Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du jeudi 11 avril 2024
JOP 2024

Caméras, polices municipales, fanzones : où en est-on de la sécurisation des Jeux olympiques et paralympiques ?

Un rapport d'information sénatorial sur la sécurisation des Jeux olympiques et paralympiques, rendu public hier, préconise notamment d'informer les maires des prévisions de déplacement des forces de sécurité et de faciliter la participation des polices municipales à la sécurisation des Jeux.

Par Lucile Bonnin

« Nous sommes sur la bonne voie et nous serons prêts ». Telle est la principale conclusion des sénatrices Agnès Canayer et Marie-Pierre de La Gontrie, qui ont présenté hier à la presse les conclusions de la mission d'information sur l'application de la loi du 19 mai 2023 relative aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, créée au sein de la commission des lois.

Après avoir mené 95 auditions et réalisé 5 déplacements, les sénatrices se sont montrées plutôt optimistes quant au bon déploiement des mesures prévues par la loi du 19 mai 2023 relative aux Jeux Olympiques, dite loi « JOP ». Elles reconnaissent cependant que certains objectifs fixés par la loi n’ont pas été atteints. 

Dans ce rapport, les sénatrices « insistent sur des points précis »  – d’où les 55 préconisations formulées – dans le but de « gagner la médaille d’or de la sécurisation ». 

« Une maîtrise relativement globale » 

Sur la vérification de l’exécution de la loi, si certaines inquiétudes ont pu exister au début, les sénatrices affirment que tous les retards ont été rattrapés, notamment dans la publication des décrets, et que « tous les risques ont été anticipés et évalués ». Agnès Canayer salue notamment « une maîtrise relativement globale »  de la sécurité.

Seule manque encore, selon la mission, la publication des décrets « grands évènements »  liés à la sécurisation de la cérémonie d’ouverture des JO et aux « clubs 2024 »  qui sont des fanzones animées et festives autour des Jeux Olympiques et Paralympiques dans les communes. La mission rappelle par ailleurs que « les collectivités territoriales sont en charge de l’organisation de la sécurité au sein des zones de célébration et des évènements qu’elles organisent. » 

La mission constate un « engagement de haute intensité »  en matière de sécurité avec « 35 000 membres des forces de sécurité intérieure (FSI) et, depuis les récentes annonces du ministre des Armées, Sébastien Lecornu, désormais 18 000 membres des forces armées mobilisés pour sécuriser les JOP au cours de la période estivale ». De plus, 18 000 agents privés seront mobilisés par jour, avec un pic estimé à plus de 24 000 agents pour la cérémonie d’ouverture.

Rappelons que la loi élargit la procédure de « criblage », c’est-à-dire la conduite d’enquêtes administratives d’identification préalable menée par les forces de l’ordre. Cet élargissement vise les participants ainsi que les personnes accréditées sur les sites de compétition et les fanzones. Les sénatrices rappellent que ce dernier « est en cours »  et que déjà 1 600 personnes ont été écartées. 200 000 personnes en moyenne ont pour l’instant fait l’objet de cette procédure sur le million prévu. 

La remise de ce rapport a aussi été l’occasion pour les sénatrices d’indiquer qu’une zone où les manifestations seraient autorisées sera prévue à Paris, « comme pour les Cop et les G20 », selon une rapporteure. C’était une demande de la Commission des lois, qui n’a, pour le moment, pas d’informations sur la localisation de la zone. On ne sait pas pour le moment si l’État compte interdire les manifestations à Paris ou si ces rassemblements seront fatalement rendus impossibles par les restrictions de circulation annoncées il y a quelques jours. 

Pas de vidéo ni de scanner 

C’était pourtant un point incontournable de cette loi. L'article 7 permet en effet « à titre expérimental et jusqu'au 30 juin 2025, l'utilisation de traitements algorithmiques sur les images captées par les dispositifs de vidéoprotection et les drones afin de détecter et de signaler des évènements prédéterminés susceptibles de menacer la sécurité des personnes ». 

Finalement, alors qu’une expérimentation tardive a été menée avec 6 caméras lors d’un concert du groupe Depeche Mode, « la vidéoprotection augmentée ne sera pas optimum au moment des JO », ce qui n’empêche pas qu’elle sera expérimentée. Cependant, ce manquement devra être « compensé par plus de forces de l’ordre ». De même, le scanner corporel à ondes millimétriques ne sera pas utilisé. « Un défaut d’outil qui devra aussi être compensé », ajoute Agnès Canayer. Espérons que ces défaillances techniques ne pénalisent pas, comme le redoutent beaucoup d’élus, les territoires où déjà de nombreuses forces doivent être mobilisées en Ile-de-France durant les moments clés de la compétition. 

« Ne pas déshabiller les collectivités de leurs forces de l’ordre » 

Pour ne pas délaisser le reste du territoire cet été, « sans pour autant recourir aux polices municipales comme supplétifs aux forces de sécurité intérieure, les rapporteures proposent de garantir l’information des maires, par le biais du préfet de département, sur les prévisions de déplacement des forces de sécurité intérieure affectées dans le département et, en temps réel, de toute évolution en la matière et, à l’inverse, de les inciter à informer les préfets, en amont, de leur organisation afin d’optimiser l’organisation d’événements estivaux complémentaires aux JOP ». 

Les sénatrices posent un regard positif « sur le maillage territorial »  mais insistent sur le fait qu’il « ne faut pas déshabiller les collectivités de leurs forces de l’ordre ». Marie-Pierre de La Gontrie assure qu’il y a eu une prise en compte de cette question et que le volume très important des forces de l’ordre mobilisées au total, avec l’armée, est rassurant. 

Comme ont pu le constater les sénatrices, les maires du littoral sont particulièrement inquiets, et ce depuis l’annonce du ministre de l’Intérieur en novembre 2022 indiquant que les maîtres-nageurs sauveteurs CRS ne seront pas présents sur les plages pour l'été 2024 mais seront affectés à la sécurité des Jeux olympiques et paralympiques. 

Sur ce point, Marie-Pierre de La Gontrie, a déclaré que ce manque pourrait être compensé par « les sapeurs-pompiers ou les réservistes en cours de recrutement ». Le rapport préconise aussi de faciliter la mutualisation « temporaire »  et volontaire des gardes-champêtres et policiers municipaux en cas de besoin pour assurer les missions de sécurisation incendie ou de sécurisation des plages au cours de l’été 2024 et de « poursuivre les efforts de recrutement au sein des réserves opérationnelles de la police et de la gendarmerie nationales, en particulier pour assurer la surveillance des plages lors de la période estivale ». 

Il semble cependant que si ces mesures apportent en partie une réponse au maintien de l’ordre public, elles occultent la partie surveillance et sauvetage des baigneurs. Rappelons qu’en France, les noyades font plus de 1 000 morts chaque année, dont la plupart ont lieu en mer.

Le président de l’AMF a d’ailleurs écrit au ministre de l’Intérieur il y a quelques jours pour l’alerter sur le fait que des maires du littoral s’inquiètent de la sécurité des plages et de la surveillance des baignades. Plus globalement, l’AMF demande davantage de concertation avec les maires et le respect de la circulaire du 13 décembre 2022 sur la tenue des évènements estivaux durant cette période qui doit être impérativement appliquée, dans les termes prévus, et ce uniformément sur l’ensemble du territoire national. 

Polices municipales

Le rapport de la Commission des lois formule également trois recommandations pour faciliter la participation des polices municipales à la sécurisation des JOP. La cinquième proposition du rapport vise à « faciliter l’adhésion des policiers municipaux à l’engagement renforcé lors des JOP en faisant évoluer, avant la fin de l’année, leur régime indemnitaire afin d’offrir aux maires la possibilité de leur octroyer une prime exceptionnelle en cas de participation à la sécurisation de "grands événements" ». Cette proposition reprend en fait le projet de décret portant refonte du régime indemnitaire des policiers municipaux et des gardes champêtres qui a récemment fait l’objet d’un avis favorable du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) (lire Maire info du 28 mars). 

En ce qui concerne strictement les Jeux, les sénatrices appellent à « l’actualisation des conventions de coordination des interventions de la police municipale et des forces de sécurité de l'État pour prendre en compte les besoins locaux spécifiques résultant de l’organisation des JOP et exclure toute mise à disposition sans accord du maire ».

Enfin, la mission souligne qu’il serait souhaitable que des négociations entre l’État et les collectivités territoriales puissent avoir lieu « en vue d’une compensation financière des coûts résultant d’une mobilisation supplémentaire des polices municipales pour assurer la sécurisation des JOP ». 
 

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