Maire-info
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Édition du mercredi 2 juin 2021
Santé publique

La vente de « gaz hilarant » est désormais interdite aux mineurs

La proposition de loi de Valérie Létard sur les usages dangereux du protoxyde d'azote, après un long parcours parlementaire, a été adoptée fin mai et publiée ce matin au Journal officiel. Une bonne nouvelle pour un certain nombre de maires confrontés à l'explosion de l'usage de ce gaz comme drogue.

Par Franck Lemarc

« L’été dernier, dans mon département de l’Hérault, des communes, en particulier littorales, ont connu durant la saison touristique une vague de violences graves et une hausse importante des incivilités, des comportements intolérables souvent causés par cet usage détourné du protoxyde d’azote. Un certain nombre de maires ont ainsi dû prendre, dans le cadre de leurs pouvoirs de police, des arrêtés municipaux interdisant l’utilisation de ce gaz dans l’espace public. »  Ce témoignage du sénateur Jean-Pierre Grand, le 25 mai, au moment de l’adoption définitive du texte, pourrait être partagé par beaucoup de maires, notamment des Hauts-de-France, de la région parisienne et de l’Occitanie, les trois régions où l’usage du protoxyde d’azote en tant que « drogue récréative »  est le plus développé. Dans certaines communes, au matin, les trottoirs jonchés de petites capsules métalliques grises témoignent de la popularité, chez certains jeunes, de ce produit peu cher, en vente libre et considéré – à tort – comme peu dangereux. Pourtant, tous les rapports des autorités de santé montrent la dangerosité de l’inhalation de ce gaz, qui peut provoquer non seulement des accidents pouvant conduire au coma, mais, à plus long terme, de graves séquelles sur le système nerveux et le cerveau. 

Ce que contient le texte

Le texte publié ce matin a été initialement déposé par Valérie Létard (Union centriste, Nord). En avril 2019, soit un parcours de plus de deux ans pour une proposition de loi sur laquelle tout le monde était, sur le fond, d’accord. « Plus de deux ans pour (décider) l’encadrement minimal d’un produit à la dangerosité avérée ! », a regretté la sénatrice de l’Essonne Jocelyne Guidez. « Nous aurions pu tirer plus tôt ou plus vite les conséquences qui s’imposaient (…). En attendant, l’usage récréatif de ce gaz est à présent devenu un segment comme un autre de l’économie des stupéfiants, avec ses grossistes avisés, ses intermédiaires spécialisés et son marketing agressif. » 
Malgré ces quelques regrets exprimés aussi bien au Sénat qu’à l’Assemblée nationale, les parlementaires ont été unanimes à voter ce texte qui a au moins le mérite de poser un cadre. 
La principale mesure du texte est l’interdiction de vendre (ou d’offrir) aux mineurs du protoxyde d’azote, « quel qu’en soit le conditionnement ». Les commerces qui vendent ce produit doivent désormais demander à l’acheteur une preuve de sa majorité, et les sites de commerce électronique doivent spécifier cette interdiction sur leurs pages. Par ailleurs, la vente de ce produit, y compris aux majeurs, est maintenant interdite dans les bars et les débits de tabac. Ces interdictions sont assorties d’une amende de 3 750 euros. 
Il sera possible de fixer, par arrêté ministériel, une quantité maximale de cartouches de protoxyde d’azote pouvant être vendue aux particuliers, afin d’éviter les achats en gros. 
Ces interdictions pourront être constatées par procès-verbal par les agents de police municipale et les gardes champêtres, lorsqu’elles sont commises sur le territoire communal « et lorsqu’elles ne nécessitent pas d’enquête de leur part ». Ils peuvent, en revanche, « exiger que le cessionnaire établisse la preuve de sa majorité par la production de tout document officiel muni d'une photographie ». 

Vers une interdiction ?

Lors des derniers débats au Parlement, certains députés et sénateurs ont regretté que le texte n’aille pas plus loin – par exemple en interdisant la vente de ces capsules dans les stations-services, voire, comme le souhaitaient certains, en durcissant davantage les conditions de vente aux majeurs. Mais ces propositions se heurtent, comme l’a plusieurs fois rappelé le gouvernement pendant les débats, au fait qu’on parle de l’usage détourné d’un produit qui, par ailleurs, est parfaitement légal lorsqu’il est utilisé pour fabriquer de la crème Chantilly. En septembre 2020, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a indiqué que son administration réfléchissait à une interdiction pure et simple de ce produit. On attend, pour l’instant, les conclusions de ces réflexions. 

Télécharger la loi. 

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