Le Fonds vert pourrait être pérennisé
Par Franck Lemarc
Après les « hussards noirs de la République » – expression inventée par Charles Péguy pour désigner les instituteurs sous la IIIe République –, voici les « hussards verts de la République ». C’est ainsi que Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, a baptisé les premiers maires venus symboliquement récupérer leur « chèque » du Fonds vert. Une expression qui ne ravira peut-être pas tous les maires qui, soit dit en passant, n’ont heureusement pas attendu le Fonds vert et les subventions de l’État pour agir pour la transition écologique.
Réactivité diverse
Le gouvernement a diffusé à cette occasion un dossier de presse recensant les « 150 premiers lauréats » et identifiant un certain nombre de « projets phares ». Les chiffres annoncés la semaine dernière ont été confirmés et précisés : 5 948 dossiers complets ont été déposés (mais Christophe Béchu évoque une dizaine de milliers de dossiers en tout, en comptant ceux qui sont en cours). Ces presque 6 000 premiers dossiers représentent 2,16 milliards d’euros d’aide demandée – soit un peu plus que le montant de l’enveloppe, fixé à 2 milliards.
Les deux tiers des dossiers concernent la rénovation des bâtiments (40 %) et l’éclairage public (28 %). Les autres axes rencontrent beaucoup moins de succès, seuls 4 % des dossiers concernant les inondations, 2 % le risque incendie, 1 % le co-voiturage, le recul du trait de côte ou les zones à faibles émissions.
Le gouvernement annonce que la totalité des départements ont déposé au moins un dossier. Mais si l’on regarde la liste des 150 premiers lauréats, il apparaît que certains départements sont nettement ont nettement plus de lauréats que d’autres. La Seine-Saint-Denis ou le Val-de-Marne n'ont aucun lauréat pour l'instant, le Jura, le Doubs, l’Ain, l’Oise, l’Eure, la Vienne ou encore le Gers n’ont qu’un seul dossier parmi les 150 premiers. La Seine-Maritime et la Savoie, en revanche, en comptent cinq, La Réunion, sept. La palme du département où le plus grand nombre de dossiers a été retenu revient à la Drôme, qui compte 11 lauréats à elle seule (10 projets de rénovation énergétique des bâtiments et une rénovation de l’éclairage public).
Parmi ces premiers lauréats, le montant des subventions est extrêmement variable, allant de 5 601 euros pour la rénovation de l’éclairage public dans la commune de Mouzay (37) à 2,5 millions d’euros pour la création d’un écoquartier à Fort-de-France (Martinique).
« Projets phares »
Pour montrer que le Fonds vert ne se résume pas à subventionner la rénovation thermique des bâtiments et l’éclairage public, le dossier de presse du gouvernement met en avant une quinzaine de « projets phares », montrant la diversité des dossiers subventionnables : recyclage de friches pour la communauté d’agglomération Seine-Eure, renaturation de ville à Saint-Denis (La Réunion), adaptation au recul du trait de côte à Sète (Hérault), prévention des inondations dans le Var – ce dernier projet étant porté non par une commune ou une intercommunalité mais par un syndicat mixte.
Le ministre Christophe Béchu s’est dit hier « impressionné » par le succès du Fonds vert, qu’il attribue en grande partie à la « simplicité » du dispositif, qui ne repose pas, pour une fois, sur un appel à projets. La Première ministre, Élisabeth Borne, à quant à elle salué « la qualité et la variété des dossiers, (…) qui témoignent d’une ambition écologique profondément ancrée dans nos territoires ».
Le document présenté par le ministère permet également de mesurer l’effet levier de ces subventions. En ne regardant que les « projets phares », on constate que celui-ci va de 1,2 à 14 : un projet de biodiversité en Corse est subventionné à hauteur de 521 000 euros pour un coût total de 664 000 euros (soit 1,2 fois plus) ; le projet de rénovation des bâtiments publics de Quiberon va percevoir 1 million d’euros pour un coût total de 14 millions. En moyenne, a calculé Christophe Béchu, l’effet levier est « d’un facteur 6 à 8 » – ce qui signifie que pour 2 milliards de Fonds vert, il pourrait y avoir 12 à 16 milliards d’investissements engagés.
Et maintenant ?
Quid, à présent, de l’évolution du Fonds vert ? Première nouvelle : la Première ministre a décidé de lancer le débat sur une « pérennisation » de ce fonds initialement créé pour la seule année 2023. Les associations d’élus vont être invitées, dès la semaine prochaine, à donner leur avis sur ce sujet.
En s’appuyant sur un « bilan » qui sera établi d’ici cet été, le ministère de Christophe Béchu réfléchira ensuite, en cas de pérennisation, sur les évolutions que pourrait connaître le fonds. La Première ministre, d’une part, souhaite qu’il soit recentré de manière à bénéficier principalement aux communes rurales, aux QPV et aux villes moyennes. D’autre part, Christophe Béchu a dit réfléchir à la question de l’autofinancement : comme pour toute subvention, le Fonds vert ne peut financer que 80 % d’un projet, le reste devant être autofinancé par la structure demandeuse. Les services du ministère ayant constaté que certaines petites communes ne pouvaient pas atteindre ce taux de 20 %, et étant en conséquence obligées d’abandonner leur projet, Christophe Béchu a déclaré hier vouloir réfléchir à porter le taux de subvention à « 90 ou 95 % ».
Rappelons enfin qu’en présentant le Plan eau, la semaine dernière, le ministère de la Transition écologique a annoncé que 100 millions d’euros du Fonds vert devraient être obligatoirement dédiés aux projets de « renaturation et désimperméabilisation des collectivités ».
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