Maire-info
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Édition du jeudi 13 octobre 2022
Grand âge

Grand âge : le gouvernement lance le « CNR Bien vieillir », élus et professionnels attendent des moyens

Le gouvernement a lancé mardi le volet « Bien vieillir » du Conseil national de la refondation (CNR), en présence de nombreux élus. S'ils saluent la démarche et « joueront le jeu », les élus de l'AMF attendent des moyens concrets. 

Par Franck Lemarc

« Aujourd’hui nous refusons de choisir entre soutenir la jeunesse et accompagner ceux qui ont fait la route avant eux. »  C’est avec ces mots que Jean-Christophe Combe, ministre des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes handicapées, a ouvert mardi le CNR-Bien vieillir. Il a insisté sur les « deux temporalités »  auxquelles fait face le secteur : répondre au « court terme »  (« soutenir le secteur médico-social face à l’inflation et aux difficultés de recrutement » ) ; et au « long terme », qui est « l’objet même de ce CNR » : « La mobilisation de l’ensemble de la société, le choix d’une série de mesures, petites et grandes, que nous pouvons financer et mettre en place pour réussir cette transition ». 

Trois thématiques

Les travaux du CNR s’organiseront autour de trois thématiques, comme l’explique à Maire info Pierre Martin, maire de Chauvé (Loire-Atlantique), ancien directeur d’Ehpad et référent à l’AMF sur les questions du grand âge. 

Première thématique : « Adapter la société ». « Comment adapter nos territoires, nos villes et nos transports [au vieillissement], comment concevoir des horaires d’activités municipales, des lieux pour les bancs publics, des éclairages le soir, des adaptations dans les équipements culturels et sportifs, pour que les villes soient plus habitables pour les aînés ? Comment adapter les logements ? ». Voici quelques-unes des pistes de réflexion proposées par le ministre. « Sur ces sujets, explique Pierre Martin, le ministre a insisté sur le rôle fondamental des communes et des départements. Il a expliqué que ‘’ceux qui savent sont ceux qui font’’, et qu’il compte travailler très étroitement avec les élus locaux ». Sur cette thématique, les travaux seront pilotés, notamment, par une élue locale, Florence Thibaudeau-Rainot (adjointe au maire du Havre, et co-présidente de la commission des solidarités à France Urbaine).

Deuxième thématique : « Promouvoir le lien social et la citoyenneté ». « Il s’agit, explique Pierre Martin, de trouver des pistes pour améliorer l’inclusion des personnes âgées dans la vie sociale et la démocratie locale. Il y a un gros travail à faire sur ce sujet, où les communes peuvent jouer un rôle déterminant. » 

Enfin, la dernière thématique est celle des métiers du grand âge. « Comment donner envie à des femmes et à des hommes de devenir animateur, cuisinier, auxiliaire de vie, médecin gériatre ou infirmière en pratiques avancées spécialisée en gériatrie ? Comment créer un écosystème favorable à de nouvelles actions bénévoles au service des personnes âgées ? », a demandé le ministre. 

« On touche là au cœur du problème, commente Pierre Martin. Formation, recrutement, valorisation des acquis de l’expérience, qualité de vie au travail… C’est un chantier immense, sur lequel il faut des moyens. »  Et une volonté. 

Les doutes des professionnels et des élus

C’est là que le maire de Chauvé a quelques interrogations. « Depuis la dernière grève des personnels des Ehpad, rien n’a changé, tout a empiré. »  Les mesures décidées lors du Ségur de la santé tardent à se mettre en place, voire ne le sont pas : « Les primes Ségur ne sont pas complètement versées, la prime grand âge ne l’est pas du tout, s’agace Pierre Martin. Les infirmières continuent de démissionner, et il y a même des postes de direction qui ne trouvent plus preneur. Les gens fuient ! ».

Le gouvernement a si peu fait, sur ce dossier, pendant le quinquennat précédent, qu’il risque d’avoir du mal à retrouver la confiance des acteurs du secteur. À preuve, la Fnadepa (Fédération nationale des associations de directeurs d’établissements et services pour personnes âgées) a refusé de participer au CNR Bien vieillir. « La loi Grand âge était promise depuis le premier quinquennat d’Emmanuel Macron, on l’attend toujours », rappelle le maire de Chauvé. « Tout est sur la table, tous les problèmes sont documentés et parfaitement connus, alors maintenant, l’heure n’est plus aux diagnostics ! ». 

Le ministre n’a pas dit autre chose dans son discours d’introduction : « Depuis 2018, 18 rapports et 372 propositions ont été produites sur le sujet. L’heure est à la mise en œuvre des solutions opérationnelles. » 

« Mais dans ce cas, répond Pierre Martin, pourquoi attendre six mois, c’est-à-dire le printemps prochain, comme l’a dit le ministre, pour prendre des décisions ? »  C’est en effet « en mai », après dix ateliers thématiques entre novembre et mars et trois « séminaires de restitution »  en avril, que le gouvernement rendra sa « feuille de route ». 

« Nous irons, nous participerons à tous ces ateliers, les maires joueront le jeu, soupire Pierre Martin. Mais la crise est très grave, les professionnels sont aux abois. Il faut vraiment espérer que les moyens, à la fin, seront à la hauteur des espérances, parce que croyez-moi, il ne faudrait pas créer, encore, de la déception. » 

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