

Par ailleurs, les dispositions sur le prêt à taux zéro vont, elles aussi, refaire débat en séance publique. Vendredi, l’Unam (Union nationale des aménageurs), a salué le rejet en commission du « recentrage »  du PTZ. Ce rejet, écrit l’Unam, « traduit une prise de conscience du risque de déclassement et d’humiliation des territoires ruraux et péri urbains à qui ont semblait dénier le droit de se développer harmonieusement ». C’est aussi, selon l’association, « un message envoyé aux élus locaux, qui savent que l’acceptation des projets tient aussi à leur intégration comme à la diversité des formes urbaines et au respect de l’identité architecturale de nos territoires ». L’Unam demande que le PLF permette « de réconcilier logement et aménagement du territoire en fléchant la fiscalité et les aides de l’immobilier vers les politiques publiques de revitalisation et de recyclage foncier ». 

Cette question devrait revenir en séance. Certains membres de la majorité, au MoDem et même à Renaissance, sont opposés au « recentrage »  du PTZ, ce qui pourrait amener le gouvernement à infléchir sa position. 

Mais il est très probable qu’au-delà de quelques amendements de compromis, le gouvernement ne fléchira pas sur le fond et fera passer son budget via l’article 49-3. Le rejet du texte en commission des finances, traduisant une opposition unanime de la gauche à la droite, pourrait pousser le gouvernement à utiliser le 49-3 plus rapidement qu’il l’avait prévu, prédisaient même, vendredi, des députés de la majorité.
 

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