Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du jeudi 18 novembre 2021
Vie publique

Encadrement du lobbying : les propositions de la HATVP visant les collectivités

La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) réalise un bilan du dispositif d'encadrement des lobbies et formule quatre propositions d'amélioration en vue de son extension au 1er juillet 2022 aux collectivités locales.

Par Aurélien Wälti

Rehaussement des seuils de population des collectivités, simplification de la liste des personnes publiques, possibilité de restreindre les décisions publiques concernées… La Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) a publié un rapport, hier, dans lequel elle présente un premier bilan du dispositif d’encadrement du lobbying et soutient plusieurs propositions sur l’extension prochaine du répertoire aux collectivités territoriales. 

L’objectif est de rendre le dispositif d’encadrement de la représentation d’intérêts « plus pertinent et adapté à l’échelon local ».

Dispositif « trop complexe » 

Si le dispositif comporte des « avancées notables »  et ouvre des « perspectives prometteuses », il est encore constitué de failles, selon les auteurs du rapport. Son cadre législatif et réglementaire est ainsi jugé « trop complexe », notamment pour les représentants d’intérêts eux-mêmes.

Selon la HATVP, une évolution du dispositif apparaît ainsi indispensable pour « assurer sa pérennité et son efficacité », notamment dans le cadre de son extension aux collectivités territoriales prévue pour l’été prochain. « Une évolution d’une telle ampleur ne peut se réaliser à droit constant sans le mettre durablement en péril ». En effet, « les difficultés juridiques inhérentes au répertoire seront également appliquées à l’échelon local et les spécificités de l’action publique territoriale seront de nature à accroître largement les difficultés identifiées ». 

La Haute Autorité formule ainsi quatre propositions d’évolutions. À l’occasion de la présentation, en juin, de son rapport d’activité 2020, le président de l’institution, Didier Migaud, avait d’ailleurs assuré ressentir « une approche positive au niveau des élus car ils sont eux-mêmes très sollicités par des représentants d'intérêts, notamment dans des secteurs comme la politique de la gestion de l’eau, des transports, tout ce qui touche au BTP… pour lesquels il peut y avoir des actions pressantes ».

Seuils de population relevés à 100 000 habitants 

Pour pallier les failles du dispositif, la HATVP préconise, d'abord, un rehaussement des seuils de population des communes et EPCI à 100 000 habitants au lieu de 20 000 habitants comme fixé actuellement. Seuls 42 communes et 127 EPCI seraient ainsi concernés, contre 468 communes et 1011 EPCI avec les règles actuelles. « En revanche, par souci de simplification, ce seuil de 100 000 habitants gagnerait à être unique, sans modulation pour l’application aux adjoints au maire, aux vice-présidents de l’EPCI bénéficiaires d’une délégation de fonction ou de signature ou encore aux directeurs généraux des services. Dans un même objectif, le seuil du montant des recettes budgétaires retenu actuellement pour les EPCI serait supprimé », recommande la HATVP.

Cette mesure serait couplée à une expérimentation, pour cinq ans, de l’application du dispositif aux communes et EPCI à fiscalité propre de taille inférieure au seuil de 100 000 habitants (« d’une part entre 20 000 et 50 000 habitants, et d’autre part entre 50 000 et 100 000 habitants » ), afin d'évaluer la diversité des situations locales.

Les auteurs du rapport préconisent également de simplifier la liste des personnes publiques concernées en la restreignant aux responsables et agents publics « susceptibles d’être visés par des actions de représentation d’intérêts »  (la liste actuelle vise les responsables et agents publics assujettis à une obligation de déclaration de patrimoine). Cette réécriture « énonce directement et explicitement les collectivités territoriales et EPCI concernés (communes et EPCI à fiscalité propre au-dessus du seuil de 100 000 habitants, départements, régions et collectivités à statut particulier) en y ajoutant les groupements de collectivités territoriales dont au moins une de ces collectivités ou un de ces EPCI est membre ». Elle énumère également les fonctions exécutives et délibérantes concernées.

Enfin, la HATVP souhaite « pouvoir limiter les actions à déclarer à l’échelle locale »  en « prévoyant que l’obligation de déclaration ne s’impose qu’à certaines décisions publiques locales »  (il pourrait ainsi être envisagé de prendre en considération les seules décisions qui présentent un caractère normatif) et en « levant les incertitudes juridiques actuelles ».

En 2022, 8 000 responsables supplémentaires concernés

Pour rappel, la loi Sapin II de 2016 (relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique) a prévu que les représentants d'intérêts s’inscrivent à un répertoire numérique géré par la HATVP pour rencontrer les ministres et leur cabinet, les parlementaires et leurs collaborateurs, certains hauts fonctionnaires, sous peine de sanction pénale. L'objectif est de mesurer l'empreinte des lobbies sur la loi et les normes. Ce sont ainsi près de 2 400 entités qui sont ainsi désormais inscrites sur le répertoire et près de 40 000 activités de lobbying qui ont été déclarées.

Après deux reports successifs, le répertoire doit être étendu, le 1er juillet 2022, aux actions auprès des maires, des présidents d'intercommunalités et notamment des directeurs de services dans les collectivités de plus de 20 000 habitants. Le nombre de responsables concernés passera alors de 11 000 à 19 000 et sera l’un des « plus étendus au monde ».

Initialement prévue au 1er juillet 2018, l'extension du répertoire a été reportée afin de répondre à plusieurs risques : « Une lisibilité moindre des informations déclarées sur le registre, des obligations parfois disproportionnées qui pèseront sur certaines entités, des moyens humains et financiers à l’heure actuelle insuffisants pour permettre à la Haute Autorité de réaliser des contrôles effectifs ».
 

Télécharger le rapport.

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