Éducation : 90 % des écoles comptent au moins une classe à niveaux multiples
Par Lucile Bonnin
Dans une note d’information publiée il y a quelques jours, la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (Depp) du ministère de l'Éducation nationale relève le « recours très répandu aux classes à niveaux multiples dans les écoles », et surtout dans les territoires ruraux. Ce n'est pas un phénomène nouveau mais il s'accentue, notamment avec la pénurie d'enseignants observée depuis plusieurs années.
« Les classes à niveaux multiples sont principalement composées de deux niveaux d’enseignement qui se suivent », peut-on lire en préambule de l’étude. D’autres cas de figure existent : des élèves jusqu’à huit niveaux d’enseignement différents maximum peuvent se retrouver dans une même classe, « soit l’ensemble des niveaux du premier degré ». Mais comme le montrent les statistiques, dans la majorité des cas « les classes à niveaux multiples regroupent deux niveaux d’enseignement dans neuf cas sur dix et, dans la grande majorité des cas (93,7 %), ces niveaux se suivent » .
Selon les chiffres présentés par la Depp (qui concernent la rentrée 2021), sur l’ensemble des écoles en France, 44,1 % des classes sont à niveaux multiples et 44,9 % des élèves y sont scolarisés, soit près de 3 millions.
Une configuration répandue dans les territoires ruraux
Plus la commune est rurale, plus il y a de chances de retrouver dans son école des classes à niveaux multiples. C’est la principale constatation tirée de cette étude. En effet, les écoles rurales ont plus souvent au moins une classe à niveaux multiples (94,5 %) que les écoles urbaines (86,0 %).
Cette configuration de classes est quasiment incontournable dans les écoles des communes rurales éloignées très peu denses puisque la Depp observe des classes à plusieurs niveaux dans 93,8 % des cas. Pour les communes rurales périphériques peu denses cela concerne 61,4 % des écoles.
Généralement, c'est dans les plus petites écoles que les classes à niveaux multiples se forment. Ainsi, « 80,7 % des petites écoles sont uniquement composées de classes à niveaux multiples, contre 42,7 % pour les écoles de plutôt petite taille, 14,5 % pour les écoles de plutôt grande taille, et 1,2 % pour celles de très grande taille. Cela s’illustre particulièrement dans certains départements du sud et de l’ouest de l’Hexagone : la proportion de classes à niveaux multiples dépasse ainsi 70 % dans l’Aveyron (75,9 %), la Mayenne (74,2 %), l’Ardèche (72,8 %), la Creuse (70,3 %) et l’Ariège (70,2 %) ».
La note pointe en parallèle une baisse généralisée, depuis les années 1970, de la proportion d’écoles à classes uniques. En effet, « cette baisse s’explique par l’érosion des effectifs d’élèves en milieu rural et par le développement des regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI) » . Pour rappel, pour les écoles en RPI les communes peuvent faire le choix de répartir différents niveaux d’enseignement entre elles au sein d’une entité commune.
Éducation prioritaire : moins de classes à niveaux multiples
À rebours des constatations faites à propos du milieu rural, dans les réseaux d’éducation prioritaire (REP), seules 7,4 % des écoles en REP et 2,2 % de celles en REP+ sont composées uniquement de classes à niveaux multiples. Dans les REP « constitués d’écoles publiques implantées essentiellement en milieu urbain », 81,9 % des écoles de Rep et 77,8 % de celles de REP+ ont au moins une classe à niveaux multiples.
Selon la Depp, « la moindre présence des classes à niveaux multiples en EP s’explique notamment par le dédoublement des classes de grande section, CP et CE1. » Il faut souligner que dans les écoles de l’EP, « la proportion de classes à niveaux multiples baisse fortement sous l’effet de ces dédoublements progressifs » notamment « à partir de la rentrée 2017 : elle passe de 25,8 % en 2016 à 14,9 % en 2019. Cette diminution s’opère surtout dans les niveaux dédoublés, mais s’observe également aux autres niveaux ».
Répartition
La Depp explique que les classes à niveaux multiples permettent d’équilibrer les effectifs des classes. En effet, il faut savoir que « la configuration des classes dans une école répond en partie à des contraintes liées au nombre d’élèves par niveau d’enseignement » et que « pour l’ensemble des niveaux du premier degré, le seuil de création d’une classe est de 12 élèves d’un même niveau d’enseignement dans une école. En dessous de ce seuil, la quasi-totalité des élèves est donc affectée en classe à niveaux multiples ».
Enfin, « à partir de 12 élèves d’un même niveau, l’effectif devient suffisant et la part des élèves affectés dans une classe à niveaux multiples diminue alors drastiquement à mesure que le nombre d’élèves dans le niveau augmente. À partir de 25 élèves, la proportion d’élèves en classe à niveaux multiples augmente à nouveau, jusqu’aux alentours de 33 élèves d’un même niveau dans l’école. Les effectifs du niveau sont alors trop faibles pour créer deux classes simples, mais trop importants pour n’en créer qu’une seule. Ils conduisent donc à la formation d’une classe à niveaux multiples ».
Mais comment sont répartis les élèves au sein des écoles pour former ces classes multiples ? Les niveaux se suivent, certes, lorsqu’il est possible pour un niveau d’enseignement donné d’affecter un élève, soit dans une classe simple soit dans une classe double, différentes stratégies s’opèrent. En maternelle, ceux nés au cours du premier trimestre de l’année, soit les plus âgés de leur classe d’âge, sont plus souvent affectés au niveau inférieur d’une classe à niveaux multiples. À partir du CE1 c’est un autre facteur qui entre en jeu : « Dans les écoles ayant au moins une classe de CE1 simple et une classe de CE1 double, les élèves de CE1 affectés dans les classes doubles présentent en moyenne moins de difficultés ou de fragilités pour lire un texte à voix haute ou résoudre un problème ».
Télécharger la note de la Depp.
Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2