Intelligence artificielle : les territoires travaillent pour prendre au mieux le virage
Par Lucile Bonnin
A l’occasion d’une conférence de presse qui s’est tenue lors de l’Intercotour Ile-de-France hier à Paris, les Interconnectés, France urbaine et Intercommunalités de France ont dévoilé un plan d’action national d’observation des usages de l’Intelligence artificielle (IA) dans les territoires. Son nom : « IA - Intelligences Associées des territoires ».
Les membres de la commission « Numérique et innovation » de ces trois associations « appellent les élus locaux et le gouvernement à prendre position et à agir » dans le but « d’accélérer la réflexion collective et de doter les collectivités d’outils adéquats tant le développement de solutions d’IA, et d’IA génératives telles que ChatGPT, et les incitations croissantes des industriels et de l’État français s’intensifient ».
Trois chantiers sur trois ans
« L’actualité galopante pourrait nous pousser à être réactifs à l’actualité, mais nous n’avons pas envie de ça, explique Francky Trichet président des Interconnectés et vice-président de Nantes métropole. Nous avons envie de nous donner le temps de comprendre le phénomène et de faire du travail de fond. C’est pourquoi nous lançons cette dynamique des intelligences associées et que les territoires s’engagent d’un point de vue stratégique sur un travail de long terme pour élaborer des doctrines en commun. » Ainsi, le plan s’articule autour de trois chantiers qui s’étendront sur trois années.
Le premier porte sur l’intelligence artificielle au service des politiques publiques. Comme l’explique Bertrand Serp, vice-président de Toulouse métropole, le but est d’ « identifier les IA dans les territoires qui ont aujourd’hui montré un impact réel et les identifier dans une bibliothèque nationale qui serait une sorte de pot commun pour les territoires qui pourront s’emparer des dynamiques vertueuses ».
Un autre chantier particulièrement intéressant va être lancé concernant la transformation des métiers de la fonction publique territoriale. « L’objectif est d’identifier les impacts, d’encadrer les pratiques afin de s’assurer que l’humain reste au cœur du projet et d’accompagner les collectivités à adapter les métiers et les compétences des agents à la transition numérique » , peut-on lire dans le communiqué de presse. Laurent Watrin, adjoint au maire de Nancy, estime qu’il s’agit davantage de penser de nouvelles organisations de travail que de supprimer des emplois dans les collectivités, ce qu’il ne conçoit à aucun niveau.
Enfin, dernier chantier qui s’inscrit fortement dans l’actualité : étudier l’IA dans la vie publique alors que la loi relative à l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) 2024 a été promulguée en mai dernier et prévoit l’utilisation de vidéosurveillance algorithmique (VSA), dite aussi vidéosurveillance « intelligente » . Il est indiqué dans le communiqué que « les transformations profondes générées par le déploiement de l’IA dans la vie quotidienne et dans l’espace public ont un impact sociétal fort et portent des risques en matière de respect de la vie privée ».
Un sujet brûlant pour les collectivités
Se saisir du sujet de l’intelligence artificielle est indispensable pour les collectivités territoriales pour réfléchir à un usage profitable de ces nouvelles technologies. Les sentiments ambivalents que provoquent certaines innovations, « entre fascination et peur » , montrent qu’il y a du travail à faire en terme d’information et d’acceptabilité.
Laurent Watrin dénonce par exemple « les nombreuses études qui disent tout et son contraire » . Il prend l’exemple d’une étude réalisé en 2013 par Frey et Osborne qui présentait l’intelligence artificielle comme une menace pour l’emploi en disant que « 47 % des emplois aux États-Unis allaient disparaitre d’ici 2023. Résultat : ils se sont plantés ! » Les suppressions d'emplois ne sont pas envisageables dans une collectivité mais « si l’IA nous aide à avoir les bonnes données et les bons critères pour faire des choix politiques, c’est bien ».
D’autant plus que l’Intelligence artificielle pourrait être la bienvenue alors que les données des collectivités sont vieillissantes, que les modèles prédictifs ne sont pas toujours mis à jour et que les collectivités sont en ce moment très contraintes économiquement. Les agents seront aussi directement impactés car, par exemple, Microsoft a lancé en début d’année Microsoft 365 Copilot, qui intègre l'intelligence artificielle à ses différentes applications comme Word, Excel, Powerpoint.
Enfin, c’est surtout dans la concertation avec les citoyens que les collectivités pourront avancer sur le sujet. La ville et la métropole de Montpellier par exemple ont mis en place une convention citoyenne, où des habitants, des scientifiques et des entrepreneurs discutent des bénéfices et des dangers de l’IA.
La Commission numérique de l’AMF qui se réunit la semaine prochaine abordera aussi les enjeux de l’intelligence artificielle pour les communes et les EPCI. Ce point pourrait également faire l’objet d’un débat lors du prochain congrès de l’association.
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