Le forfait mobilité durable peine à s'imposer dans les grandes entreprises
Par Franck Lemarc
39 % des entreprises du CAC40 ont mis en place le forfait mobilité durable, deux ans après la loi LOM. C’est le principal résultat de l’enquête menée par le député du Maine-et-Loire Matthieu Orphelin, qui a décidé de prendre les devants, dans la mesure où le gouvernement, que la loi obligeait à produire un rapport sur la question en juin 2021, ne l’a toujours pas fait.
Dispositif facultatif
Pour rappel, le forfait mobilité durable a été codifié par la loi d’orientation des mobilités du 24 décembre 2019 et réglementé par un décret du 9 mai 2020. Il permet aux entreprises de verser une indemnité aux salariés qui utilisent un moyen de transport durable (vélo, transports collectifs, covoiturage, services de mobilité partagée). Cette indemnité est exonérée d’impôts sur le revenu et de cotisations sociales jusqu’à 500 euros par an ; et jusqu’à 600 euros lorsqu’elle est couplée avec le remboursement des abonnements de transport public.
L’un des grands débats sur ce sujet, pendant l’examen du projet de loi, a été le caractère obligatoire ou pas du dispositif. Devant les résistances du Medef et des organisations patronales, le législateur a finalement décidé de laisser le dispositif au volontariat. Le Medef avait néanmoins promis, rappelle Matthieu Orphelin, de « pousser le plus possible le dispositif ».
Pour en savoir plus, le député a directement interrogé les entreprises du CAC40, et publie les réponses de chacune d’entre elles – selon le principe du « name and shame » (littéralement « nommer et faire honte » ), bien qu’il faille rappeler ici que les entreprises qui n’appliquent pas le dispositif ne sont nullement hors la loi, puisque celui-ci n’est pas obligatoire.
39 % de grands groupes « vertueux »
Sur un site internet dédié (cac40avelo.fr), fort bien fait, le député a listé chaque entreprise en les classant en trois couleurs : vert pour celles qui ont instauré le FMD, orange pour celles dont la réflexion est en cours, rouge pour celles qui n’ont rien fait. Il publie également les réponses données par les entreprises, au nom de la « transparence ».
Résultat : 39 % des entreprises ont mis en place le FMD, 19 % « réfléchissent » et « 42 % n’ont rien fait ». Néanmoins, même les 17 entreprises les plus vertueuses utilisent parfois le dispositif a minima, puisque 53 % d’entre elles limitent le versement au seul vélo. D’autres font varier le montant du forfait en fonction du mode de transport (par exemple 500 euros pour le vélo et 100 euros pour un service de mobilité partagée). Le FMD est « souvent mis en place au rabais », regrette Matthieu Orphelin. « De trop profondes disparités persistent : la plupart en réduisent le champ d’action, le rendant plus contraignant mais aussi moins efficace. Les modalités de calculs, les règles de cumul, les conditions d’obtention, les plafonds ou encore les modes de transport concernés font que les montants réels touchés varient très largement. »
Le député note en revanche que dans certains cas, des « actions complémentaires intéressantes » sont déployées par certaines entreprises, comme des parkings dédiés, des centres de réparation des vélos ou des sites de covoiturage internes.
Bonnes et et moins bonnes raisons
Du côté des plus mauvais élèves, les raisons invoquées pour ne pas agir sont variables. Certaines sociétés avouent directement qu’elles ne mettent pas en place le FMD parce qu’il n’est « pas obligatoire », d’autres préfèrent « privilégier des mesures de pouvoir d’achat ». D’autres encore – notamment les plus industrielles – mettent en avant des difficultés logistiques : un constructeur automobile répond par exemple que « les sites industriels sont dans des zones périurbaines voire rurales, moins accessibles en transport en commun ou vélo » – ce qui n’empêche pas, notons-le, d’encourager la pratique du covoiturage.
En conclusion de son enquête – qu’il va maintenant étendre aux entreprises du SBF120, l'autre indice de la Bourse de Paris – Matthieu Orphelin rappelle qu’il va continuer de militer pour « la généralisation du forfait mobilité durable à toutes les entreprises de plus de 11 salariés », dans le but de « réduire drastiquement les émissions de gaz à effet de serre tout en contribuant à améliorer le bien-être et la santé des salariés ».
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