Une proposition de loi pour « remettre à plat » la question de la Défense extérieure contre l'incendie
Par Franck Lemarc
Ils l’avaient promis, ils l’ont fait. Il y a un an presque jour pour jour, Hervé Maurey et Franck Montaugé présentaient un rapport au nom de la Délégation aux collectivités territoriales du Sénat, qui dressait un bilan particulièrement sévère de la réforme de la Deci (Défense extérieure contre l’incendie). Faute de réaction rapide du gouvernement, expliquaient-ils alors, les deux sénateurs prévoyaient de présenter une proposition de loi pour faire passer leurs propositions par la voie parlementaire. Le gouvernement n’ayant pas réagi au rapport, la proposition de loi est déposée.
Rapport alarmant
Rappelons que la Deci vise à « garantir l’alimentation en eau des moyens des services départementaux d’incendie et de secours » (Sdis). Réformée en 2011 par la loi n° 2011-525, la Deci a été décentralisée et les maires « ont été placés au cœur du dispositif », rappellent les sénateurs : communes ou intercommunalités sont désormais compétentes « pour la création, l’aménagement et la gestion des points d’eau » nécessaires aux Sdis.
Mais cette réforme, bien que « très attendue par les maires », n’a « pas tenu ses promesses », faute de concertation. C’est le bilan qu’en faisaient les deux sénateurs il y a un an (lire Maire info du 9 juillet 2021), estimant à l’issue de leur enquête que « 70 % des maires » dénonçaient une concertation « insuffisante » et que 80 % d’entre eux « estiment que leur territoire n’est que partiellement couvert par la Deci ». À cela s’ajoutent des problèmes financiers : les communes ont dû se conformer aux RDDECI (règlements départementaux de Deci), qui ont très lourdement grevé le budget d’investissement de certaines communes rurales, dénonçaient les rapporteurs. En préambule de leur proposition de loi, ils insistent d’ailleurs sur ce point : « Ce sont parfois des investissements de plusieurs centaines de milliers d’euros qui sont nécessaires à des communes de petite taille pour se mettre en conformité, contraignant les maires à devoir renoncer à des investissements importants sur lesquels ils s’étaient pourtant engagés lors des élections municipales. » Une commune de l’Eure, illustre Hervé Maurey, dotée d’un budget d’investissement de 210 000 euros, « évalue les dépenses nécessaires à 3,6 millions d’euros » !
Par ailleurs, l’absence de couverture en Deci « amène fréquemment les maires des communes concernées à devoir refuser des permis de construire », ce qui « pénalise » le développement de ces communes.
« Logique de proportionnalité »
Le gouvernement n’est pas tout à fait resté sans réaction après la publication du rapport. Le 5 janvier dernier, lors d’un débat au Sénat sur ce sujet, il a indiqué « avoir mandaté la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises pour la réalisation d’un audit ». Mais le sentiment des sénateurs a été, comme l’a souligné la sénatrice Françoise Gatel, que le gouvernement « ne prend pas la mesure du problème » : « Ce que nous demandons, a martelé la sénatrice d’Ille-et-Vilaine, c’est qu’une injonction soit adressée à tous les préfets de France. Voici ce qu’il faut leur dire : il est nécessaire de procéder à l’évaluation des dispositions mises en œuvre, à la révision de ces schémas et, dans tous les départements de France, au recensement exhaustif des points d’eau. »
Les deux sénateurs ont donc finalement choisi de porter une proposition de loi pour faire avancer les choses sur ce dossier, et « pour mettre fin aux règles excessivement contraignantes pour les communes dans certains départements ».
La proposition de loi est assez succincte – elle comprend quatre articles. Le premier prévoit une remise à plat des RDDECI sous six mois, en y intégrant « une logique de proportionnalité entre les règles visant à couvrir le risque incendie et leurs conséquences pour les communes en termes de budget, d’urbanisme et de développement ». L’article prévoit d’inscrire dans la loi une obligation de concertation avec les communes et les EPCI compétents.
L’article 2 prévoit que le Schéma départemental d’analyse et de couverture des risques (SDACR) « tienne compte de la réalité de la couverture en Deci existante et des moyens financiers des collectivités exerçant cette compétence, pour ne plus que la DECI soit la variable d’ajustement des choix en matière d’équipement des sapeurs-pompiers, comme c’est le cas actuellement ». Notons enfin l’article 4, qui « autorise les maires à transférer leur pouvoir de police spéciale dans le domaine de la Deci à un syndicat intercommunal compétent en matière d’eau ». Ce dernier point méritera sans doute d'être amendé.
Hervé Maurey, dans un communiqué de presse publié hier, demande que ce texte « soit examiné au plus vite par le Sénat » pour lancer le chantier « de remise à plat des règlements » sur la Deci.
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