Fiscalité locale : l'ensemble des associations d'élus présente des propositions communes
L’ensemble des associations d’élus a présenté, hier, une motion commune sur la fiscalité locale dans un mouvement d’unité relativement rare. Elles y réclament la compensation intégrale et « effective » de la suppression de la taxe d’habitation, la mise en place d’une loi de finances dédiée aux collectivités ainsi que la révision « dans les meilleurs délais » des valeurs locatives des locaux d’habitation. Elles demandent, en outre, la fin des « déclarations visant à remettre en question la fiscalité économique locale ».
« Préfiguration d’une forme de coordination »
« C’est la première fois qu’une telle initiative est prise dans le domaine financier », a souligné le secrétaire général de l’AMF, Philippe Laurent, considérant cette résolution comme la « préfiguration d’une forme de coordination des associations d’élus ».
Ces signataires - Régions de France, Assemblée des départements de France, Association des maires de France, France urbaine, Villes de France, Association des maires ruraux de France, Association des petites villes de France et Assemblée des communautés de France - appellent donc le gouvernement à mettre en acte sa promesse de compenser « à l’euro près » la suppression de la taxe d’habitation.
Bien que la majorité ait renoncé à son idée de geler les bases locatives, comme le prévoyait initialement le projet de loi de finances pour 2020, le doute s’est largement instillé dans les esprits des élus quant à cette promesse. D’autant que la revalorisation de 0,9 % finalement concédée pour l’an prochain s’est faite sur la base du taux de l’indice des prix à la consommation et non sur celui de l’habituel indice des prix à la consommation harmonisé, évalué à 1,1 % par les députés en commission (lire Maire info du 10 octobre). Pour cette raison, les associations d’élus exigent que la règle prévalant actuellement ne soit donc pas modifiée.
Compensation de la TH : l’année 2017 reste un « point de désaccord »
De même, elles demandent que « les départements conservent la liberté de fixer l’impôt » (alors qu’ils sont voués à la perdre dans le schéma prévu par la réforme en cours), que ces derniers, tout comme les EPCI, ne subissent pas à compter de 2021 une « année blanche » dans l’évolution de leurs ressources fiscales mais aussi que le calcul de la compensation pour les communes soit fondé sur les derniers taux votés en 2019 et non sur ceux de 2017.
Présent à l’occasion du débat sur les finances locales, le secrétaire d’État auprès du ministre chargé de l’Action et des Comptes publics, Olivier Dussopt, a fait valoir quelques minutes plus tôt que « la loi de programmation des finances publiques votée fin 2017 disait que les valeurs locatives de 2020 et le taux de 2017 seraient pris en compte pour calculer la compensation ». Ce point reste donc un « point de désaccord », d’autant que « si l’on prend en compte les taux votés en 2018 et en 2019, les collectivités qui les ont baissés auraient une compensation inférieure à celle que l’on calculerait avec le taux de 2017 », a justifié Olivier Dussopt qui a précisé qu'« un tiers des communes qui ont fait évoluer leur taux [durant ces deux années] l'ont fait à la baisse » quand « deux tiers l'ont fait à la hausse ».
« L’impossibilité pratique de débattre correctement de réformes complexes », comme celle de la fiscalité locale, au sein d'un projet de budget générique a ainsi « démontré », selon les associations d'élus, la nécessité de mettre en place, « dès 2020 », une loi de finances dédiée aux collectivités, qu'elles appellent de nouveau de leurs vœux.
Révision des valeurs locatives : « Pas en moins de 3 ou 4 ans »
Les signataires de la motion enjoignent également le gouvernement à ne pas repousser la révision des valeurs locatives sur les locaux d’habitation. « La proposition du gouvernement de reporter [l’application de] ce dispositif aux calendes grecques, en 2026, n’est pas acceptable [...] nous demandons qu'elle soit fixée en 2022 », a indiqué le rapporteur de la commission des finances de l’AMF, Antoine Homé. « Pour agir efficacement contre les inégalités et éviter toute remise en cause d’autres impôts locaux, la révision des valeurs locatives des locaux d’habitation doit être menée dans les meilleurs délais », estiment donc les représentants des collectivités locales.
Fin de non-recevoir d’Olivier Dussopt qui a expliqué que « nous ne savons pas le faire en moins de trois ou quatre ans, y compris techniquement » : « Nous avons mis trois ans pour réviser les 3,5 millions de locaux professionnels, et, là, il y a 48 millions de locaux d’habitation… »
« Vives inquiétudes » sur les impôts de production
Dernière revendication des associations d’élus : la fin de la remise en cause des impôts de production (tels que la contribution sociale de solidarité des sociétés dite C3S, la CFE ou la CVAE). L’offensive lancée ces dernières semaines par « certaines organisations patronales » et « relayée par le gouvernement » les préoccupe particulièrement (lire Maire info du 7 novembre).
Le débat engagé sur la fiscalité économique locale « conduit à remettre en question des assiettes fiscales, telles que la valeur ajoutée qui avait été souhaitée par les entreprises lors de la suppression de la taxe professionnelle, mais surtout, il ancre l’idée fausse selon laquelle la crise de l’industrie résulterait du niveau des impôts locaux », jugent les associations d’élus qui rappellent que, « depuis la réforme de la taxe professionnelle, la fiscalité économique subit une érosion continue », « son poids dans les ressources fiscales des collectivités [étant] passé de 34 % à 19 % » au cours des vingt dernières années.
Alors que le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, a jugé que ces impôts « pénalisent nos entreprises » et milite pour les baisser dès la loi de finances pour 2021, Olivier Dussopt a tenté de rassurer les élus locaux, devant leurs « vives inquiétudes », en assurant qu’il n’est « pas envisagé par le gouvernement de supprimer les impôts économiques perçus par les collectivités territoriales », le « seul qui l’intéresse est la C3S », jugé « inefficace et contre-productif ».
A.W.
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