Édition du lundi 3 novembre 2008
Emprunts: le ministère de l'Intérieur envisage d'obliger les collectivités à établir un rapport régulier sur leurs éventuels produits dits «structurés», pour les obliger «à être plus transparentes»
Emprunts à risques: les réseaux bancaires et les associations délus se sont engagés à élaborer sous légide des pouvoirs publics une «Charte de bonne conduite»
Les ministres de l'Intérieur et de l'Économie, Michèle Alliot-Marie et Christine Lagarde, ont réuni ce lundi matin les associations d'élus locaux et les principaux réseaux bancaires actifs dans le financement des collectivités territoriales (1) pour parler des conséquences des emprunts par certaines collectivités locales sous forme de produits dits «structurés risqués», ces emprunts dont le taux évolue selon une formule complexe.
Cette réunion a permis, selon un communiqué des ministres diffusé en fin de matinée, de «dresser un diagnostic concernant lexposition des collectivités territoriales aux produits structurés risqués.» Toujours selon ce communiqué, «les représentants des banques et des collectivités territoriales ont indiqué que les produits structurés risqués représentaient en moyenne une faible part de lendettement des collectivités territoriales». Michèle Alliot-Marie et Christine Lagarde ont pour leur part «constaté que cet endettement structuré ne présentait pas un risque systémique pour ces collectivités. Les difficultés sont donc concentrées sur un nombre limité de collectivités».
Selon le "Le Figaro" (3/11), peu de données chiffrées existent sur cette question. Lune des seules évaluations viendrait de l'agence de notation Fitch: les collectivités locales, dont la dette totale est de 126 milliards d'euros, détiendraient de 20 à 25 milliards de produits structurés. Pour sa part, interrogée par le quotidien, la société de conseil Finance Active estime que «seule la moitié serait des prêts à risque, dont les taux pourraient s'emballer. Ce manque de précision serait dû à la faiblesse de l'information comptable: les collectivités ne passent pas de provisions en cas de risque sur ces produits et ne détaillent pas dans leur comptabilité les formules de calcul des taux.»
Ce matin, afin de «parvenir à un règlement ordonné des difficultés actuelles», les ministres ont proposé aux réseaux bancaires de «rechercher au cas par cas des solutions individualisées avec les collectivités territoriales qui connaissent des difficultés dans la gestion de produits structurés risqués quelles ont souscrits.» Pour permettre à lEtat dassurer le suivi de cet engagement, «qu'ils ont accepté», dit le communiqué, les réseaux bancaires se sont engagés à «informer lEtat sur la mise en uvre de cette procédure dici la fin de lannée.»
Parallèlement, afin de «prévenir lapparition de difficultés comparables dans lavenir», les participants à la réunion se sont entendus sur les mesures proposées par le gouvernement:
«- Les réseaux bancaires et les associations délus se sont engagés à élaborer sous légide des pouvoirs publics un code de bonne conduite qui permettra de consigner les meilleures pratiques des réseaux bancaires et des collectivités en vue dassurer un financement adapté.
- Cette charte participera pour les collectivités territoriales à une meilleure évaluation et une plus grande responsabilité sur les risques quelles assument de prendre. Pour les banques, elle permettra de calibrer loffre à la situation et aux missions de la collectivité et à ses capacités dexpertise.»
Eric Gissler, inspecteur général des finances, est chargé de «travailler avec les associations délus et les réseaux bancaires pour proposer une charte dici la fin de lannée.»
Par ailleurs, Michèle Alliot-Marie a proposé de «renforcer linformation des assemblées délibérantes des collectivités territoriales sur lexposition aux produits structurés risqués.» Elle a également demandé qu'un «rapport annuel des services de lEtat présente la situation globale des collectivités territoriales sagissant des produits structurés.»
Il ny aurait donc pas dinterdiction formelle pour les collectivités locales de recourir aux «emprunts structurés risqués» - qui avaient été autorisés par Dominique Strauss-Khan, alors ministre de l'Economie du gouvernement Jospin.
Toujours selon "Le Figaro", ladministration est, elle, directement mise en cause par certains élus. «Claude Bartolone, le président (PS) du conseil général de Seine-Saint-Denis, a mis en cause le manque de vigilance de la Direction générale des collectivités locales du ministère de lIntérieur», précise le quotidien.
Quant à Claudy Lebreton, président de l'Assemblée des départements de France (ADF), lui aussi interrogé par le quotidien, il estime que «l'administration aurait dû alerter les collectivités sur les dangers des produits structurés». Il ajoute que «la Caisse des dépôts (CDC) pourrait intervenir dans les renégociations des prêts toxiques lorsque les collectivités le demandent». Quant au ministère de lIntérieur, il réfute ces accusations, en soulignant que «l'État n'a pas le droit de s'immiscer dans la gestion des régions, départements et communes».
Sur ce point, Philippe Laurent, président de la commission des finances de l'AMF et maire (DVD) de Sceaux, a expliqué au "Figaro" que lassociation ne veut pas que «les quelques dérapages sur les produits structurés conduisent à mettre en place des réglementations excessives. Nous tenons à notre libre administration».
(1) Association des maires de France, Assemblée des départements de France, Association des régions de France, Association des grandes villes de France, Fédération des maires des villes moyennes, Association des petites villes de France, Assemblée des communautés de France, Dexia, Caisses d'épargne, Crédit agricole, Société générale.
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