Dotation d'intercommunalité : le Conseil constitutionnel censure une disposition sur le prélèvement de l'État
Le Conseil constitutionnel vient de déclarer inconstitutionnel un point de la réforme de la dotation d’intercommunalité instaurée en 2019. Le prélèvement de l’État qui était opéré à l’identique chaque année sur certains EPCI conduisait à une différence de traitement non justifiée entre les intercommunalités. Malgré tout, les Sages ont décidé que les prélèvements déjà effectués ne pourront être contestés.
C’est à la demande de la communauté de communes de Chinon, Vienne et Loire que l’on doit cette décision. Celle-ci a saisi le Conseil constitutionnel, cet été, d’une QPC concernant la réforme de la dotation d’intercommunalité - et notamment les dispositions du paragraphe II de l'article 250 de la loi de finances pour 2019 - qui lui imposait un prélèvement de près de 792 000 euros au titre du redressement des comptes publics.
Inégalité devant les charges publiques
Elle reprochait, comme l’indiquent les Sages dans leur décision du 15 octobre dernier, à celle-ci d’aller à l’encontre du principe d’égalité devant les charges en entraînant « une différence de traitement injustifiée ». De plus, elle aurait contrevenu, selon elle, aux principes de libre administration et d’autonomie financière des collectivités territoriales puisque le prélèvement en question était « susceptible de peser fortement sur les capacités d'autofinancement des établissements publics en cause ».
Le problème, aux yeux de la communauté de communes de Chinon, Vienne et Loire, est que cette réforme reconduisait chaque année le prélèvement opéré en 2018 au titre de la contribution au redressement des finances publiques. Et ce « de manière pérenne » et « pour les seuls EPCI à fiscalité propre qui y étaient assujettis en 2018 ».
Un prélèvement fixe et perpétuel
Pour comprendre, un rapide retour en arrière s’impose. Jusqu’en 2018, la dotation d’intercommunalité était minorée en fonction des recettes réelles de fonctionnement des EPCI afin que chacun d’entre eux participe à l’effort budgétaire de redressement des comptes publics. Lorsque cette minoration était plus importante que le montant même de la dotation, un prélèvement de l’État était opéré, cette fois, sur les compensations d’exonération dues ou sur le produit de la fiscalité locale. Et ceci dans le but de faire participer les EPCI « à hauteur de leur richesse ».
En 2018, 132 EPCI étaient ainsi concernés par une situation de « DGF négative », selon les Sages qui précisent, en commentaire de leur décision, que « ce prélèvement sur fiscalité pouvait représenter quelques milliers d’euros ou centaines de milliers d’euros », voire, « dans des cas plus rares, dépasser un ou deux millions d’euros ».
Or, en 2019, la réforme a maintenu de manière pérenne ce prélèvement pour les seuls EPCI qui y avaient été assujettis en 2018 « en en fixant le montant à celui appliqué cette même année 2018 ». Et si elle avait bien prévu un nouveau calcul du prélèvement en cas de changement de périmètre de l’EPCI, « aucune autre évolution de la situation » n'était envisagée pour remettre en cause l’assujettissement au prélèvement ou bien le montant.
A ce titre, le montant à acquitter ne rendait ainsi « plus compte des caractéristiques démographiques ou financières des établissements publics en cause », estime la communauté de communes, entraînant donc cette « différence de traitement » entre les EPCI « selon qu'ils ont ou non été assujettis à ce prélèvement en 2018, et une charge excessive pour ceux qui y ont été assujettis ».
Pas de recours sur les prélèvements passés
Le Conseil constitutionnel considère ainsi que les parlementaires n’auraient pas dû « laisser subsister de façon pérenne une telle différence de traitement » puisque cela entraînait « une atteinte caractérisée » à l'égalité devant les charges publiques. C’est bien ce caractère pérenne « en l’absence d’une situation également pérenne » qui a donc été jugé inconstitutionnel. Une raison suffisante pour le Conseil constitutionnel de ne pas aller plus loin et ne pas se prononcer sur les « autres griefs » émis par la communauté de communes.
Reste que si les dispositions déclarées contraires à la Constitution ne sont désormais plus en vigueur (car elles ont déjà été modifiées par la loi de finances pour 2020), ce n’est pas pour autant que les prélèvements déjà opérés pourront être contestés par les intercommunalités concernées sur le fondement de cette inconstitutionnalité. Ce sont les Sages, eux-mêmes, qui en ont décidé ainsi, arguant que « la remise en cause de l’ensemble des prélèvements opérés aurait des conséquences manifestement excessives ».
A.W.
Consulter la décision du Conseil constitutionnel.
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