Inondations dans les Hauts-de-France : des dizaines de communes reconnues deux fois en état de catastrophe naturelle
Par Franck Lemarc
Un deuxième arrêté de catastrophe naturelle en à peine plus de deux mois, pour les mêmes départements. Après qu’une première vague d’inondation a frappé le Nord et le Pas-de-Calais début novembre, occasionnant le classement en état de catastrophe naturelle de 205 communes, une deuxième vague a frappé pendant les fêtes de Noël. On le sait depuis ce matin, avec la parution de l’arrêté : ce sont 169 communes qui sont cette fois reconnues en état de catastrophe naturelle (12 dans le Nord et 157 dans le Pas-de-Calais).
Finalement, deux épisodes distincts
La parution de cette liste apporte une réponse à une question qui se posait depuis le début du mois de janvier et les déclarations du ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu. Celui-ci, en visite dans le département du Pas-de-Calais, avait alors annoncé « des mesures exceptionnelles » face à une situation « qui n’est pas dans le manuel », à savoir une même catastrophe qui se répète deux fois en quelques semaines. Le ministre avait alors laissé entendre que les sinistrés déjà frappés en novembre pourraient ne pas avoir à refaire toute une procédure, « en considérant que c’est le même épisode qui se poursuit ».
Il y avait hier toutes les raisons de croire que cette décision avait été confirmée, puisque Christophe Béchu a déclaré, en visite dans les Hauts-de-France, que les communes touchées en décembre-janvier qui n’avaient pas déjà été classées en état de catastrophe naturelle le serait dès aujourd’hui, par arrêté.
Mais ce matin, mauvaise surprise, contradictoire avec les annonces d’hier : ce n’est pas la voie qui a été retenue. En effet, un examen attentif de la liste publiée ce matin montre qu’un bon nombre de communes qui figuraient déjà dans l’arrêté de reconnaissance en catastrophe naturelle publié le 15 novembre y figurent à nouveau, pour un événement « survenu entre le 27 décembre et le 11 janvier ». Il s’agit donc bien d’un épisode distinct du premier, ce qui, on peut le supposer, signifiera de dédoubler les procédures, les déclarations et les dossiers.
Quatre communes du Pas-de-Calais figurent également dans l’arrêté publié ce matin, mais pour l’événement de novembre. Il est précisé pour ces communes que la « date de début de la période de reconnaissance » est, selon les cas, le 28 octobre ou le 2 novembre, et la fin le 24 novembre 2023. Il s’agit de Bazinghem, Longueville, Sailly-sur-la-Lys et Le Wast. Conclusion : aucune commune n’est considérée frappée par « le même épisode » sur deux mois.
En tout, comme le montrent les cartes ci-dessous réalisées par Maire info, les deux épisodes ont frappé 279 communes (31 dans le Nord et 248 dans le Pas-de-Calais).
Sur les 31 communes touchées dans le Nord, 20 l’ont été en novembre, 7 en décembre-janvier, et 4 deux fois – ces dernières sont donc classées deux fois en état de catastrophe naturelle en deux mois.
Dans le Pas-de-Calais, 95 communes ont été frappées seulement en novembre, 63 seulement en décembre-janvier, et 90 lors des deux épisodes.
Cette situation emporte une autre conséquence pour les communes touchées deux fois. Rappelons que dans un certain nombre de cas, la multiplication de l’occurrence d’une même catastrophe naturelle, sur moins de cinq années, dans les communes non couvertes par un PPRN, a pour conséquence d’augmenter la franchise. C’est le cas, notamment, pour les biens assurables des communes. Le fait de ne pas avoir considéré qu’il s’agit d’une même occurrence va donc pénaliser les communes concernées.
« Rachat par l’État »
En visite à nouveau dans la région hier, pour rencontrer les élus locaux, Christophe Béchu a annoncé de nouvelles procédures pour les sinistrés. Il s’agit de traiter le cas des maisons tellement abîmées qu’elles sont devenues non seulement inhabitables mais aussi invendables. Christophe Béchu a annoncé que dans certains cas, elles seraient rachetées par l’État. « Vous êtes un particulier, vous avez subi des dégâts qui dépassent la moitié de la valeur vénale de votre maison : vous êtes éligible à un rachat automatique par l’État, qui se fait dans la limite de 240 000 euros d’argent public. » Par ailleurs, les particuliers qui ont subi des dégâts moins importants pourront demander « un rachat amiable qui nécessite qu’il y ait un accord entre l’État et la collectivité locale ».
Le ministre a déclaré que ces dispositifs seraient « précisés dans les prochaines semaines », ce qui ne sera certes pas inutile. Ces annonces posent en effet autant de questions qu’elles apportent de réponses. Comment s’articulera ce « rachat par l’État » par rapport aux remboursements des assurances ? Que signifie cet « accord entre l’État et la collectivité locale », et qui devra mettre la main au portefeuille pour ce « rachat amiable » ? S’agira-t-il réellement d’un rachat ou d’une indemnisation d’expropriation comme le prévoit le projet de loi actuellement en débat au Parlement ? Tous ces points devront être clarifiés au plus vite.
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