Édition du vendredi 9 juin 2017
Décret rythmes scolaires : avis défavorables du CNEN et du Conseil supérieur de l'éducation
C’est une étape compliquée pour le nouveau ministre de l’Éducation nationale : son projet de décret prévoyant la possibilité, pour les maires, de demander le retour à la semaine de quatre jours a reçu hier un avis défavorable par les deux instances consultatives concernées, le CSE (Conseil supérieur de l’éducation) et le CNEN (Conseil national d’évaluation des normes) – mais pour des raisons différentes.
Ce projet de décret (lire Maire info du 31 mai) permettra aux maires de demander, sans que « les particularités du projet éducatif territorial » aient besoin de le justifier, de revenir à une organisation du temps scolaire sur quatre jours. Une idée que l’AMF considère favorablement, comme elle l’a exprimé plusieurs fois depuis une semaine, notamment dans un communiqué publié avant-hier, où elle reconnaissait que cette souplesse nouvelle pourrait « permettre de prendre en compte les spécificités locales, répondant ainsi aux attentes d’un certain nombre de collectivités confrontées à des difficultés persistantes dans la mise en œuvre de cette réforme des rythmes scolaires ». Mais pas question, pour l’association, de renoncer au « cadre » de la réforme de 2013 qui a nécessité beaucoup de travail localement à mettre en place, ni surtout d’accepter de voir remise en question la pérennité du fonds de soutien qu’elle a obtenue au Congrès des maires de 2014 après une intense mobilisation depuis 2012. C’est une position constante qu’elle a réitérée au ministre lors de l’audience de mercredi dernier.
Les deux instances qui ont examiné le texte hier se sont exprimées sur des questions différentes. Le CSE est une instance purement tournée vers les questions pédagogiques et éducatives – elle est constituée de 98 membres représentant tous les acteurs du monde éducatif (personnels, usagers et partenaires, dont les collectivités). Le CNEN, lui, se prononce sur les impacts des nouveaux textes sur les collectivités territoriales.
Et sur ce terrain, le moins que l’on puisse dire est que les représentants du ministère n’ont pas convaincu les élus. L’enjeu a été posé dès le moment où le nouveau gouvernement a évoqué cette nouvelle réforme : la « liberté » donnée aux maires de choisir signifiera-t-elle que ceux qui choisiront de rester sur 4,5 jours ne toucheront plus l’aide financière de l’État ? Les élus attendaient une réponse claire et formelle sur ce terrain, et ils ne l’ont pas obtenue. Philippe Laurent, maire de Sceaux, secrétaire général de l’AMF et vice-président du CNEN, précise dans un communiqué : « Le représentant de l’administration, rapporteur du texte, n’a pas pu garantir devant les élus la pérennité du fonds de soutien à l’organisation des activités durant le temps périscolaire. » Les représentants des élus au CNEN ont donc joué la prudence, d’autant plus que chat échaudé craint l’eau froide : « Compte tenu de ce qu’ils connaissent de l’attitude permanente de l’État à l’égard des collectivités locales, à savoir une remise en cause systématique des compensations et financements, les élus du CNEN n’ont pas voulu cautionner une démarche qui pourrait donner argument à l’État pour remettre en cause un financement arraché de haute lutte lors du lancement de la réforme », explique Philippe Laurent. Et il précise ce matin plus clairement encore à Maire info : « Je rappelle que le CNEN ne se prononce pas sur les questions pédagogiques. Tout simplement, quand le représentant du ministère nous dit qu’il ne sait pas si le fonds sera pérennisé ou pas, je dis : pas question ! Les maires en ont assez de se faire avoir ». Les élus du CNEN ont donc unanimement émis un avis défavorable au projet de décret. Ils ont également demandé, comme l’AMF l’avait fait la veille auprès du ministre, le maintien de la dérogation aux normes d’encadrement et une évaluation partagée de la mise en œuvre de la réforme (ce qui avait été acté dans son principe); ils ont également exprimé leur regret que le texte ait été présenté en urgence.
Scénario similaire au Conseil supérieur de l’éducation, avec à la clé un rejet du texte, mais pour des raisons toutes différentes. Certes, les syndicats comme les associations de parents d’élèves ont tous dénoncé la « précipitation » et le « manque de concertation ». Mais pour Agnès Le Brun, représentante de l’AMF au CSE, il y a aussi « une erreur d’appréciation » de certaines organisations sur ce texte qui y voient « un durcissement du pouvoir des maires ». Au point que certains syndicats, lors de la réunion, ont même demandé que seuls les conseils d’école puissent demander le retour à la semaine de 4 jours, et pas le maire !
Pour la maire de Morlaix, le texte ne donne au contraire aucun pouvoir supplémentaire au maire puisque celui-ci, conjointement avec un ou plusieurs conseils d'école, ne peut que « proposer » un changement d’organisation, à charge à l’inspection académique d’accepter ou pas. Ce serait donc bien, au final, l’État qui trancherait et non le maire. Agnès Le Brun a voté pour ce texte, estimant que, d’un point de vue organisationnel et pédagogique, il va dans le bon sens : « Ce texte permet un assouplissement réel et une bonne articulation entre les acteurs. » Agnès Le Brun explique à Maire info qu’il n’y a aucune contradiction entre le fait qu’elle ait voté pour ce texte au CSE et que les élus aient voté contre au CNEN : « Chacun est dans son rôle. Le CSE discute pédagogie, le Cnen discute charges financières. »
Elle espère maintenant qu’un compromis sera trouvé, peut-être sur la proposition qu’elle a faite au ministre Jean-Michel Blanquer, lors de la rencontre du 7 juin entre celui-ci et l’AMF : ne pas faire dépendre le soutien financier du nombre de jours choisi mais « de la qualité du projet éducatif territorial », comme le communiqué diffusé par l’AMF en faisait état. Une proposition sur laquelle Philippe Laurent se dit ce matin « tout à fait d’accord ». Quant au ministre de l’Éducation, Jean-Michel Blanquer, il ne s’est pas montré, selon Agnès Le Brun, fermé à cette proposition.
Ce projet de décret (lire Maire info du 31 mai) permettra aux maires de demander, sans que « les particularités du projet éducatif territorial » aient besoin de le justifier, de revenir à une organisation du temps scolaire sur quatre jours. Une idée que l’AMF considère favorablement, comme elle l’a exprimé plusieurs fois depuis une semaine, notamment dans un communiqué publié avant-hier, où elle reconnaissait que cette souplesse nouvelle pourrait « permettre de prendre en compte les spécificités locales, répondant ainsi aux attentes d’un certain nombre de collectivités confrontées à des difficultés persistantes dans la mise en œuvre de cette réforme des rythmes scolaires ». Mais pas question, pour l’association, de renoncer au « cadre » de la réforme de 2013 qui a nécessité beaucoup de travail localement à mettre en place, ni surtout d’accepter de voir remise en question la pérennité du fonds de soutien qu’elle a obtenue au Congrès des maires de 2014 après une intense mobilisation depuis 2012. C’est une position constante qu’elle a réitérée au ministre lors de l’audience de mercredi dernier.
Les deux instances qui ont examiné le texte hier se sont exprimées sur des questions différentes. Le CSE est une instance purement tournée vers les questions pédagogiques et éducatives – elle est constituée de 98 membres représentant tous les acteurs du monde éducatif (personnels, usagers et partenaires, dont les collectivités). Le CNEN, lui, se prononce sur les impacts des nouveaux textes sur les collectivités territoriales.
Et sur ce terrain, le moins que l’on puisse dire est que les représentants du ministère n’ont pas convaincu les élus. L’enjeu a été posé dès le moment où le nouveau gouvernement a évoqué cette nouvelle réforme : la « liberté » donnée aux maires de choisir signifiera-t-elle que ceux qui choisiront de rester sur 4,5 jours ne toucheront plus l’aide financière de l’État ? Les élus attendaient une réponse claire et formelle sur ce terrain, et ils ne l’ont pas obtenue. Philippe Laurent, maire de Sceaux, secrétaire général de l’AMF et vice-président du CNEN, précise dans un communiqué : « Le représentant de l’administration, rapporteur du texte, n’a pas pu garantir devant les élus la pérennité du fonds de soutien à l’organisation des activités durant le temps périscolaire. » Les représentants des élus au CNEN ont donc joué la prudence, d’autant plus que chat échaudé craint l’eau froide : « Compte tenu de ce qu’ils connaissent de l’attitude permanente de l’État à l’égard des collectivités locales, à savoir une remise en cause systématique des compensations et financements, les élus du CNEN n’ont pas voulu cautionner une démarche qui pourrait donner argument à l’État pour remettre en cause un financement arraché de haute lutte lors du lancement de la réforme », explique Philippe Laurent. Et il précise ce matin plus clairement encore à Maire info : « Je rappelle que le CNEN ne se prononce pas sur les questions pédagogiques. Tout simplement, quand le représentant du ministère nous dit qu’il ne sait pas si le fonds sera pérennisé ou pas, je dis : pas question ! Les maires en ont assez de se faire avoir ». Les élus du CNEN ont donc unanimement émis un avis défavorable au projet de décret. Ils ont également demandé, comme l’AMF l’avait fait la veille auprès du ministre, le maintien de la dérogation aux normes d’encadrement et une évaluation partagée de la mise en œuvre de la réforme (ce qui avait été acté dans son principe); ils ont également exprimé leur regret que le texte ait été présenté en urgence.
Scénario similaire au Conseil supérieur de l’éducation, avec à la clé un rejet du texte, mais pour des raisons toutes différentes. Certes, les syndicats comme les associations de parents d’élèves ont tous dénoncé la « précipitation » et le « manque de concertation ». Mais pour Agnès Le Brun, représentante de l’AMF au CSE, il y a aussi « une erreur d’appréciation » de certaines organisations sur ce texte qui y voient « un durcissement du pouvoir des maires ». Au point que certains syndicats, lors de la réunion, ont même demandé que seuls les conseils d’école puissent demander le retour à la semaine de 4 jours, et pas le maire !
Pour la maire de Morlaix, le texte ne donne au contraire aucun pouvoir supplémentaire au maire puisque celui-ci, conjointement avec un ou plusieurs conseils d'école, ne peut que « proposer » un changement d’organisation, à charge à l’inspection académique d’accepter ou pas. Ce serait donc bien, au final, l’État qui trancherait et non le maire. Agnès Le Brun a voté pour ce texte, estimant que, d’un point de vue organisationnel et pédagogique, il va dans le bon sens : « Ce texte permet un assouplissement réel et une bonne articulation entre les acteurs. » Agnès Le Brun explique à Maire info qu’il n’y a aucune contradiction entre le fait qu’elle ait voté pour ce texte au CSE et que les élus aient voté contre au CNEN : « Chacun est dans son rôle. Le CSE discute pédagogie, le Cnen discute charges financières. »
Elle espère maintenant qu’un compromis sera trouvé, peut-être sur la proposition qu’elle a faite au ministre Jean-Michel Blanquer, lors de la rencontre du 7 juin entre celui-ci et l’AMF : ne pas faire dépendre le soutien financier du nombre de jours choisi mais « de la qualité du projet éducatif territorial », comme le communiqué diffusé par l’AMF en faisait état. Une proposition sur laquelle Philippe Laurent se dit ce matin « tout à fait d’accord ». Quant au ministre de l’Éducation, Jean-Michel Blanquer, il ne s’est pas montré, selon Agnès Le Brun, fermé à cette proposition.
F.L.
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