Régularisation temporaire, rétention des mineurs, expulsions : Gérald Darmanin publie ses instructions aux préfets
Par Franck Lemarc
Dès la décision du Conseil constitutionnel connue sur la loi « pour contrôler l’immigration et améliorer l’intégration », le 25 janvier, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, annonçait qu’il allait immédiatement envoyer « quatre instructions » aux préfets pour une mise en œuvre rapide de certaines des dispositions contenues dans ce texte.
Les instructions portent sur les travailleurs des métiers en tension, la fin du placement en rétention des étrangers mineurs, l’expulsion et l’éloignement des étrangers délinquants et la lutte contre les filières d’exploitation des étrangers en situation irrégulière .
« Travailleur temporaire »
De toutes ces dispositions, on se rappelle que c’est celle sur la régularisation temporaire pour les travailleurs exerçant un métier « en tension » qui a fait le plus débat. Après le passage en commission mixte paritaire, le dispositif a subsisté, non pas de droit, mais sur décision des préfets, après examen cas par cas.
Dans son instruction, Gérald Darmanin rappelle qu’une telle procédure de régularisation des travailleurs sans papiers existait déjà, mais qu’elle nécessitait la signature d’un formulaire Cerfa par l’employeur. Le ministre estime que le nouveau dispositif est plus favorable que l’ancien, dans la mesure où il « assure l’autonomie du ressortissant étranger sans titre vis-à-vis de son employeur », puisque la démarche est faite « à sa seule initiative ».
Les annexes de l’instruction détaillent les modalités d’examen des dossiers, qui ne peuvent être qu’« individuels ». La loi a fixé le critère suivant : la remise d’une carte de « travailleur temporaire » est conditionnée à la production de « la preuve d’une expérience professionnelle salariée dans un métier en tension d’au moins douze mois (…) au cours des 24 derniers mois ». Il reste nécessaire de produire des bulletins de salaire, ce qui exclut de fait les travailleurs payés « au noir ». De même, sont exclus du dispositif les autoentrepreneurs, précise le ministre.
Par ailleurs, l’accès à cette régularisation temporaire est conditionné à une durée de résidence continue d’au moins trois ans en France, que les préfets devront vérifier par tous moyens.
Enfin, le dernier critère est celui de l’intégration et du « respect des valeurs de la République » – notamment « en matière de parentalité et d'éducation des enfants (…), d'égalité homme-femme, de violences sexistes et sexuelles ou de discriminations, de laïcité, de respect de la démocratie et de l'État de droit ». Le demandeur devra prouver ces éléments « par tout moyen », par exemple en produisant des attestations de ses proches, « des preuves d’adhésion à des associations, d’activités bénévoles, de participation aux activités scolaires des enfants, etc. »
Naturellement, le casier judiciaire du demandeur devra être vierge.
Une fois toutes ces étapes passées, le préfet pourra délivrer une carte de séjour temporaire, qui sera assortie d’une « autorisation de travail ». Cette autorisation n’est valable que pour les métiers en tension (dont la liste va être fixée par arrêté). « Dans l'hypothèse dans laquelle l'étranger souhaiterait obtenir un contrat de travail auprès d'un employeur pour une activité professionnelle ne figurant pas dans la liste des métiers en tension, ce dernier devra obligatoirement solliciter une autorisation de travail avant la signature du contrat de travail. »
Mineurs
Une autre des instructions publiées ce matin rappelle que le placement en rétention des étrangers mineurs est désormais interdit (sauf à Mayotte). Jusqu’à présent, un étranger mineur pouvait être placé en rétention s’il accompagnait un étranger majeur lui-même placé en rétention. Cette disposition emporte l’impossibilité « de placer en centre de rétention administrative ou dans un local de rétention administrative un parent accompagné de son enfant mineur ». En revanche, dans le cas d’un couple avec enfant, le ministre rappelle aux préfets qu’il reste toujours possible de placer en rétention l’un des deux parents, « et d’assigner à résidence l’autre parent qui accompagne les enfants ».
Les parents seuls avec un enfant devront néanmoins faire l’objet de « mesures d’éloignement », via le placement en « dispositif de préparation au retour » ou la procédure de « départ aidé ».
Expulsions
Dans une troisième circulaire, les services de la place Beauvau rappellent que la nouvelle loi permet une expulsion facilitée pour les étrangers représentants « une menace pour l’ordre public ». Les protections contre l’expulsion ont été drastiquement réduites par la nouvelle loi, afin que « les étrangers relevant des catégories jusqu’à présent protégées puissent faire l’objet d’une expulsion ».
Les « protections » sont de plusieurs ordres : résidence en France depuis l’âge de 13 ans, résidence régulière depuis plus de 20 ans, conjoint ou parent de Français, problèmes de santé graves. Ces protections continuent d’exister, mais leur levée est possible dans davantage de cas (jusqu’à présent, elles ne pouvaient être levées qu’en cas de « menace impérieuse pour la sûreté de l’État » ou activités à caractère terroriste).
Désormais, les protections seront levées si la personne étrangère a fait l’objet d’une condamnation « pour des crimes et délits passibles de cinq ou plus d’emprisonnement ou de trois ans en réitération ». Le mot « passible » est important : « La levée de protection intervient au regard de la peine encourue et non du quantum de la peine effectivement prononcée ». La levée des protections sera également prononcée en cas de violences intrafamiliales, polygamie, faits commis à l’encontre des élus et de dépositaires de l’autorité publique (dont les enseignants, agents des réseaux de transport public, professionnels de santé, forces de l’ordre…).
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