Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du mercredi 16 décembre 2020
Finances locales

L'impact inégal de la crise sur les collectivités locales

La Cour des comptes estime que la crise sanitaire affectera de manière « très inégale » les différentes catégories de collectivités. Devant une situation financière altérée en 2020, celle-ci pointe les incertitudes concernant le niveau de participation du bloc communal et des départements à la relance. 

Si l’impact de la crise sanitaire sur les finances des collectivités est « certain », il devrait rester limité. C’est ce que prévoit la Cour des comptes dans le second fascicule de son rapport annuel sur les finances publiques locales, publié hier, et consacré à l’incidence de la crise sanitaire. Des conséquences sur les budgets locaux qui se « prolongeront au-delà de l’année 2020 », prévient-elle.

Bloc communal : chute d’un tiers de l’épargne brute 

Dans le détail, le bloc communal devrait ainsi connaître une « contraction significative »  de ses marges de manoeuvre en 2020. Les communes et EPCI interrogés estiment la chute de leur épargne brute à près d’un tiers (32,2 %) en moyenne, qui serait suivie d’un « rattrapage »  de près de 10 % l’an prochain et d’une stabilisation en 2022. 
Cette dégradation brutale résulterait notamment de « l’interruption de la dynamique des recettes »  qui n’avaient cessé de progresser depuis 2013, mais également d’un ensemble de « mesures volontaristes visant à assurer une continuité de service et à soutenir la population et le tissu économique et social ». Celle-ci reste toutefois « limitée »  aux yeux de la Cour qui rappelle que « les assiettes des impôts dits ménages ne sont pas sensibles au niveau de l’activité économique ». Les produits de la taxe d’habitation, des taxes foncières et de la Teom devraient, pour l’essentiel, continuer à progresser cette année. Même chose du côté de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) qui augmenterait de 4,8 % en 2020 (mais qui reculerait de 8 % en 2021). 
En revanche, « la crise sanitaire aura un effet dès l’année 2020 sur les produits de DMTO »  (- 20,9 %, une prévision jugée toutefois « pessimiste »  par la Cour). En outre, une « baisse sensible »  des produits de prestations de services, des droits de place et des redevances d’utilisation des domaines est à prévoir.

Un impact « surmontable » 

Parmi les collectivités particulièrement exposées, on retrouve sans surprise les communes touristiques, celles supportant les « charges de centralité »  et les autorités organisatrices des mobilités. 
Les premières devraient voir leur taxe de séjour chuter en moyenne de 40 % en 2020, sans compter les taxes liées à la présence de casinos. Une amputation loin d’être négligeable pour certaines. Pour neuf des communes analysées par les auteurs du rapport, par exemple, la part de ces taxes s’élevait à plus de 40 % de leurs recettes de fonctionnement. Pour 65 autres, elles représentaient plus de 10 %.
Concernant les villes disposant d’un vaste réseau d’équipements, les plus importantes seraient particulièrement « pessimistes ». Lyon prévoit notamment une baisse de 43,3% de ses recettes d’équipements sportifs et de 38,5 % de ses équipements culturels.
Côté transport, les recettes du versement transport sont annoncées en baisse de près de 12 % et les recettes tarifaires en repli de 33 %, selon les EPCI interrogés par la Cour. Et celle-ci redoute, en parallèle, une « contraction des participations et subventions reçues par les collectivités ».
« Un impact certain, un impact divers, compensé par l'État mais surmontable »  pour les communes et les EPCI grâce à leur situation financière favorable au début de la crise, a estimé Pierre Moscovici, lors de la présentation de son rapport. Cependant, et alors que le dispositif de garantie de recettes mis en place par le gouvernement « ne corrigera que partiellement les disparités au sein du bloc communal », l’ancien président de la communauté d’agglomération du pays de Montbéliard a reconnu que « la crise sanitaire va naturellement peser sur leur marge de manoeuvre alors même qu'elles débutent un nouveau cycle d'investissement depuis les élections municipales de cette année ».
Et si « les surcoûts engendrés lors de la période de confinement n’ont pas bouleversé les équilibres budgétaires du bloc communal », la dégradation de leur épargne brute devrait peser sur les dépenses d’investissement des communes et EPCI. « Plus de la moitié des villes et près de 40 % des EPCI consultés confirment d’ores et déjà le report à 2021 d’investissements prévus en 2020 », indique la Cour qui constate que, fin septembre, « les dépenses d’investissement étaient inférieures de 18 % pour les communes et de 13 % pour les EPCI à leur niveau à la même date en 2019 ».

Les départements « fortement affectés » 

Du côté des autres collectivités, ce sont les départements qui devraient être « fortement affectés par la crise », a souligné Pierre Moscovici. Leurs fragilités financières devraient ainsi « s’accentuer »  puisque « la hausse de leurs dépenses sociales, sous l’effet de la dégradation de la situation économique et de la mise en place de mesures d’urgence, s’accompagne d’une contraction de leurs recettes de fonctionnement, en particulier des droits de mutation ». Et Pierre Moscovici de mettre en garde sur le fait que « la dégradation de l’épargne des départements pourrait se poursuivre en 2021 et donc entraver les possibilités de contribution de cette catégorie de collectivités au plan de relance ».
Les régions, en revanche, sont « la catégorie la moins touchée par la crise et elles sont donc appelées à jouer un rôle prépondérant dans la relance de leur économie », a-t-il indiqué, estimant à « moins de 5 % »  les baisses de leurs recettes cette année.
À noter que la Cour des comptes a par ailleurs publié, hier, dans un troisième fascicule, un premier bilan de la mise en place des métropoles qui n’aurait « pas encore eu de réel effet structurant ». Leurs objectifs ne seraient ainsi que partiellement atteints et elles tarderaient à « pleinement monter en puissance »  .

A.W.

Consulter le rapport.
 

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