Dotations, normes, contractualisation avec les collectivités : le gouvernement donne le programme des travaux à venir
Par Franck Lemarc
On le sait : le gouvernement veut à tout prix embarquer les collectivités territoriales dans sa lutte pour la réduction du déficit public – même si les associations d’élus, depuis des années, répètent inlassablement que les collectivités ne sont pour rien dans le creusement du déficit de l’État, dans la mesure où elles sont légalement contraintes de voter des budgets à l’équilibre.
C’est dans ce cadre que le gouvernement a convoqué, le 6 mai dernier, une Conférence financière des territoires (lire Maire info du 7 mai) qui a surtout permis de mettre en lumière ce désaccord de fond entre gouvernement et associations d’élus : pour le premier, les collectivités « dépensent trop par rapport à leurs recettes » ; pour les secondes, le gouvernement se défausse d’une politique menée depuis des années, qui consiste à recentraliser les finances locales et imposer sans cesse de nouvelles dépenses aux collectivités, avant de leur reprocher… de dépenser trop.
Malgré ces désaccords, il est sorti de cette réunion la volonté de réfléchir ensemble aux évolutions possibles, dans le cadre de quatre groupes de travail dont les thématiques devaient être co-définies par les services du gouvernement et les associations d’élus.
Conclusion des travaux en juillet
Les quatre thèmes retenus, peut-on lire dans un mail envoyé par le cabinet de François Rebsamen aux associations d’élus, sont les suivants : prévisibilité des recettes et investissements ; effectifs et masse salariale des collectivités locales ; modalités des relations entre État et collectivités ; situation financière des départements.
Ces groupes de travail se réuniront chacun sur deux séances, les 26 et 27 mai puis les 18 et 19 juin. Chaque association disposera de deux sièges dans chaque groupe de travail – un élu et un membre des services. « Les résultats de ces groupes de travail et les actions envisagées seront présentés lors de la seconde conférence financière des territoires qui se tiendra en juillet », indique Mathieu Gatineau, directeur de cabinet adjoint de François Rebsamen. Ces résultats devraient être mobilisés dans le cadre de la rédaction du projet de loi de finances pour 2026.
Objectif contractualisation
Le groupe de travail sur la prévisibilité des recettes et les investissements sera certainement le théâtre d’âpres débats, y compris sur le constat et les chiffres présentés par le gouvernement en la matière, dont certains sont contestés par les associations. Le gouvernement pose d’emblée que pour faire diminuer le déficit, « toutes les sphères de l’administration publique doivent contribuer », dont les collectivités. Les modalités de cette contribution « doivent être définies sur une période pluriannuelle » , poursuit le gouvernement, ce qui suppose de réfléchir à « la prévisibilité des recettes ». Sur ce dernier point au moins, associations et gouvernement seront d’accord, les premières demandant depuis fort longtemps une meilleure visibilité sur les recettes et les dotations, sur plusieurs années.
Ce groupe de travail aura pour tâche de « mesurer l’impact en recettes de la loi de finances pour 2026 » et de se pencher sur « la pilotabilité des recettes des différentes strates » - c’est-à-dire, en français, le pouvoir de taux des élus.
Pêle-mêle, le gouvernement propose de débattre, dans ce groupe de travail, des modalités de calcul de la DGF, afin de la rendre plus lisible, des apports de recettes par « financements externes » (européens par exemple), du « niveau et de la prévisibilité des recettes d’investissement » … L’objectif final – le gouvernement ne s’en cache pas – est d’aboutir à un retour de la contractualisation entre État et collectivités, « avec des engagements réciproques à définir ». Soit, si l’on comprend bien : l’État s’engagerait à donner plus de « prévisibilité » aux dotations, si les collectivités s’engagent en contrepartie à diminuer ou du moins « maîtriser » leurs dépenses.
À noter une petite formule qui va probablement faire sursauter plus d’un élu : le gouvernement souhaite que ce groupe de travail analyse « différents scénarios d’évolution des recettes et dépenses », « y compris une année blanche » . Reste à savoir ce que le gouvernement met derrière ce terme « d’année blanche » – il faudra attendre la réunion du groupe de travail pour le savoir.
Fonction publique territoriale
Un deuxième groupe de travail se réunira sur le thème de la fonction publique territoriale. Le gouvernement pointe, dans sa fiche de présentation, une « hausse très rapide » des dépenses de personnel des collectivités. Il souhaite donc « identifier des mesures permettant de maîtriser leur évolution », ainsi que les « leviers de gestion prévisionnelle » face à la forte hausse attendue, dans les prochaines années, des départs en retraite.
Ce groupe de travail – comme le souhaitent les associations – sera également l’occasion de débattre de l’attractivité des métiers de la FTP et y compris « des questions statutaires ». Le gouvernement accepte aussi de débattre de l’impact de la hausse massive des cotisations CNRACL.
« Moratoire sur les normes » ?
Troisième groupe de travail intéressant directement les communes et intercommunalités : celui qui se consacrera aux « relations financières entre l’État et les collectivités » , où sera abordée, notamment, la question des normes.
Le gouvernement rappel que les transferts financiers de l’État vers les collectivités s’élève à plus de 100 milliards d’euros par an. La fiche indique qu’il s’appuie « sur des critères objectifs et rationnels » dans l’attribution de ressources aux collectivités – affirmation dont on peut dire qu’elle n’est pas unanimement partagée.
Les enjeux identifiés de ce groupe de travail seront, d’abord, de « mesurer l’efficacité » de ces dispositifs de financement. Mais surtout, ce qui ne pourra manquer d’intéresser les élus, très demandeurs en la matière, « de réguler l’édiction de normes ayant un impact financier sur les finances locales » . Le gouvernement se dit même prêt à discuter d’un « moratoire des normes » , dès 2025. Ces réflexions impliqueraient, souligne le gouvernement, de « renforcer le rôle du Conseil national d’évaluation des normes ».
De façon sans doute nettement moins consensuelle, le gouvernement souhaite enfin, dans le cadre de ce groupe de travail, discuter de la péréquation horizontale, c’est-à-dire des mécanismes de solidarité entre strates de collectivités. Il estime en effet que cette question « mérite d’être soulevée » – ce que ne souhaitaient pas les élus – du fait de « la forte divergence sur le dynamisme des recettes » entre les strates.
Début des discussions, donc, lundi prochain, à l’Hôtel de Roquelaure, siège du ministère de l’Aménagement des territoires et de la Décentralisation.
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