Plan loup 2024-2029 : quelques avancées mais toujours autant de mécontentements
Par Lucile Bonnin
Augmentation du taux de prélèvement, réforme du comptage, simplification du protocole de tirs… Le plan national d’actions pour 2024-2029 comporte 42 nouvelles mesures qui ont été dévoilées par le gouvernement hier. Ce dernier doit être adopté d’ici la fin de l’année après une consultation publique.
L'Office français de la biodiversité (OFB) estime à 906 le nombre de loups à la sortie de cet hiver 2023. Néanmoins, leur présence est très difficile à détecter et de nombreuses associations notamment agricoles estiment que ce chiffre est sous-évalué. Depuis la réintroduction du loup en France il y a plus de trente ans maintenant, la question est extrêmement tendue et chaque année, à l’occasion du Congrès des maires, les élus alertent sur les dangers que peuvent représenter les loups pour la faune sauvage ou les animaux d’élevage.
Le plan qui a été présenté lundi par la préfecture de la région Auvergne-Rhône-Alpes aux membres du Groupe national loup (GNL) veut établir un « meilleur équilibre » et poser « les bases d’un rééquilibrage de la politique de conservation du loup en faveur de l’élevage et du pastoralisme ». Selon l’AFP, sa présentation s’est déroulée à huis-clos « dans un climat tendu » et le gouvernement n’a apparemment réussi à satisfaire ni les défenseurs des loups, ni les éleveurs. À noter que le plan précédent (2018-2023) était aussi loin de faire l’unanimité (lire Maire info du 20 février 2018).
Statut du loup
Parmi les grandes mesures qui ont été dévoilées sur X (Twitter) par Marc Fesneau, ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, il y a notamment la volonté d’étudier le changement de statut du loup pour le faire passer d’espèce extrêmement protégée à espèce protégée. Ce déclassement a fait réagir de nombreuses associations pour la sauvegarde des loups qui ont même quitté la réunion avant la fin. Selon Libération, certaines ont même annoncé leur retrait définitif du Groupe national loup.
Un rapport sénatorial réalisé en 2018 expliquait cependant que ce déclassement « permettrait une gestion démographique plus souple » et qu’elle est « plus que jamais nécessaire ». « L'Europe ne tient pas suffisamment compte des spécificités locales et en l'occurrence de la situation de prédation en France » , indiquait alors le sénateur Cyril Pellevat, ajoutant que « le loup n'est aujourd'hui plus une espèce menacée, c'est le pastoralisme qui l'est ».
Des mesures pour les territoires prédatés
Il a été annoncé une amplification de la recherche sur les moyens de protection des troupeaux notamment pour répondre aux enjeux des nouveaux territoires prédatés avec un budget spécifique de 2,5 millions d’euros sur 5 ans. En effet, le loup gagne du terrain d’année en année. Les territoires traditionnels du loup sont les Alpes, le Massif central, les Pyrénées-Orientales et l'Est de la France. Or désormais on en retrouve aussi en Nouvelle-Aquitaine, Normandie et en Bretagne. D’ailleurs, le gouvernement compte réformer le comptage des loups en s’alignant sur la manière de faire des autres pays européens notamment en comptant par meute.
Ces nouveaux territoires qui doivent faire face à l’arrivée du loup vont être davantage pris en compte puisque ce sont des territoires non alpins et que cela nécessite une adaptation de la protection qui passera par l’étude de la non-protégeabilité de certaines zones ou certains types d’élevages comme le bovins et les équins.
Pastoralisme
Le pastoralisme est le point sensible qui préoccupe le plus les maires. Les conséquences du retour du loup peuvent être lourdes dans certaines zones notamment pour les activités agropastorales qui déclarent des pertes financières directes importantes mais aussi, comme le souligne le rapport du Sénat, des « pertes indirectes » comme « le stress des animaux avant et après les attaques [qui] entraîne des difficultés dans la reproduction et des pertes d'exploitation ».
Sur ce sujet, le gouvernement a annoncé plusieurs mesures : extension du dispositif des bergers mobiles pour aider les éleveurs face aux loups, meilleure prise en compte des dommages indirects subis par les éleveurs du fait des attaques et indemnisation sous 125 jours maximum après constat... Surtout, les protocoles de tirs vont être simplifiés, mais le quota de loups pouvant être abattus restera fixé à 19 % de leur population. « On va autoriser qu'il y ait deux tireurs, ce qui permettra plus d'efficacité, et on va autoriser la généralisation des lunettes de visée nocturne » , a également indiqué le ministre sur TF1.
Pour les fédérations agricoles, cette « copie » est « à retravailler de fond en comble ». Ils regrettent notamment que « l’octroi d’avances aux agriculteurs obligés d’investir dans des moyens de protection coûteux demeure toujours impossible ». Pour la sénatrice des Alpes-Maritimes, Dominique Estrosi-Sassone, ce « plan loup rate sa cible » : « Aucune anticipation de la protection des troupeaux, des moyens financiers pas à la hauteur des enjeux et quelques évolutions à la marge », « le pastoralisme mérite mieux que ça ! » , conclut-elle. Pour d’autres, ce sont les loups qui ne sont pas assez protégés. Sur cette question épineuse où s’affrontent depuis bien longtemps les défenseurs des loups et les éleveurs, il reste en effet difficile pour le gouvernement de trouver un consensus.
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