Difficultés de recrutement : des secteurs plus touchés que d'autres
Par Coline Daclin - AFP
Il y a « 70 000 emplois non pourvus dans l’industrie », a assuré le ministre Roland Lescure devant le patronat fin août. Marqué par la vague de fermetures d’entreprises des années 1980, le secteur connaît des tensions depuis plusieurs années, qui se sont accentuées avec la crise sanitaire.
La métallurgie souffre particulièrement: chaudronniers, tôliers et soudeurs font partie des 10 métiers où recruter est le plus difficile en 2022, selon l’enquête Besoins en main-d’œuvre de Pôle Emploi, publiée en avril.
La situation s’explique « en partie par l’inadéquation entre l’offre et la demande » de salariés, explique David Derré, directeur emploi-formation à l’UIMM, syndicat patronal du secteur qui entend mettre en avant « la question de la souveraineté stratégique » que revêt ce secteur pour attirer des candidats.
La construction
En juillet, 61 % des entreprises du bâtiment déclaraient avoir des difficultés de recrutement, selon un point de conjoncture de la Banque de France publié en août. En tête des postes les plus compliqués à pourvoir, selon Pôle Emploi: les couvreurs. Dans le top 10 également, les menuisiers et ouvriers de l’agencement.
« On pourrait faire bien mieux (accepter plus de chantiers, etc.) si on était en capacité de recruter plus facilement », a déclaré Jean-Christophe Repon, président de la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) en conférence de presse mardi.
Les transports
Cars scolaires, transports en commun, trains et même l’aérien: aucun secteur du transport de voyageurs n’échappe à la pénurie de salariés, avec en conséquence un service détérioré pour les usagers. Selon la Banque de France, 78 % des entreprises du secteur signalaient en juillet des difficultés à recruter.
Raison principale de ce désamour: des conditions de travail et des salaires qui n’attirent pas. « Il faut travailler les week-ends, le soir, les jours fériés. Les vacances en juillet-août, il faut les oublier, surtout au début », détaille Didier Mathis, secrétaire général de l’Unsa-Ferroviaire.
Pour pallier le manque de personnel, les entreprises de l’aérien cherchent à recruter dès maintenant pour la saison prochaine. La RATP offre même 300 euros de prime à chaque agent proposant un candidat finalement retenu. Et Keolis déploie un « Bus pour l’Emploi itinérant » avec un simulateur de conduite pour chercher des candidats potentiels.
Ingénieurs, conseil et numérique
Les entreprises manquent aussi d’ingénieurs et de consultants, en raison d’une « pénurie des talents » et d’une « forte concurrence des entreprises sur certains profils », selon la fédération Syntec, qui regroupe des syndicats dans ces métiers. Depuis la crise sanitaire, la fédération note une aspiration « à travailler autrement », de nombreux cadres demandant par exemple une semaine de quatre jours ou plus de télétravail.
Les difficultés sont particulièrement fortes dans le numérique où 79 % des entreprises évoquaient en mai le « manque de talents » comme le principal frein à leur croissance, selon une enquête commandée par Numeum, la fédération professionnelle du secteur.
Le ministre délégué au Numérique, Jean-Noël Barrot, a d’ailleurs fait de la crise du recrutement une de ses priorités.
Dans le conseil, les employeurs optent pour une « diversification des profils », selon Syntec. En clair: en recrutant par exemple au sein d’écoles moins réputées. Dans ce secteur où le télétravail est déjà développé, certaines entreprises vont même jusqu’à laisser leurs salariés travailler à 100 % à distance.
L’éducation
Le secteur de l’éducation est touché par une crise inédite du recrutement d’enseignants, avec plus de 4 000 postes non pourvus aux concours cette année, sur 27 300 postes ouverts dans le public et le privé (et 850 000 enseignants au total).
Pour répondre à cette pénurie, l’Éducation nationale a recruté des enseignants contractuels, avec 3 000 personnes embauchées pour cette rentrée selon le ministère.
À plus long terme, le gouvernement travaille à redonner de l’attractivité au métier via une augmentation des rémunérations des enseignants, afin qu’aucun d’entre eux ne débute sa carrière « à moins de 2 000 euros net » par mois à la rentrée 2023, selon le gouvernement.
Les métiers du soin et du social
Parmi les 10 métiers où les recrutements sont les plus difficiles, selon Pôle Emploi, figurent en deuxième place les aides à domicile et aides ménagères. À la 9e place, on trouve les infirmiers, cadres infirmiers et puéricultrices.
Ces professionnels ont dû continuer de travailler pendant la crise sanitaire et se sont retrouvés en « première ligne » avec des conditions de travail rendues particulièrement difficiles par le virus.
Certains représentants de ces secteurs dénoncent le manque de financement, malgré les investissements du Ségur de la Santé annoncés l’an dernier.
Près de la moitié des crèches manquent aussi de personnel. Le gouvernement y a assoupli fin août les critères de recrutement.
Dans l’ensemble de la branche sanitaire, médico-sociale et sanitaire à but non lucratif, quelque 45 000 postes sont à pourvoir, selon les estimations de Nexem, une des principales organisations professionnelles du secteur.
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