Droit individuel à la formation des élus : le rapport 2021 est paru
Par Franck Lemarc
Le Code général des collectivités territoriales, dans son article consacré au fonds pour le financement du Dife (article L1621-3 du CGCT) dispose que le bilan de la gestion de ce fonds doit faire l’objet « d'une information annuelle du comité des finances locales ». Ce rapport, pour l’année 2021, a été diffusé hier.
Un rapport indispensable
Rappelons que le fonds permettant le financement du Dife est alimenté par une cotisation obligatoire prélevée sur les indemnités de fonction des élus locaux. La loi impose « l’équilibre financier » du fonds : si le Conseil national de la formation des élus constate que cet équilibre « est susceptible d’être compromis », il doit formuler des propositions pour y faire face, qui peuvent par exemple conduire à l’augmentation des cotisations ou la diminution de la valeur des droits acquis par les élus. Ces propositions, le cas échéant, ne peuvent ensuite être validées que par le gouvernement.
D’où l’importance de ce rapport annuel, qui permet de dresser un état financier du fonds Dife.
Réformes successives
Le rapport diffusé hier porte sur l’année 2021, c’est-à-dire avant la réforme des modalités de gestion des cotisations du Dife. Depuis 2022, en effet, les cotisations dues au titre du Dife sont calculées automatiquement à partir des montants d’indemnités des élus renseignés dans la DSN (Déclaration sociale nominative). Auparavant, il revenait à chaque collectivité de déclarer sur le portail internet de la Caisse des dépôts le montant des cotisations qu’elle devait payer. Autre changement intervenu en 2022 : les collectivités versent désormais les cotisations directement à la Caisse des dépôts, sans intermédiation de l’ASP (Agence de services et de paiements).
Il est à espérer que cette réforme permettra de faire diminuer les erreurs et défauts de recouvrement des cotisations, encore « trop élevé », notent les auteurs du rapport.
En 2020 et 2021, d’autres dispositions ont été prises (dont l’ordonnance du 20 janvier 2021) pour remédier à des problèmes structurels constatés dans la gestion du Dife, jusque-là « sans gouvernance véritable » : le rapport cite des cas de « fraudes, sous-traitance illégale, formations destinées à des candidats et non au mandat de l’élu », voire formation payées par les élus mais non réalisées par les organismes. Devant « les coûts exorbitants » pratiqués par certaines organismes, le gouvernement a dû prendre un décret pour plafonner ceux-ci (décret du 29 juillet 2020). Depuis ces différentes réformes, les dérives ont fortement diminué, constate la Caisse des dépôts.
Enfin, il est indiqué que l’automatisation des procédures et la mise en place du portail Mon compte élu ont permis de diminuer « drastiquement » les délais de validation des dossiers : alors qu’au premier semestre 2021 il fallait en moyenne 58 jours pour valider un dossier, ce délai est aujourd’hui passé à une trentaine de jours.
Hausse du nombre de formations
Les auteurs du rapport se livrent à l’exercice difficile de tenter de prévoir les besoins de financement à venir. Exercice difficile, parce que le dispositif du Dife est « encore jeune », a été très fortement impacté par les ruptures liées à l’épidémie de covid-19, et a connu rapidement plusieurs réformes, dont le passage du régime en heures au régime en euros au 1er août 2021.
Mais les réformes du dispositif semblent porter leurs fruits : alors que, depuis la mise en place du Dife en 2017, le fonds a toujours été déficitaire, il devrait, pour la première fois, devenir excédentaire en 2022 : selon les estimations de la Caisse des dépôts, les dépenses en 2022 devraient se situer autour de 11,2 millions d’euros, pour des recettes attendues de l’ordre de 18 millions d’euros. Ces prévisions demeurent toutefois conditionnées à plusieurs hypothèses, sur « le rythme de recouvrement des cotisations, les évolutions du coût horaire moyen et la progression des demandes de formation ».
Mais l’information la plus marquante figurant dans ce rapport est, finalement, la très forte augmentation du nombre de formations reçues par les élus à partir de 2021 : alors qu’en 2018, seulement 2 724 formations ont été prises en charge par le fonds, et 9 558 en 2020, ce nombre a bondi à 31 669 en 2021.
Cette forte montée en puissance semble montrer que de plus en plus d'élus se sont maintenant appropriés le dispositif et ont réalisé que la formation est un droit. Ce qui est d’autant plus méritoire que de nombreux bâtons leur ont été mis dans les roues pour accéder à ces formations, depuis la mise en place du portail Mon Compte élu : l’obligation de passer par internet pour s’inscrire représente une difficulté supplémentaire pour beaucoup d’élus.
La récente décision de devoir, en plus, certifier son identité via le dispositif France connect+ et donc d’obtenir, au préalable, une « identité numérique La Poste » ne fait qu’aggraver les choses (lire Maire info du 26 octobre). Hot line injoignable, procédures impossibles à mettre en œuvre y compris en bureaux de poste, la complexité et les bugs informatiques qui sont signalés à l’AMF sont tels que de nombreux élus, totalement découragés, « jettent l’éponge » ….À ce jour, le problème n’est donc plus tellement de savoir si le fonds Dife est déficitaire ou pas, mais plutôt de savoir quand et comment il sera possible d’y avoir de nouveau accès.
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