Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du lundi 10 janvier 2022
Aménagement numérique du territoire

Fibre optique : un arrêté facilite le raccordement aérien

Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, et Cédric O, secrétaire d'État chargé de la Transition numérique et des communications électroniques, ont pris par arrêté une mesure qui simplifie l'utilisation des poteaux électriques pour le raccordement des particuliers à la fibre optique.

Par Lucile Bonnin

Encourager la mutualisation et accélérer le déploiement de la fibre : tel est l’objectif de ce nouvel arrêté publié le 29 décembre 2021. Ce texte vise à « faciliter la mutualisation avec les poteaux d’Enedis, en exonérant de calcul de charge pour les pylônes du réseau électrique basse tension n’accueillant pas [déjà] de desserte optique ».

Cette facilitation d’accès aux infrastructures électriques était très attendue par les acteurs publics et privés impliqués dans l’aménagement numérique du territoire. Pour l’Association des Villes et Collectivités pour les Communications électroniques et l'Audiovisuel (Avicca), cette décision est une « bonne nouvelle pour les collectivités, les opérateurs et surtout pour les particuliers. »  Côté Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), on espère qu’avec cet arrêté les branchements puissent « se faire plus rapidement et efficacement chez les particuliers. » 

Une mesure de simplification

Concrètement, ce texte simplifie considérablement les modalités d’accès aux ouvrages basse tension du réseau Enedis pour réaliser des raccordements FttH sans passer par la case calcul de charge, initialement obligatoire et contraignante. 

« Les opérateurs pourront plus facilement déployer la fibre et s’exempter d’une étape qui était assez lourde pour des petits câbles optiques qui ne sont pas de nature à rendre obligatoires des études de calcul de charge pour ces poteaux » , explique à Maire info Mireille Bonnin, conseillère technique au département numérique de la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR).

Ariel Turpin, délégué général à l’Avicca,  rappelle qu’il existe deux cas en matière de supports aériens pour la fibre: les appuis énergie et les poteaux téléphoniques. « L’arrêté traite uniquement des aériens dits Enedis, donc des aériens énergie, et concerne uniquement la partie du raccordement que l’on appelle D3, qui correspond au raccordement entre les boîtiers et le client. » 

Avant décembre 2021, les règles définies par un arrêté imposaient le calcul de charge pour chacun des poteaux. S’il était trop élevé, il fallait rajouter un poteau pour ce raccordement. Le problème avec cette règle, explique Ariel Turpin, c’est que « pour raccorder les gens cela représente un travail et un coût délirants qui auraient fait que personne n’aurait voulu raccorder les particuliers avec les poteaux Enedis. » 

Il indique par ailleurs qu’il est « incompréhensible pour les particuliers ou les maires de voir l’opérateur rajouter un poteau juste pour raccorder les particuliers. C’est cela que l’arrêté vient de faire sauter. Cela met fin à une absurdité et vient aussi mettre un terme à des pratiques illégales. » 

Pas de solution miracle 

Ces simplifications ont pu être accordées car ces câbles de raccordements, particulièrement légers, « limitent très nettement le risque de surcharge et la mise en péril des infrastructures électriques » , comme le résume Mireille Bonnin.

« Ce n’est pas une solution miracle, nuance t-elle. Il y a des simplifications et des cas d’exemptions de calcul de charge pour le raccordement mais il y a des exceptions. Il y aura certains cas de figure où l’opérateur sera obligé de procéder à des calculs de charge et ces derniers seront cités dans la mise à jour de la Convention d’appuis communs. Pour quelques câbles de raccordements il n’y en aura pas besoin mais s’il y en a un peu plus, c’est un peu moins vrai. » En théorie, selon l'arrêté, ce sont désormais uniquement les poteaux destinés à accueillir plusieurs câbles optiques qui sont soumis à un calcul de charge.

Vers la fin des poteaux en doublon 

Le texte a été promulgué dans un souci d’accélération du déploiement de la fibre, mais aussi dans le but d’optimiser les infrastructures sur le territoire. Ne plus passer par des études de calcul de charge systématiquement peut en effet limiter l’implantation de poteaux à proximité de ceux déjà existants.

Mireille Bonnin observe sur ce sujet que « les élus locaux s’émeuvent souvent de la présence de poteaux en doublon. Avec l’arrêté, il y a fort à parier qu’il n’y aura plus ce souci de poteaux en doublon pour faciliter le raccordement des abonnés. »  Cependant, elle précise pour autant que « ceux qui sont installés ne seront pas enlevés de sitôt. » 

Cette décision met fin à l’absurdité des poteaux en doublon et représente aussi « une économie de plusieurs centaines de millions d’euros pour tous les secteurs » , indique Ariel Turpin. En matière de gouvernance, ce sont les opérateurs chargés du déploiement qui prennent la décision financière et logistique d’installer un réseau fibre sur un poteau existant Enedis. « Si les opérateurs avaient dû faire des études de calcul, cela aurait représenté plus d’un milliard d’euros de dépenses à l’échelle nationale » , précise Ariel Turpin. 

Des raccordements facilités mais pas d’impact sur la qualité 

Le texte doit avoir un effet boule de neige sur les conditions et les délais de raccordement pour tous les foyers, aussi bien en zone rurale qu’urbaine. Comme le précise Ariel Turpin, « cette décision met au même niveau les particuliers quelle que soit la nature ou l’endroit où est positionné son point de branchement optique. » 

Néanmoins, aucun impact positif sur la qualité des raccordements n’est à prévoir. « Ça reste une purge, c’est même de pire en pire, confie le délégué de l’Avicca. Les opérateurs (qui font appel à des sous-traitants) feront un aussi mauvais boulot sur les aériens Enedis qu’en support aérien téléphonique ou en souterrain. » 

Mireille Bonnin voit pourtant dans cet arrêté une volonté d’être pragmatique face à « cette phase de massification de la commercialisation. Le travail ne va pas être simplifié pour les techniciens qui ont des niveaux de formation assez faibles mais cet allègement s’adapte à leurs pratiques »  pour, au final, réussir à raccorder au mieux tous les citoyens, de manière efficace.

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