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Édition du mercredi 12 juin 2024
Finances locales

Finances locales : André Laignel prévient de « signaux d'alerte forts » dans un contexte « d'incertitudes »Â 

Dans son pré-rapport, le président de l'Observatoire des finances et de la gestion publique locales constate une situation financière « contrastée » en 2023 pour les collectivités, alors que le pays entre dans « une zone de turbulences ».

Par A.W.

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© A. Février

Alors que l’année 2023 a laissé apparaître des « signaux d'alerte forts », c’est une « zone de turbulences »  emplie « d’incertitudes »  qui s’annonce pour l’année 2024. C’est ce que constate le président du Comité des finances locales (CFL) et de l’Observatoire des finances et de la gestion publique locales (OFGL), André Laignel, à l’occasion de la présentation, hier, de son pré-rapport sur la situation des finances des collectivités en 2023.

Mais, au-delà du bilan financier de l’année passée, c’est le contexte politique du moment qui a fait irruption lors de cette présentation. 

L’année 2024 dans une « zone de turbulences » 

Le président du CFL a notamment pointé les « incertitudes »  qui menacent la fin de l’année 2024, notamment sur le plan des finances locales. Alors qu’une « grande part des recettes des collectivités est aujourd’hui indexée sur la TVA », André Laignel redoute les éventuelles conséquences du « maelström actuel » : « Si le pays est en panne pendant six mois, je laisse imaginer ce que cela peut donner ».

Bien qu’il n’ait « pas le sentiment qu’il y ait actuellement une baisse rapide des dépenses »  en cette année 2024 – contrairement aux recettes qui « vont évoluer moins vite »  – , il s’inquiète de la « zone de turbulences »  actuelle qui « risque de conduire beaucoup de collectivités à suspendre des investissements », alors que ces dépenses (d'investissement) étaient encore en hausse de 6,7 % en 2023, dont près de 9 % pour le bloc communal. Une hausse, toutefois, due à « 80 % à l’inflation », selon André Laignel qui rappelle que l'ensemble des collectivités sont « obligées»  de puiser dans leur trésorerie, celle-ci ayant notamment plongé en 2023 de 27 % et 43 % pour les départements et les régions. « Des pourcentages rarement vus dans les cycles précédents », alerte-t-il.

Situation « contrastée »  en 2023

Reste que, pour l’année 2023, le président de l’OFGL a pu observer, dans son pré-rapport, « une situation contrastée »  pour les finances locales entre les différentes catégories de collectivités, mais aussi « au sein de chacune des collectivités ».

« Une situation encore impactée par l’inflation et les conséquences des trois ou quatre années de crise que nous avons derrière nous », souligne-t-il. Et malgré une « bonne gestion globale des collectivités », il perçoit des « signaux d’alerte forts ». 

En premier lieu, il pointe la dégradation « considérable »  du solde de l’ensemble des administrations publiques locales (Apul), celui-ci étant passé de + 4,8 milliards d’euros en 2022 à - 4 milliards d’euros en 2023, après plusieurs années excédentaires. Un besoin de financement « du même ordre de grandeur que celui connu en 2014 », rappellent d’ailleurs les auteurs du rapport, qui notent que « tous les types de collectivités sont en situation de besoin de financement, faible pour le bloc communal (- 0,2 milliard d’euros) et plus important pour les départements (- 2,1 milliards d’euros) et les régions (- 1,7 milliard d’euros) ».

Epargne brute en hausse pour les communes

Parmi ces « signaux d’alerte », le maire d’Issoudun pointe également la « baisse sensible »  (- 9 %) de l’épargne brute (différence entre les recettes et les dépenses de fonctionnement) pour la plupart des collectivités.

Une baisse portée par les régions (- 5,9 %), mais surtout par les départements qui voit la leur « s’écrouler »  (- 39,6 %), victimes de la baisse importante des DMTO (-21,8 %). À l’inverse le bloc communal profite d’une hausse de son épargne brute de près de 8 %.

Les communes ont, pour leur part, connu une hausse moyenne de 9 % de leur épargne brute qui s’accompagne de « rythmes nettement différenciés selon la taille de la commune ». Ainsi, « l’épargne brute est en hausse surtout pour les communes moyennes, celles de 10 000 à 20 000 habitants avec + 8,3 % et de 20 à 50 000 habitants avec +12 %. Pour les communes de plus de 100 000 habitants, la croissance de l’épargne brute est de + 23 %, mais hors Paris, elle n’est plus que de + 9,6 % ».

Une tendance qui s’explique par le fait que le rythme de progression des dépenses de fonctionnement des communes a été inférieur (+ 4,9 %) à celui de leurs recettes (+ 5,6 %). 

Des augmentations qui concernent l’ensemble des strates de taille de communes, avec néanmoins « quelques disparités ». Ainsi, « la progression des dépenses de fonctionnement est à peu près similaire pour les strates inférieures à 10 000 habitants (globalement entre + 5,5 % et + 6,5 %), mais est inférieure de près d’un point de pourcentage pour les communes de plus de 10 000 habitants (entre + 4,1 % et + 4,8 %) », observent les auteurs du rapport, qui soulignent que « l’évolution des recettes est plus homogène entre les strates (la plus basse étant toutefois pour les communes de 50 000 à 10 000 habitants avec + 4,3 %) ». 

Dépenses « maîtrisées » 

Sur l’ensemble des collectivités, c’est l’inverse : le rythme de progression des dépenses (+ 5,8 %) – dans un contexte de « forte inflation »  avec un panier du maire en hausse de 6 % – a été supérieur à celui des recettes (+ 3,3 %).

Des dépenses principalement touchées, selon le président du CFL, par les augmentations de frais de personnels avec l’augmentation du point d’indice pour l’essentiel (+ 4,7 %), d’achats et charges externes (+ 9,6 %) - dont l’essentiel est porté par l’énergie et l’électricité (en progression de plus de 29 %) - et de charges financières liées à la hausse des taux (+ 29,4 %).

« Quand on prend ces trois paramètres, qui s’imposent à nous, ils ne viennent pas démontrer que nous sommes dépensiers », se félicite André Laignel qui assure que « les dépenses de fonctionnement sont maîtrisées contrairement à ce que dit le président de la République qui expliquait récemment que le dérapage des finances publiques, c’était uniquement les collectivités territoriales ».

Consulter le pré-rapport.
 

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