Canal Seine-Nord Europe : les collectivités prennent officiellement la main
Un décret paru ce matin au Journal officiel détermine la composition des instances dirigeantes de l’établissement public local Société du Canal Seine-Nord Europe. Comme prévu par la loi d’orientation des mobilités (Lom), les collectivités y sont largement majoritaires.
C’est un pas décisif dans l’interminable feuilleton du canal Seine-Nord, destiné à relier l’Oise aux grands ports du nord de l’Europe en passant par la Somme et le Pas-de-Calais. Rappelons que ce canal aurait dû, selon les projets initiaux, être inauguré… en 2016, et qu’à ce jour pas le moindre coup de pioche n’a été porté.
Une si longue histoire
Inscrit au schéma directeur national des voies navigables en 1984, le canal a fait l’objet d’une concertation publique en 1997 seulement, et son tracé définitif (104 km) a été validé en 2002. Déclaré d’utilité publique en 2008, le projet a ensuite été victime de la crise financière : en 2013, le ministre des Transports, Frédéric Cuvillier, déclarait que son financement était « inatteignable », après le retrait de Bouygues du partenariat public-privé.
Le projet a alors été reconfiguré. En octobre 2013, l’Union européenne annonçait qu’elle était prête à en financer une partie au titre des « projets de transport trans-européens » : son aide pourrait se monter à 42 % du coût total. Très engagés dans ce projet, les élus régionaux des Hauts-de-France ont alors convaincu l’État de s’engager dans un financement tripartite : l’État et les collectivités mettraient un milliard d’euros chacun, l’Europe, 1,8 milliard. Une dernière tranche (776 millions d’euros) devait être obtenue par un prêt auprès de la Caisse des dépôts et de la Banque européenne d’investissement.
Le dossier semblait enfin bouclé lorsque, en juillet 2017, le nouveau gouvernement annonçait son intention de faire une « pause » sur les grands projets d’infrastructures, et annonçait de surcroît que l’État n’était pas disposé à garantir l’emprunt de 776 millions d’euros. Dans un ultime effort, les élus locaux (présidents de la région Hauts-de-France et des départements du Nord, du Pas-de-Calais, de l’Oise et de la Somme) annonçaient alors que les collectivités étaient prêtes à prendre en charge cette garantie. Mais avec une demande en contrepartie : prendre la barre et devenir pilotes du projet.
Le gouvernement a accepté ce principe.
Les collectivités clairement à la barre
Cet accord a été officialisé par la loi d’orientation des mobilités. En juin 2019, via un amendement à la Lom, le gouvernement actait le principe de la transformation de l’établissement public Seine-Nord Europe en « établissement public local à caractère industriel et commercial », dont la principale mission est de « réaliser l'infrastructure fluviale reliant les bassins de la Seine et de l'Oise au réseau européen à grand gabarit entre Compiègne et Aubencheul-au-Bac ». Avec une précision essentielle : le conseil de surveillance de l’établissement serait composé « au moins pour moitié » de représentants des collectivités territoriales. Autrement dit, il s’agissait de l’officialisation de la régionalisation du projet.
La Lom prévoyait un décret pour fixer la composition des instances dirigeantes de l’établissement. C’est ce décret qui est paru ce matin.
La composition du conseil de surveillance reflète sans ambiguïté la décision prise : sur trente membres, 16 sont des élus locaux et 10 des représentants de l’État. Pour ce qui est des élus, siègeront au conseil de surveillance les présidents de la région Hauts-de-France et des conseils départementaux du Nord, de la Somme, du Pas-de-Calais et de l’Oise, ainsi que d’autres élus de ces structures. Le 16e représentant est un élu d’une commune, désigné comme « le représentant de la collectivité apportant la contribution la plus importante au projet » en dehors des régions et départements.
Le président du conseil de surveillance sera obligatoirement élu parmi les représentants des collectivités.
Par ailleurs, il est prévu l’existence d’un « comité stratégique » pouvant « être saisi par le conseil de surveillance de toute question entrant dans les missions de l'établissement public » et « émettre des propositions et demander au président que des questions soient inscrites à l'ordre du jour d'une réunion du conseil de surveillance ». Ce comité fera la part belle aux communes et EPCI: il devra comprendre un représentant de chaque commune « dont le territoire est, pour tout ou partie, compris dans l'emprise de l'infrastructure (…) et de ses aménagements connexes » ; et de chaque EPCI compétent en matière de transport fluvial ou d’aménagement dont au moins une commune membre est concernée par le projet. Seront également présents au comité stratégique, notamment, les chambres de commerce et d’industrie et des chambres d’agriculture ainsi que des représentants du Cese.
Ce décret entrera en vigueur le 1er avril. À partir de là, la première réunion du comité de surveillance devra se dérouler sous deux mois, avec l’élection du président du conseil de surveillance.
Il est envisagé, sans irréalisme, que les travaux puissent enfin commencer au deuxième semestre 2020.
F.L.
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