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Édition du vendredi 31 mai 2024
Eau et assainissement

Eau et assainissement : 25 propositions des collectivités et entreprises pour un nouveau modèle économique

Intercommunalités de France, la FNCCR et la Fédération professionnelle des entreprises de l'eau (FP2E) ont présenté hier des propositions pour « garantir la soutenabilité économique » des services d'eau et d'assainissement. Pour remplacer ce modèle « Ã  bout de souffle », des tarifications adaptées aux territoires pourraient être envisagées.

Par Lucile Bonnin

« La crise de l’eau n’est plus un risque, c’est une réalité ». C’est ce que constatent un collectif de collectivités organisatrices du service public de l’eau à l’origine d’une tribune publiée mercredi dans Le Monde. Cette dernière appelle à « l’action pour sécuriser le principe de l’eau potable au robinet pour tous ». 

Le lendemain, Intercommunalités de France, la FNCCR et la Fédération professionnelle des entreprises de l'eau (FP2E) se sont réunis autour de la table pour aborder ce même sujet. Après avoir conduit de février à mai 2024 une « étude flash »  sur un nouveau mode de financement des services d’eau et d’assainissement en France, les trois acteurs ont formulé 25 propositions pour donner plus de latitude aux élus et collectivités et encourager des pratiques de sobriété. 

3 % de baisse des consommations moyennes en 2023

Le dossier de presse dévoilé hier par les trois acteurs pointe un fort recul de la consommation d’eau en France : « En 2023, la consommation nationale a diminué de 3 à 4 %, atteignant jusqu’à 10 % dans certains territoires ». Ce résultat s’explique surtout par un changement d’habitude chez les industriels « qui investissent dans des équipements plus économes »  et par une réduction de la consommation d’eau potable chez les particuliers.

Si ce constat constitue une bonne nouvelle pour l’environnement, il y a le revers de la médaille : la baisse des volumes d’eau distribués (de 3 % ou plus par an) « engendre de très fortes pressions budgétaires pour les collectivités : certaines d’entre elles, qui avaient augmenté le prix de l’eau pour financer des investissements, ont dû y renoncer pour compenser les baisses des volumes et équilibrer leurs budgets ». D’autant que selon l’enquête, « près de 9 collectivités sur 10 considèrent qu’il sera plus difficile de financer le service dans les 5 ans à venir, citant plus particulièrement les investissements sur le patrimoine existant (réduction des fuites, rénovation des équipements) et ceux destinés à garantir la qualité de l’eau face aux "nouveaux" polluants ».

Bref, l’équilibre sera difficilement tenable car les collectivités vont également devoir faire face à « un mur d'investissements à financer, des charges structurelles majoritairement fixes compte tenu de la complexité des services et des recettes en repli ». 

Donner les moyens aux collectivités 

Pour résoudre cette « équation impossible des services d’eau et d’assainissement », plusieurs propositions ont été formulées par les associations. Sans surprise, plus de la moitié d’entre elles concerne directement les collectivités.

Les collectivités et entreprises souhaitent d’abord accroître les capacités de connaissance de l’autorité organisatrice qui est, rappelons-le, « libre de fixer le prix de l’eau à l’échelle du territoire ». Ainsi, en vue de « garantir la soutenabilité financière du service », les collectivités ont « besoin de pouvoir opérer un suivi de la mise en œuvre des dispositions tarifaires qu’elles déploient (effet volume, effet prix, type de consommateurs visés) ». Les associations préconisent par exemple de « rendre obligatoire le comptage de tous les prélèvements dans le milieu, quels que soient les usages »  et de « consolider la trajectoire d’équipement en compteurs communicants pour permettre aux usagers de connaître et maîtriser leurs consommations, et aux collectivités de fixer une tarification adaptée aux besoins du territoire. » 

Pour renforcer les capacités d’agir des collectivités, il faudrait aussi « renforcer la possibilité donnée aux élus de faire preuve d’innovation en matière tarifaire »  et donc « harmoniser à 40 % minimum le plafond de la part fixe pour donner plus de latitude aux élus locaux, en maintenant le déplafonnement pour les zones touristiques », tout en encourageant des expérimentations en matière de tarification de l’eau. L’autre priorité est aussi, selon eux, de « rééquilibrer la contribution des usagers à des fins d’équité, d’équilibre économique et d’efficacité environnementale ». Pour ce faire, les collectivités devraient être encouragées « à adapter la tarification en période de tension sur la ressource ou sur les équipements (capacité des ouvrages) ». La fin des « tarifs dégressifs de l’eau qui contreviennent à l’objectif de sobriété tout en déséquilibrant le financement des services »  est identifiée comme étant une solution comme la mise en place d’une « forfaitisation des consommations des propriétaires de forages privés par le biais de la part fixe de l’abonnement ».

Enfin, les auteurs de l’étude proposent qu’une aide soit développée à destination des collectivités pour qu’elles puissent mettre en place « des trajectoires de sobriété, avec définition de critères objectifs en fonction des caractéristiques de la collectivité (forages privés, équipements industriels…) ».

Agences de l’eau 

Intercommunalités de France, la FNCCR et la FP2E identifient comme essentiel de repenser l’orientation du soutien financier de l’État et de ses opérateurs. Concrètement, il faut « augmenter les subventions des Agences de l’eau en faveur du financement des services publics d’eau et d’assainissement et conditionner les subventions des Agences de l’eau à la mise en place d’une trajectoire de sobriété », argumentent-ils. 

Autre piste évoquée : les Agences de l’eau pourraient « fixer un prix minimum de l’eau par rapport à une valeur de référence définie en fonction des caractéristiques du territoire, pour soutenir l’objectif de bonne gestion des services d’eau et d’assainissement ». Plus largement, les élus et professionnels insistent sur le besoin de davantage « communiquer auprès du grand public autour du coût du service public plutôt que du prix de l’eau »  et de « favoriser la connaissance des différents usages, à l’échelle locale, et renforcer le dialogue entre usagers, pour éviter ou résoudre les conflits d’usage et viser une meilleure équité dans le partage de la ressource. » 

Consulter le dossier de presse. 

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