Édition du mardi 5 mai 2015
François Guégan : « Annuler un festival, c'est un crève-cÅ“ur »
© DR
Vous avez dû prendre la décision d’annuler un festival. De quelle manifestation s’agissait-il, et pourquoi avez-vous pris cette décision ?
Il s’agit de la Fête de la Scie, une manifestation héritée des carnavals du Moyen âge. C’est un festival d’arts de la rue, qui se tient traditionnellement le premier week-end d’avril et réunit 20 000 à 25 000 personnes sur un week-end. Pour la première fois cette année, il n’a pas eu lieu : cette manifestation représente un coût d’environ 180 000 euros, dont environ 120 000 euros net pour la ville. Calculez : nous avons une dotation de l’État qui diminue de 250 000 euros. Nous n’avions pas le choix, il y avait urgence. Même si cela a été un crève-cœur.
Les dépenses culturelles sont-elles les premières dans lesquelles on tranche ?
Hélas oui : tout simplement parce que ce sont celles qui sont les plus rapides à compresser. La baisse des dotations de l’État est tellement brutale qu’il faut réagir très rapidement, et les autres actions permettant de réaliser des économies – je pense à la masse salariale, par exemple – sont beaucoup plus longues à mettre en œuvre.
L’annulation d’une telle manifestation permet certes des économies pour la commune, mais ne représente-t-elle pas un important manque à gagner pour l’économie de la ville, ses commerçants notamment, ou les associations ?
D’abord, je tiens à dire que l’annulation n’est pas – du moins je le souhaite – définitive. J’espère que nous pourrons reprendre dès l’an prochain, vu que c’est une opération que nous avons mis vingt ans à pouvoir mettre sur pied.
Il y a évidemment un manque à gagner économique pour les commerçants. Mais surtout un manque à gagner dans la vie sociale. Ce festival faisait partie de la vie culturelle et sociale de notre agglomération – la Communauté de l’agglomération havraise – et il connaissait même un succès certain au niveau régional.
Naturellement, la nouvelle a été difficile à accepter, même si les Harfleurais se sont faits une raison. Ils savent parfaitement que s’il n’y a pas de réduction des dépenses, il y aura forcément une augmentation des impôts locaux, et n’en ont pas envie. Quant aux associations, cela n’a pas été facile non plus, puisqu’elles font partie des principaux acteurs de cette fête, y tiennent des stands, ce qui leur permet de financer en partie leurs activités.
Nous avons beaucoup communiqué et fait des réunions publiques en janvier, avant le vote du budget.
Fleur Pellerin, la ministre de la Culture, estime que la bonne réponse face aux annulations de festival, c’est la contractualisation. Elle dit vouloir proposer aux communes une sorte de « pacte » : si celles-ci « stabilisent leurs financements », la ministre s’engage à « maintenir les crédits de la culture sur leur territoire pendant trois ans ». Qu’en pensez-vous ?
J’en pense que j’aimerais bien avoir de ses nouvelles ! Je lui ai écrit le 15 février pour m’indigner de la baisse des dotations, en lui rappelant qu’elle avait déclaré, aussi, que les collectivités devaient investir davantage dans la culture. C’est bien joli, mais il faut en avoir les moyens.
Pour l’instant, je n’ai pas reçu la moindre réponse.
En attendant, si nous voulons envisager de refaire la Fête de la Scie en 2016, il faudra couper dans d’autres dépenses. Par exemple, supprimer le repas de Noël que nous organisons pour les anciens. Ce sera encore un pan de la vie sociale qui s’en ira. Mais quel choix nous donne-t-on ?
Propos recueillis par Franck Lemarc
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