Réseau radio du futur : une transition qui risque de coûter cher aux collectivités
Par Lucile Bonnin
C’est en octobre 2022 que le ministère de l’intérieur a annoncé le remplacement du réseau radio Infrastructure nationale partageable des transmissions (INPT), par le Réseau Radio du Futur (RRF).
Cette évolution répond à un besoin impérieux de renouveler les technologies : « Aujourd'hui, les policiers, les gendarmes, les sapeurs-pompiers, les médecins du SAMU utilisent des équipements radio conçus au début des années 1990 (…) qui ne permettent pas la transmission d'importantes quantités de données ou d'images en temps réel depuis le terrain, peut-on lire sur le site du ministère de l'Intérieur. Avec le RRF, la France va se doter d'un réseau de communication très haut débit (4G puis 5G) commun à l'ensemble des acteurs de la sécurité et du secours, leur permettant de communiquer instantanément les uns avec les autres en bénéficiant de nouvelles fonctionnalités : appels vidéo, partage de position en direct, envoi d'électrocardiogrammes etc. » Le lancement du RRF est prévu pour avril 2025.
L’enjeu est donc désormais de réussir cette transition et d’assurer la continuité des communications radioélectriques. C’est dans ce contexte qu’a été publié hier un arrêté « modifiant l'arrêté du 25 juin 1980 modifié portant approbation des dispositions générales du règlement de sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public (ERP) » .
Concrètement, l’arrêté précise que les services publics qui concourent aux missions de sécurité civile doivent être assurés de la continuité de leurs moyens de communications radioélectriques en tout point, notamment souterrain, des ERP du 1er groupe (ERP des 1ère, 2ème, 3ème et 4ème catégories) et des parcs de stationnement couverts, disposant de plus d'un niveau de sous-sol.
Évolution réglementaire
La garantie d'une couverture radioélectrique très haut débit répondant aux exigences du Réseau Radio du Futur (RRF) peut passer « soit par la présence d'une couverture 4G de niveau suffisant, soit par la mise en œuvre de solutions de DAS, de réseau privé, de Wifi ou de répéteurs 4G ».
Comme le résume l’Agence des communications mobiles opérationnelles de sécurité et de secours (ACMOSS) – qui pilote le RRF –, « les exploitants des ERP concernés pourront mettre en œuvre des solutions dédiées s’adossant avec les solutions mises en œuvre pour le grand public : parmi les solutions possibles, les réseaux d’antennes distribuées, ou « Distributed Antenna System » (DAS), permettent d’améliorer la couverture mobile grâce à des installations situées à l’intérieur du bâtiment ». Aussi, « si une telle solution est déjà présente dans l’ERP, seules les vérifications et, le cas échéant, le renforcement de la couverture dans certaines zones (non accessibles au public) pourraient être réalisés. »
L’arrêté précise enfin qu’ « à compter de la décision de migration vers RRF formulée par le préfet, l'exploitant dispose de 5 ans pour mettre en conformité ses installations assurant la continuité des communications radioélectriques ».
Une nouveauté qui va peser sur les communes
Examiné une première fois en février au Conseil national d’évaluation des normes (CNEN), le projet de texte avait fait l’objet d’un report décidé par le Président du CNEN du fait de l’absence d’évaluation précise de l’impact financier de cette nouvelle réglementation pour les collectivités territoriales gestionnaires d’ERP.
Une fiche d’impact général a donc été réalisée par le ministère de l’Intérieur le mois suivant. Cette dernière précise qu’en fonction de la typologie de l’établissement, du nombre d’utilisateurs et du type de raccordement aux installations du RRF, les impacts financiers sont les suivants : mise en place d’un DAS entre 20 et 30 euros par m2 ; mise en place d’un réseau privé (RMP) entre 150 000 euros et 1 million d’euros ; mise en place du WIFI (condition préalable d’éligibilité requise) entre 5 et 10 euros par m2 ; mise en place de répéteurs radio (condition préalable d’éligibilité requise) entre 6 à 12 euros par m2.
Le projet d’arrêté a été réexaminé au CNEN au mois d’avril. Il a reçu un avis défavorable définitif rendu à la majorité des membres élus du Cnen qui « ont de nouveau signalé le coût induit par ces installations pour les collectivités territoriales gestionnaires d’ERP ».
L’AMF estime en effet que même si « la solution à retenir reste à la main du gestionnaire de l’établissement, le coût de cette mise en place est conséquent pour une commune. Pour un parc de stationnement avec une surface à couvrir de 8000m², il est par exemple précisé que l’impact financier pour une mise en place d’un DAS (= réseau d’antennes distribuées) serait de 160 000 euros. Sans accompagnement financier, les collectivités territoriales, acteurs essentiels dans la mise en œuvre des services de secours et de sécurité, ne seront pas en mesure de mobiliser les ressources nécessaires pour faire face à ces nouveaux coûts. »
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