Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du jeudi 22 septembre 2022
Finances locales

Finances locales : ce que pourrait réserver l'année 2023

Si la fiscalité locale devrait rester « globalement dynamique » l'an prochain, l'inflation et les diverses revalorisations continueront, sans guère de doute, d'impacter les budgets des collectivités. « La fin de mandat pourrait être perturbée par des réformes financières et fiscales importantes », estime La Banque postale, dans sa dernière note de conjoncture.

Par A.W.

Après avoir retrouvé des marges de manœuvre au sortir de la crise sanitaire, après une année 2022 d'ores et déjà marquée par l’inflation et une hausse des coûts jamais vue « depuis 15 ans » , que peuvent attendre les collectivités de l’année 2023 ? 

Dans un focus consacré à cette question et intégré à sa note de conjoncture, La Banque postale a tracé quelques perspectives pour l’année 2023 et les années à venir, sur la base des éléments déjà connus. 

Inflation et revalorisations

Si le millésime 2022 est « l’année d’une inflation record »  depuis près de 40 ans (estimée à + 5,8 %), les conséquences de la hausse des prix devraient encore, sans surprise, largement perturber les budgets locaux l’an prochain. Au grand dam des collectivités puisque l’inflation est toujours attendue en progression, à hauteur de 4,7 %.

Et celle-ci serait accompagnée d’une série de revalorisations. Notamment celle « de nombreux contrats »  - que ce soit de prestations de services, d’achat d’électricité et de gaz notamment - ou « des contributions à d’autres organismes »  - tels que les établissements d’enseignement, les CCAS, les Sdis ou encore les associations - qui est regardée avec attention, mais « paraît difficilement évitable », souligne La Banque postale. 

En outre, les revalorisations du point d’indice (en juillet 2022) et du RSA (d’avril et de juillet 2022) devront être absorbées en année pleine à compter de 2023 et « impacteront les dépenses d’action sociale sans préjudice des décisions à intervenir au cours de l’année prochaine ».

Sans compter que, au regard de la flambée des prix, « une interrogation sur la revalorisation des tarifs des services publics (restauration scolaire, périscolaire, …) sera très probablement menée par les collectivités, notamment du bloc communal, pour la rentrée »  prochaine, présagent les auteurs de la note de conjoncture.

Et si des compensations de l’État ont bien été adoptées dans la loi de finances rectificative pour 2022, celles-ci restent partielles et soumises à conditions, comme c’est le cas du dispositif visant à soutenir les communes les plus fragiles afin de résister à l'inflation et au dégel du point d'indice.

Fiscalité dynamique

En parallèle, toutefois, les collectivités pourraient se consoler avec une fiscalité locale qui devrait être « globalement dynamique »  l’an prochain, et, ce, pour plusieurs raisons.

D’abord, les taxes foncières devraient bénéficier d’une « revalorisation forfaitaire des bases particulièrement élevée », celle-ci étant calculée sur l’évolution de l’indice des prix à la consommation harmonisé, qui sera connue en novembre 2022, et dont l’évolution d’août 2021 à août 2022, a atteint les 6,5 %. 

Ensuite, les impôts économiques pourraient également connaître une dynamique « à la faveur de la reprise économique de 2021 », explique la banque. Outre la CFE, la CVAE est particulièrement concernée, mais, on le sait, le gouvernement a d’ores et déjà décidé de la diminuer l’an prochain (avant sa suppression totale en 2024) et les modalités de compensation ne seront fixées qu’au terme du marathon budgétaire qui commence début octobre (le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, ayant toutefois déjà fait savoir qu’il souhaitait conserver « un lien entre l’activité économique et la rémunération des collectivités » ).

Enfin, La Banque postale s’attend à une augmentation des taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) (« qui permettraient corrélativement d’adapter ceux de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires, notamment dans les communes qui ne peuvent pas bénéficier du dispositif de majoration de cette dernière » ), mais aussi à « la poursuite de la montée en puissance de la fiscalité spécifique : Teom, versement mobilité, taxe Gemapi, pour financer les dépenses correspondantes qui ont au demeurant une vocation écologique ». 

A l’inverse, les DMTO pourraient, pour leur part, connaître « un revirement de tendance », « influencé par un marché immobilier qui pourrait ralentir localement en lien notamment avec la remontée des taux d’intérêt et le durcissement des conditions exigées pour les emprunteurs ».

Indicateurs financiers : vers une refonte du système ?

Du côté des dotations et de la péréquation, si la réforme des indicateurs financiers doit commencer à produire ses effets - après une année 2022 « neutralisée »  pour les communes et les ensembles intercommunaux, qui sera suivi d’un lissage des effets de bord jusqu’en 2028 - , il n’est « pas exclu qu’une refonte générale du système soit de nouveau imaginée sous l’impulsion des élus locaux », selon les auteurs de la note de conjoncture. En cause, les conséquences de cette réforme sur l’effort fiscal et le potentiel fiscal qui risque d’entraîner, dès 2023, « des variations de ressources assez considérables pour un nombre important de collectivités », selon les travaux réalisés par le CFL

La Banque postale publie, d’ailleurs, une carte sur les effets à terme de ces changements et sur l’évolution du potentiel financier de chaque commune à l’horizon 2028. Si les modifications apportées au calcul des potentiels fiscal et financier paraissent « globalement supportables », selon elle, celle-ci reconnaît qu’ils ne sont « pas négligeables individuellement ». En schématisant grossièrement, cette carte montre ainsi une hausse plus ou moins élevée du potentiel fiscal pour les communes situées sur les littoraux, en Bretagne, dans le Centre-Val de Loire, les Hauts-de-France et dans une partie des Alpes, tandis que les autres verraient le leur diminuer.  

Des dépenses orientées vers la transition écologique ?

Concernant les dépenses des collectivités, les auteurs de la note de conjoncture s’interrogent sur le fait de savoir si celles-ci seront à nouveau encadrées, après la suspension des contrats de Cahors et les sorties contradictoires des différents ministres sur ce sujet, et si, cette fois, elles seront « orientées vers la transition écologique ».

Malgré les propos rassurants du ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu, au début de l'été, ils rappellent que le programme de stabilité présenté, dans la foulée, par Bruno Le Maire « réactive »  la contribution des collectivités locales à l’effort de redressement des comptes publics, Bercy ayant défendu une « modération »  de leurs dépenses de fonctionnement de 0,5 % en moyenne chaque année. Dans un tel scénario, expliquent-ils, « les dépenses courantes continueraient donc à progresser, de l’ordre de 24 milliards d’euros en cinq ans selon les estimations de la direction générale du Trésor ». 

La Banque postale note, enfin, l’annonce d’un « fonds vert »  doté de 1,5 milliard d’euros et destiné aux collectivités locales afin de les aider à lutter contre les événements climatiques, mais dont les modalités de financement et d’utilisation restent encore largement évasives. « Ce fonds semble s’inscrire dans la tendance des crédits octroyés par l’État aux collectivités locales, à savoir le financement de projets approuvés par l’État avec pour objectif la transition écologique », souligne-t-elle.

Télécharger la note de conjoncture.
 

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