Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du mercredi 6 septembre 2023
Administration

Dénomination obligatoire de toutes les voies par les communes : le décret est paru

Le très attendu décret sur la nouvelle obligation faite aux communes de nommer et numéroter toutes les voies existant sur leur territoire a été publié au Journal officiel du 14 août. Principale information : ces données devront être mises à disposition de la base adresse nationale entre le 1er janvier et 1er juin 2024, en fonction de la taille des communes. 

Par Franck Lemarc

Initialement prévu pour entrer en vigueur l’hiver dernier, ce décret a pris beaucoup de retard, en particulier parce que sa rédaction initiale ne satisfaisait pas l’AMF, qui a été étroitement associée à sa rédaction. Il s’agit, pour mémoire, du décret d’application de l’article 169 de la loi « 3DS »  du 21 février 2022. Cet article fixe, d’une part, l’obligation pour tous les conseils municipaux de « procéder à la dénomination des voies et lieux-dits, y compris les voies privées ouvertes à la circulation »  ; et, d’autre part, celle de mettre à disposition ces données – y compris la numérotation des bâtiments –, afin qu’elles figurent dans la base nationale d’adresses, accessible à tous, aussi bien les services de l’État que les entreprises, les applications de géolocalisation ou les particuliers. 

BAN et BAL

Le gouvernement a présenté un premier projet de décret en décembre 2022, qui a été rejeté par les représentants des élus au Conseil national d’évaluation des normes (Cnen). Le projet de décret a été rejeté plusieurs fois dans les mêmes conditions, sans que le gouvernement le modifie. Mais, bonne (et rare) surprise, la version qui a finalement été publiée en août a été modifiée et expurgée des éléments qui gênaient l’AMF. 

Ce décret, comme l’ont expliqué les représentants du ministère de l’Intérieur lors de la séance du Cnen du 12 janvier 2023, a pour objet « de conforter la commune comme seule source d’information officielle sur la dénomination des voies et de rationaliser cette mission au travers d’une remontée des données officielle et opposable à des tiers ». Concrètement, la mise à disposition des données se fait via un site unique, géré par l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN), adresse.data.gouv.fr. La base adresse nationale (BAN) sera désormais alimentée par autant de bases adresses locales (BAL) qu’il y a de communes. Les modalités de transmission des données par les communes seront définies ultérieurement, par arrêté de la Première ministre. 

En ce qui concerne les délais, les communes de plus de 2 000 habitants devront avoir transmis l’intégralité des données au 1er janvier prochain ; six mois de plus sont accordés aux communes de moins de 2 000 habitants, pour qui le délai est repoussé au 1er juin 2024. 

« Dites-le nous une fois » 

Le principal point d’achoppement entre les services de l’État et l’AMF, lors de la conception de ce texte, a été l’application du principe du « dites-le nous une fois ». Le principe est simple et son utilité est évidente : les communes n’auront à transmettre qu’une seule fois leurs données – ou, par la suite, d’éventuelles modifications, dans un délai d’un mois après la décision entraînant ces modifications –, et tous les services de l’État, en particulier le fisc, pourront aller « piocher »  dans la base adresse nationale pour les obtenir. En conséquence, le décret de 1994 qui imposait aux communes de transmettre au centre des impôts fonciers ou au bureau du cadastre la liste des voies de la commune est abrogé. 

Mais la rédaction initiale du décret ouvrait une brèche dans ce principe, avec une formulation floue et peu claire : le principe du « dites-le nous une fois »  ne s’appliquait que si les données d’adressage n’étaient pas associées à « d’autres informations ». Quelles informations ? et détenues par qui ? Le décret ne le précisait pas, ce qui a suscité beaucoup d’interrogations tant de la part de l’AMF que de l’Association des ingénieurs territoriaux ou de l’Afigese (Association des financiers, gestionnaires, évaluateurs des collectivités territoriales). 

C’est donc une réelle bonne surprise : le gouvernement a finalement choisi d’expurger le décret de cette obscure formulation, qui ne figure plus dans la version publiée le 14 août. 

Plaques et numéros

Le décret modifie également l’article R2512-8 du CGCT, qui concerne les « plaques indicatrices de numéro d’immeuble ». Jusqu’à présent, cet article imposait aux communes de prendre en charge « la fourniture et la pose des plaques indicatrices des numéros d’immeuble »  en bordure des voies publiques, pour le premier numérotage. Ce n’est désormais plus le cas. 

Pédagogie

Il reste maintenant à attendre, d’une part, la publication de l’arrêté mentionné dans le décret, et, d’autre part, à mettre en place « l’accompagnement dédié »  promis par l’Agence nationale de cohésion des territoires. Les représentants des élus au Cnen ont insisté pour que les services de l’État fassent preuve, dans cette opération complexe, « de la plus grande pédagogie », eu égard à la grande complexité de cette nouvelle charge imposée aux communes. Il est à espérer que l’État poursuivra l'effort déjà engagé pour informer tant les élus que les agents des communes, et mettra rapidement à leur disposition des outils de documentation, notamment pour leur préciser quelles sont les adresses qui doivent être obligatoirement référencées dans la BAL, ainsi que la portée du principe de « dites-le nous une fois ». 

Maire info reviendra sur ces questions au fur et à mesure de la publication de ces différents documents. 

Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2