Pollution de l'air : le Conseil d'État somme le gouvernement d'agir rapidement
Le Conseil d'État a ordonné à la France, dans une décision rendue publique vendredi, de prendre des mesures pour faire baisser la pollution de l'air dans plusieurs grandes villes dans un délai de six mois, sous peine d'une astreinte de 10 millions d'euros par semestre de retard. Un record de la part du juge administratif.
Une décision qui vient à la suite de sa saisie par de nombreuses associations de défense de l’environnement, dont Les Amis de la terre France, et d’une réaction de l’État « insuffisante » en la matière depuis trois ans.
Des mesures « insuffisantes » pour huit zones
Alors que le gouvernement avait assuré, en 2017, que « toutes les mesures qui s’imposent » seraient prises « dans les mois à venir » (lire Maire info du 17 juillet 2017) après une première décision rendue en juillet 2017 - dans laquelle le Conseil d’État avait enjoint au gouvernement d’agir afin de ramener, dans 13 zones du territoire et « dans le délai le plus court possible », les concentrations de dioxyde d’azote et de particules fines en dessous des valeurs limites - , force est de constater pour la juridiction administrative que « le gouvernement n’a toujours pas pris les mesures demandées pour réduire la pollution de l’air dans huit zones en France ».
Si des dispositions ont bien été mises en oeuvre pour la vallée de l'Arve depuis l’an passé, elles demeurent en revanche « insuffisantes » pour Grenoble, Lyon, Marseille-Aix, Reims, Strasbourg et Toulouse (concernant le dioxyde d’azote), mais aussi Fort-de-France (pour les particules fines) et Paris (pour les deux), selon le Conseil d'État.
Hormis le cas de la vallée de l’Arve, les « feuilles de route » élaborées par le gouvernement ne comportent « ni estimation de l’amélioration de la qualité de l’air attendue, ni précision sur les délais de réalisation de ces objectifs ». S’agissant de l’Ile-de-France, si le Conseil d’État reconnaît que le plan élaboré en 2018 comporte « un ensemble de mesures crédibles », la date de 2025 retenue pour assurer le respect des valeurs limites est « trop éloignée dans le temps pour pouvoir être regardée comme assurant une correcte exécution de la décision de 2017 ».
Astreinte de 10 millions d’euros par semestre de retard
Afin de contraindre l’État, le juge administratif a ainsi décidé de lui infliger une astreinte record de 10 millions d’euros par semestre (soit 54 000 euros par jour) « si celui-ci ne justifie pas avoir pris d’ici six mois les mesures demandées » et « tant qu’il n’aura pas pris les mesures qui lui ont été ordonnées ». Une sanction justifiée par le « délai écoulé depuis sa première décision », « l’importance du respect du droit de l’Union européenne », « la gravité des conséquences en matière de santé publique » et « l’urgence particulière qui en résulte ».
Non seulement, ce montant est le « plus élevé » jamais retenu par une juridiction administrative française à l’encontre de l’État, mais il pourrait être révisé « à la hausse » si la décision de 2017 n’est pas « pleinement exécutée ».
La somme ainsi collectée pourrait, précise le Conseil d’État, être versée « aux associations requérantes » mais aussi à « des personnes publiques disposant d’une autonomie suffisante à l’égard de l’État et dont les missions sont en rapport avec la qualité de l’air ou à des personnes privées à but non lucratif menant des actions d’intérêt général dans ce domaine ».
A.W.
Consulter la décision du Conseil d’Etat.
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