Édition du lundi 29 août 2005
La France n'est pas à l'abri d'inondations dévastatrices cet automne
Les pluies diluviennes de ces derniers jours dans l'Isère ont réveillé les craintes de crues dévastatrices cet automne en France, les sols desséchés favorisant le ruissellement de l'eau, selon les experts interrogés par l'AFP.
"Les premières pluies sur sol sec ont toutes les chances d'entraîner un ruissellement maximum", observe Thierry Pointet, ingénieur hydrogéologue au Bureau de recherche géologiques minières (BRGM).
La sécheresse est un élément aggravant, mais "c'est un impact de deuxième ordre, le premier impact, c'est la pluie qui tombe", rappelle M. Pointet. D'où l'importance des prévisions météo.
Pour Météo France, les pluies de ces derniers jours en Europe sont un événement isolé, "qui n'a rien à voir avec le changement climatique ou les orages cévenols". En revanche, l'automne est bel et bien une saison à risque, avec le phénomène "cévenol": des masses d'air chaud de la méditerranéenne, qui se heurtent aux reliefs du massif central, à l'air plus froid.
Depuis les orages et crues meurtrières du Gard en 2002 (23 morts et 1,2 milliard d'euros de dégâts) et celles du Rhône l'année suivante (1 milliard d'euros de pertes), le gouvernement a engagé une réforme des services d'annonce des crues, critiqués pour leur faible réactivité.
La ministre de l'Ecologie Nelly Olin visitera jeudi prochain le SCHAPI (service central hydrométéorologique d'appui et de prévision des inondations) un centre d'une trentaine d'experts basé à Toulouse depuis deux ans. Sur le terrain, 22 services de prévision des crues vont remplacer en 2006 la cinquantaine de services actuels, trop dispersés.
Le ministère de l'Ecologie veut publier en juillet 2006 une carte de vigilance pour les crues, sur le modèle des cartes de vigilance "orage" ou "canicule" de Météo France.
Les fleuves arboreront la couleur verte, jaune, orange ou rouge selon le risque de crue, explique-t-on au ministère. L'information vise au premier chef les 10 000 communes françaises soumises au risque d'inondation (dont 300 grandes agglomérations).
Une convention signée lundi entre le ministère de l'Ecologie et Météo France doit muscler les outils pour affiner la prévision des crues.
"Les progrès scientifiques sont tels qu'on commence à pouvoir faire de la prévision utile pour les populations", explique Alain Ratier, directeur adjoint de Météo France.
Beaucoup reste à faire: si Météo France peut prévoir une crue lente avec quelques jours d'avance, le délai est de seulement "1 ou 2 heures" pour les crues rapides provoquées par les orages, selon M. Ratier.
"Pour les orages violents, le progrès décisif c'est l'observation des radars: on sait beaucoup mieux ce qui tombe, où ça tombe et avec une grande précision, donc on est capable de rentrer les données sur des modèles (informatiques) qui disent tout de suite: là il y a un risque de crue à tel endroit", explique M. Ratier.
La Convention sur 3 ans prévoit de remplacer deux radars obsolètes (sur 24 opérés par Météo France en 2006) par des radars plus performants, d'un rayon de 80 à 100 km.
Une fois les images collectées, il faut aussi des modèles informatiques plus performants pour les interpréter. "Aujourd'hui ils sont au point, mais on n'a pas les moyens de calcul pour les faire tourner opérationnellement", explique le directeur adjoint de Météo France, qui vise l'horizon 2008.
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