Loi handicap : un bilan positif mais encore des obstacles à surmonter, selon le gouvernement
Par Lucile Bonnin
Alors que l’on célèbre ce mois-ci les 20 ans de la loi de février 2005, de nombreuses institutions dressent un bilan de cette dernière – à l’instar de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation du Sénat qui a organisé plusieurs tables rondes sur le sujet (lire Maire info du 17 janvier).
Cette semaine c’est au tour du gouvernement de se prêter à l’exercice. À l’occasion du Conseil des ministres, Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du Travail et de l’Emploi auprès de Catherine Vautrin et Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée en charge de l’Autonomie et du Handicap, ont présenté une communication portant sur les 20 ans de la loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Hier, Emmanuel Macron a également annoncé qu'à partir du 1er décembre 2025, les fauteuils seront remboursés à 100 %. Une liste de tous les types de fauteuils pris en charge a été publiée au Journal officiel.
Si cette loi a constitué une avancée majeure, comme le pointe le gouvernement, beaucoup reste à faire « pour garantir une inclusion réelle et durable ».
Encore du travail sur l’accessibilité
Sur les 2 millions d'ERP recensés aujourd’hui en France, encore de trop nombreux établissements, ne sont toujours pas accessibles. Et ce, malgré la politique des « agendas d’accessibilité programmée » (Ad’Ap), qui n’aura pas suffi à régler le problème. Rappelons qu’en 2015, le dispositif Ad'AP a imposé une mise en conformité à tous les établissements recevant du public (ERP) qui n’étaient pas accessibles.
Mercredi, le gouvernement a précisé que seulement 700 000 ERP sont entrés dans le dispositif des Ad’AP, « dont 350 000 ont été déclarés accessibles depuis 2015 » . À l’inverse, le gouvernement dit regretter « qu’environ 900 000 ERP sur le territoire ne [soient] engagés dans aucune démarche de mise en accessibilité, dont près de 90 % relèvent de la catégorie des établissements de proximité et commerces du quotidien » . Face à ce manque d’engagement, le gouvernement veut apporter « des réponses concrètes » « dans le cadre du prochain comité interministériel du handicap (CIH), qui se tiendra dans les toutes prochaines semaines. »
Rappelons au passage qu’un fonds territorial d'accessibilité de 350 millions d’euros est ouvert depuis 2023. L’État propose une prise en charge jusqu’à 50 % des frais engagés pour la mise en accessibilité d’un commerce, café, bar ou restaurant jusqu’à 20 000 euros. En septembre dernier, l'ex-ministre en charge du Tourisme, Olivia Grégoire, déplorait le fait que ce fonds n'était pas assez exploité.
Du côté des transports, la mise en conformité des lieux tarde également : « Concernant la mise en accessibilité des gares, 97 gares nationales ont été traitées, soit 60 % des gares prévues dans le schéma directeur national d’accessibilité. 237 gares régionales ont été traitées, soit 64 % des gares régionales prévues dans les schémas directeurs régionaux d’accessibilité. Concernant les transports routiers interurbains, 62 % des 33 011 arrêts prioritaires déclarés par les régions sont accessibles. »
AESH : un développement laborieux
Selon les chiffres présentés cette semaine, « environ 520 000 enfants en situation de handicap sont scolarisés en octobre 2024, alors qu’ils étaient environ 130 000 en 2005 ». Cette augmentation a logiquement conduit à une évolution de l’accompagnement humain. Le gouvernement observe que depuis 2013, le nombre d’accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) a augmenté de 90 %. Pourtant, on recense actuellement uniquement 140 000 AESH, ce qui est peu face aux 520 000 élèves en situation de handicap scolarisés, même si tous n’ont pas besoin d’un accompagnement. À la rentrée 2024, de nombreux élèves se sont retrouvés sans AESH. La pénurie de personnel s’est d’ailleurs mêlée à une autre problématique cette année : la loi Vial, promulguée en mai 2024 qui impose à l'État de prendre en charge le financement des AESH pendant la pause méridienne n’a pas été appliquée dans beaucoup de communes (lire Maire info du 18 septembre).
Le gouvernement rappelle par ailleurs qu’il existe aujourd’hui « environ 11 000 unités localisées pour l’inclusion scolaire (ULIS) et 613 dispositifs autisme pour les troubles du neuro développement sont mis en place, et le développement des pôles d’appui à la scolarité (PAS) est expérimenté dans 4 départements depuis le 1er septembre 2024 » . Ces PAS seront d’ailleurs généralisés dès cette année.
Dans un rapport de la Cour des comptes publié en septembre dernier, les magistrats financiers expliquent que les transformations engagées par le système scolaire s’avèrent « hétérogènes selon les territoires et, dans bien des cas, incomplètes ou inabouties » . Résultat, de « nombreuses fragilités subsistent » et « le parcours des élèves et de leurs familles reste complexe » (lire Maire info du 17 septembre). Des améliorations sont donc attendues, aussi bien sur le plan quantitatif que qualitatif.
Emplois, aides et loisirs
Plusieurs chiffres intéressants sur l’emploi ont été présentés. Selon le gouvernement, en 2023, près de 3,1 millions de personnes ont une reconnaissance administrative de handicap, soit 7,5 % de l’ensemble de la population d’âge actif. De plus, « le taux d’activité et le taux d’emploi des personnes handicapées atteignent respectivement 45 % et 39 %. Le taux de chômage quant à lui est de 12 %, soit six points de moins qu’en 2017. »
La fonction publique se rapproche de l’obligation d’emploi de 6 % de travailleurs en situation de handicap avec 5,6 % des employés en situation de handicap en 2023, soit une progression de 0,2 points par rapport à 2022. « La branche territoriale dépasse l’objectif de 6 % fixé par la loi » , peut-on lire dans le compte rendu du Conseil des ministres.
Les 20 dernières années ont aussi été marquées par des évolutions concernant l’accès aux droits des personnes handicapées. En 2006, les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) ont été créées : « elles comptaient en 2023 environ 6 575 équivalents temps plein (ETP), chiffre qui a augmenté de 20 % ces dix dernières années ». Ce guichet unique a permis de faciliter l’accès aux droits des personnes. Ainsi, en 2022, plus de 1,2 million de personnes perçoivent l’allocation aux adultes handicapés (AAH), « 435 000 pour l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH), et 490 000 pour la prestation de compensation du handicap (PCH). Le gouvernement précise que « les délais moyens de traitement sont autour de 5 mois, toutes prestations confondues, avec d’importantes disparités territoriales. »
Enfin, le gouvernement s’est félicité du fait que l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques a permis de porter un effort particulier au profit de l’offre sportive à destination des personnes en situation de handicap. La mesure « + 3 000 clubs inclusifs » pilotée par le comité paralympique et sportif français doit notamment « permettre d’ici fin 2025 d’augmenter le nombre de clubs en capacité d’accueillir des pratiquants en situation de handicap ».
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