Emmanuel Macron rouvre (seul) le débat du « temps scolaire dans l'année » et de la durée des vacances d'été
Par A.W.
Du fait « de vacances qui se sont allongées ces vingt dernières années », « on bourre les semaines [d’école] de nos enfants, qui arrivent crevés tous les soirs ». En visite dans une école marseillaise en cours de rénovation, Emmanuel Macron a dit, hier, vouloir « rouvrir le débat » pour le moins clivant du « temps scolaire dans l'année », qu’il estime être « une des autres grandes hypocrisies françaises ».
Avec « des vacances de trois mois, l'inégalité revient »
S’il souhaite relancer ce débat juste avant les vacances d’été, c’est que l’égalité à l’école serait en danger. « Quand on a des vacances de trois mois, l'inégalité revient », a estimé Emmanuel Macron, expliquant que lorsque les élèves retournent en cours en septembre, ils « reviennent avec les compétences qu'ils avaient un mois à un mois et demi avant l'arrêt des cours ». De ce fait, « on détruit en quelque sorte de l'apprentissage collectif », a-t-il déploré.
« [Les] collégiens, les enfants en primaire, etc., quand est-ce qu'ils ont commencé leurs vacances ? On a des enfants qui ont deux mois et demi parfois de vacances, presque trois pour certains », a rappelé le chef de l'État, en visite dans la deuxième ville de France jusqu'à aujourd’hui pour la seconde phase de son plan « Marseille en grand » , lancé en septembre 2021.
« La conséquence de cela, c'est qu'on bourre les semaines de nos enfants. C’est parce qu’ils partent trop tôt et ont des vacances qui se sont allongées ces vingt dernières années, que vous avez ces mêmes enfants, quand vous les comparez avec nos voisins, qui arrivent crevés tous les soirs », a-t-il justifié.
« Comment font les Allemands pour avoir du sport l’après-midi ? Parce qu’ils ont un temps scolaire qui est réparti différemment dans l’année », a assuré le président de la République, assumant ainsi la possibilité d’alléger et de réorganiser complètement les journées d’école, et ses conséquences implicites sur les collectivités.
« Il faut repenser ce temps dans l'année », a-t-il tranché, reconnaissant, toutefois, que ce ne sera « pas pour l’année prochaine, c’est un peu juste ».
Maternelle à deux ans et moins d’élèves en moyenne section
La veille, le chef de l’État avait également annoncé que les collèges allaient devoir progressivement élargir leurs horaires d’ouverture tandis que les maternelles seraient accessibles dès l'âge de deux ans dans les quartiers d'éducation prioritaire pour lutter contre « l'inégalité scolaire ».
« Parce que l’inégalité scolaire, elle se crée dans ces temps où l’enfant est renvoyé chez lui […] on va faire le collège de 8 heures à 18 heures. Dans vos quartiers, vous aurez le collège qui prendra en charge pédagogiquement les élèves » durant ce créneau horaire.
« On va accroître le dispositif "Devoirs faits" [qui permet un temps d’étude accompagnée pour que les collégiens réalisent leurs devoirs, dans leur établissement], les profs et les équipes pédagogiques vont être rémunérés en plus pour cela pour permettre, de 8 heures à 18 heures, d’être avec les enfants, de mieux leur apprendre », aussi bien à travers du « contenu pédagogique, [du] soutien scolaire adapté, mais aussi [de la] pratique sportive et [de l']éducation artistique et culturelle qui est hyper importante », a-t-il détaillé, en s’adressant à quelque 300 habitants de ces quartiers de Marseille, venus lui poser des questions.
Il a, par ailleurs, annoncé que l'accueil en milieu scolaire dès deux ans « pour ceux qui le souhaitent » serait développé « dans les quartiers sensibles ». D'abord instauré à Marseille, ce dispositif devrait ainsi être progressivement étendu aux 300 quartiers prioritaires en France d’ici 2027.
Il a également évoqué la possibilité qu’il y ait « moins d'élèves par classe en moyenne section en maternelle » dans les quartiers populaires, sans plus de détails, et alors que la pénurie de candidats chez les professeurs des écoles perdure cette année encore, d’après les premiers résultats des principaux concours de professeurs des écoles.
« Le déficit de lauréats pour le premier degré reste trois fois plus élevé qu’en 2021, avant que la réforme de la formation du précédent ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, n’exige un master 2 pour être candidat », note Le Monde qui constate une profonde inégalité territoriales puisque « les 1 391 places vacantes aux deux principaux concours publics sont, en réalité, concentrées sur trois territoires : la Guyane (119 sur 180), Créteil (652 sur 1 494) et Versailles (600 sur 1 500) ».
Annonces « sans concertation »
Ces annonces faites « sans concertation » à quelques jours des vacances scolaires ont eu le don de tendre les organisations syndicales.
« S'il fallait trouver une nouvelle annonce pour se mettre à dos toute une profession, c'est celle-là », a réagi Élisabeth Allain-Moreno, secrétaire générale du SE-Unsa, pour qui ces annonces n’ont « pas de sens, pas de faisabilité », bien qu’elle ait reconnu que « la question du calendrier scolaire » devait se poser, « mais en se demandant posément ce que l’on recherche, avec quels objectifs ».
« On ne discute pas du temps scolaire sur un coin de table ! C’est insupportable ! », a tonné, de son côté, sur Twitter l’Unsa Éducation. « Le temps scolaire est une problématique qui engage l'ensemble de la société, qui interroge l'éducation populaire et ses centres de loisirs, les collectivités territoriales qui organisent le temps périscolaire, qui questionne l'accès à des modes de garde sur tout le territoire, voire même la capacité des infrastructures touristiques et routières. Il ne peut être réglé de manière péremptoire », a expliqué Frédéric Marchand, le secrétaire général de l’organisation.
« On voit bien que ce serait bien de réorganiser les vacances sur l'année scolaire », a souligné Guislaine David, secrétaire générale du Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire. « Le frein, ce n'est ni les élèves, ni les enseignants ni les parents. Le frein c'est l'économie du tourisme », selon elle.
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