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Édition du vendredi 28 mai 2021
Emploi

Un décret permet aux Missions locales d'intégrer davantage de jeunes dans le dispositif Garantie jeunes

Un décret paru ce matin modifie les règles qui régissent la Garantie jeunes. Il donne notamment davantage de souplesse aux Missions locales et leur permettra de suivre davantage de jeunes. Des dispositions bienvenues, dans une période où la précarité des jeunes se développe, mais qui ne résolvent pas un certain nombre de problèmes de fond.

Par Franck Lemarc

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© Défi métier

La Garantie jeunes est un dispositif mis en place depuis 2013, généralisé en 2016. Il vise à accompagner de façon intensive, pendant un an, dans les Missions locales, les jeunes de 16 à 25 ans correspondant à ce que l’on appelle aujourd’hui les « Neet », acronyme anglais qui se traduit en français par « ni en emploi, ni en études ni en stage ». Les jeunes accompagnés bénéficient d’une allocation d’un peu moins de 500 euros par mois. Financé en grande partie par l’État, ce dispositif, dans un récent rapport de la Dares, a été jugé « efficace », et le gouvernement entend maintenant l’étendre à un plus grand nombre de jeunes (en visant un doublement des bénéficiaires), voire à en faire « un droit ». En janvier dernier, la ministre du Travail, Élisabeth Borne, s’est dite favorable à « une Garantie jeunes universelle »  plutôt qu’un RSA jeunes. 

De nouvelles souplesses

Le décret paru ce matin donne aux Missions locales un certain nombre de souplesses. D’abord, la durée du parcours en Garantie jeunes, initialement fixé à douze mois, sera maintenant modulable (de neuf à douze mois). Deuxièmement, les Missions locales sont désormais autorisées à prolonger le parcours (jusqu’à 18 mois) sans être obligées d’obtenir une autorisation de la commission locale, dirigée par le préfet. 
Par ailleurs, suivant en cela les recommandations du rapport de la Dares, qui estimait qu’il fallait supprimer les conditions de ressources pour ne pas exclure les jeunes occupant un « emploi alimentaire »  faiblement rémunéré, le décret permet aux Missions locales d’admettre dans le parcours Garantie jeunes, « à titre dérogatoire », des jeunes dont les ressources dépassent le plafond initialement prévu par décret (497,50 €). Les revenus ne devront toutefois pas être supérieurs de plus de 30 % à ce plafond (soit un revenu mensuel d’environ 650 euros). Cette disposition était déjà possible mais uniquement sur décision de la commission locale. Enfin, un élargissement plus ambitieux encore est prévu par le décret, puisqu’il permet, cette fois sur décision de la commission locale et non de la seule Mission locale, d’admettre des jeunes dont les revenus dépassent le plafond jusqu’à 100 % (soit environ 1000 euros par mois). 

Locaux et conseillers

Pour Mohamed Gnabaly, maire de l’Île-Saint-Denis (93) et co-président avec Marie-Claude Jarrot du groupe de travail Emploi et insertion de l’AMF, ces dispositions sont « bienvenues ». « Nous faisons face à de grandes difficultés depuis le début de la crise sanitaire, entre les jeunes qui sont sortis des études et les jeunes demandeurs d’emploi, la situation est très inquiétante. Il y a une volonté du gouvernement de largement monter en puissance sur la Garantie jeunes, et c’est évidemment une bonne chose. Le décret donne des souplesses aux Missions locales et permettra à davantage de jeunes de rentrer dans le dispositif. » 
Reste que ce décret ne résoudra pas tous les problèmes. « Nous sommes confrontés à deux problèmes, détaille Mohamed Gnabaly. Celui des locaux, et celui du nombre de conseillers. »  Plus de jeunes accompagnés, cela signifie en effet des locaux plus grands pour les Missions locales, pour les réunions collectives, ce qui pose de réelles difficultés dans certaines communes – et davantage encore en ce moment avec les règles de distanciation. Par ailleurs, l’accompagnement des jeunes étant personnalisé, « il faut embaucher des conseillers, et nous avons beaucoup de mal à recruter ». Le maire de l’Île-Saint-Denis vient d’ailleurs de poser le problème à la préfète déléguée à l’égalité des chances de son département, qui lui a indiqué que ce problème de tension sur les recrutements se posait à l’échelle nationale.

Financements « pluriannuels » 

Ce qui amène tout naturellement à la question du financement de ce dispositif. Certes, le gouvernement a mis la main à la poche pour essayer d’atteindre l’objectif des 200 000 jeunes en Garantie jeunes cette année : aux 371 millions d’euros alloués aux Missions locales dans la loi de finances, il a été ajouté 100 millions au titre du plan « un jeune une solution », et encore 140 millions supplémentaires en février dernier. Mais qu’en sera-t-il l’année prochaine ? Et l’année suivante ? Mohamed Gnabaly insiste sur le fait que la politique de l’emploi des jeunes doit être « structurelle et non conjoncturelle »  et que les Missions locales, comme les élus, ont besoin de « visibilité »  – alors qu’aujourd’hui, « on a des dispositifs qui changent tous les deux ou trois ans ». 
L’AMF, tout comme l’Union nationale des Missions locales (UNML), réclame donc des « financements pluriannuels », afin de « répondre aux objectifs d’autonomie financière du réseau des Missions locales », comme Mohamed Gnabaly l’a défendu, la semaine dernière, devant la mission Travail et emploi de la commission des finances du Sénat. 

Télécharger le décret. 

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