Édition du jeudi 22 février 2001
Jacques Chirac : la possibilité pour l’Assemblée territoriale de Corse d'adaptation de la loi ou du règlement présente un “ fort risque d'inconstitutionnalité ”
Jacques Chirac s'est de nouveau inquiété, lors du Conseil des ministres, du "fort risque d'inconstitutionnalité" du projet de loi sur la Corse et a estimé qu'il n'était pas "de bonne pratique" de soumettre le texte au Parlement "sans avoir résolu cette difficulté de principe".
Le président, qui a réaffirmé son soutien à un processus de réformes en Corse, a mis également en garde le gouvernement contre un possible "effet de contagion" qui remettrait en cause l'équilibre entre l'État et les régions et porterait atteinte à l'unité de la République.
"Je constate que nous est aujourd'hui soumis un projet dont certaines dispositions présentent un fort risque d'inconstitutionnalité. Il en est ainsi de la possibilité d'adaptation de la loi ou du règlement par l'Assemblée territoriale, du caractère quasiment obligatoire de l'enseignement de la langue corse, du maintien durable d'inégalités en matière fiscale", a déclaré le chef de l'État.
« Si veiller au respect de la Constitution est l'une de mes prérogatives, toutes les institutions de la République doivent concourir à ce devoir de vigilance", a-t-il souligné.
"Tout d'abord, il est nécessaire - je l'ai déjà dit ici - de réaliser des réformes en Corse. Il faut aller au-delà du statut actuel pour mieux tenir compte des spécificités de cette région et des handicaps de l'insularité", a-t-il dit.
Le chef de l'État a précisé qu'il approuvait, à ce titre, "les mesures retenues pour l'incitation à l'investissement, le financement de l'économie et la mise en œuvre d'un programme d'investissements publics". Il appuie également les transferts de compétence prévus par le texte né des accords de Matignon mais souhaite que ce processus participe d'une réforme nationale de la démocratie locale, en vue d'instaurer "une nouvelle architecture des pouvoirs et des responsabilités" moins centralisatrice.
"Je veux souligner que le renforcement de la démocratie locale ne peut se limiter à la région Corse. Il doit s'inscrire dans un mouvement général que j'estime pour ma part indispensable", a-t-il déclaré.
"Notre État est encore beaucoup trop centralisateur et, sans porter atteinte aux principes fondateurs de l'indivisibilité de la Nation et de l'égalité de tous devant la loi, il est possible de mettre en place en France une nouvelle architecture des pouvoirs et des responsabilités", a-t-il poursuivi.
Le chef de l'État s'est enfin interrogé sur "la finalité et les conséquences politiques" du projet de loi, qui porte en germes, selon lui, deux scénarios : l'indépendance de la Corse ou un fédéralisme de fait.
"Ou, seule parmi toutes les régions, la Corse se voit déléguer un pouvoir d'adaptation législatif et réglementaire, seule parmi les langues régionales, la langue corse est enseignée de manière obligatoire, et progressivement l'île se détachera de la France, comme le souhaitent d'ailleurs les partisans de l'indépendance qui ont apporté leur soutien au projet de loi. Ou ces dispositions sont revendiquées par d'autres régions, et la France, au lieu d'avoir trouvé un meilleur équilibre entre État et régions, cessera d'être un pays unitaire où chacun est égal devant la loi votée par le Parlement", a-t-il expliqué.
Cette dernière hypothèse, a-t-il dit, constituerait "une remise en cause profonde de notre pacte républicain à un moment de notre histoire où nous devons rester rassemblés et unis pour être plus présents, plus forts, plus influents dans l'Europe en construction".
"En tout état de cause, une telle évolution, qui ne me paraît pas conforme à l'intérêt national, ne pourrait intervenir qu'après un vaste débat et un véritable choix par le peuple souverain", a-t-il souligné.
Il a souhaité en conclusion que le parlement "prenne toute la mesure" de ces enjeux. L'examen du projet de loi est prévu au printemps.
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