Édition du jeudi 17 décembre 2009
Accessibilité des bâtiments: un amendement «contraire à l'esprit de la loi Handicap de 2005» mais aussi à la jurisprudence du Conseil d'Etat, selon des associations de handicapés
Plusieurs organisations de défense des droits des personnes handicapées demandent au Sénat, qui devait examiner ce 17 décembre le projet de loi de finances rectificative pour 2009, de rejeter un amendement gouvernemental (art. 27 sexies nouveau), adopté une semaine plus tôt par les députés, et visant à réintroduire «le principe de dérogation concernant l'accessibilité des constructions neuves».
Ce texte prévoit de préciser «dans quelles conditions des dérogations motivées peuvent être accordées exceptionnellement» à l'obligation d'accessibilité de trois catégories de bâtiment:
- les bâtiments ou parties de bâtiments nouveaux, en cas d'impossibilité technique résultant de l'environnement du bâtiment;
- les ensembles de logements à occupation temporaire ou saisonnière dont la gestion et l'entretien sont assurés de façon permanente, sous réserve que ces ensembles comprennent une part de logements accessibles et adaptés;
- les établissements recevant du public nouvellement créés dans un bâtiment existant, en cas d'impossibilité technique résultant de l'environnement du bâtiment ou des caractéristiques du bâti existant, ainsi qu'en cas de contraintes liées à la préservation du patrimoine architectural.»
Le texte modifie les articles L.111-7-1 et suivants du Code de la construction et de l'habitation déterminant les règles de l'accessibilité des bâtiments et des logements aux personnes handicapées. En compensation, ces constructions bénéficient forfaitairement d'une déduction de SHON de cinq mètres carrés par logement respectant les règles relatives à l'accessibilité intérieure des logements aux personnes handicapées.
Le Code de la construction et de l'habitation prévoit aussi que des dérogations motivées peuvent être autorisées mais seulement en cas d'impossibilité technique ou de contraintes liées à la préservation du patrimoine architectural, ou lorsqu'il y a disproportion manifeste entre les améliorations apportées et leurs conséquences.
Pour sa part, la commission des lois du Sénat a adopté larticle sans modification. Néanmoins, elle fait plusieurs observations. Elle a noté que le dispositif adopté par l'Assemblée nationale a été présenté par le Gouvernement «comme portant sur la taxe locale d'équipement alors qu'il n'a, en réalité, qu'un lien très limité avec cette taxe dont il ne modifie par les règles actuellement applicables.» Or, sur ce motif d'absence de lien direct avec une disposition de nature fiscale, un amendement quasiment identique avait été déposé mais déclaré «irrecevable» lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2010.
La commission a jugé que, sur le fond, «le dispositif proposé entend répondre au cas de certains programmes de construction dont la mise en service n'est pas possible du fait du non respect de règles d'accessibilité très exigeantes car elles s'appliquent à tous les bâtiments. Le desserrement de ces contraintes serait bénéfique au secteur de la construction.»
Quant aux associations, elles estiment que cet amendement n'est pas seulement «contraire à l'esprit de la loi Handicap de 2005», mais aussi à la décision du Conseil d'Etat d'annuler, en juillet dernier, un décret de mai 2006 autorisant des dérogations aux règles d'accessibilité dans les bâtiments.
Pour accéder au dossier législatif, voir lien ci-dessous.
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