Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 20 décembre 2019
Déchets

Dépôts sauvages : le gouvernement refuse finalement les simplifications attendues par les maires

Ce sera certainement une immense déception pour les maires : quatre mois après la mort du maire de Signes et l’émotion qu’elle avait soulevée chez les élus, le gouvernement a finalement choisi de ne pas faire évoluer la loi pour permettre aux maires de gérer plus facilement les dépôts sauvages. 
La pilule aura d’autant plus de mal à passer que le gouvernement avait la possibilité d’utiliser deux véhicules législatifs pour répondre aux attentes pressantes des maires en la matière – attentes qui s’étaient en particulier très manifestement exprimées pendant le congrès des maires, lors d’un atelier organisé sur ce dossier – : le projet de loi Engagement et proximité, d’une part, et le projet de loi relatif à l’économie circulaire, d’autre part. Pendant deux semaines, les services de l’État ont laissé entendre qu’une mesure de simplification à ce sujet figurerait dans le projet de loi Économie circulaire, et qu’il n’était donc pas nécessaire de l’introduire dans Engagement et proximité. Pour au final annoncer – hier soir – que la simplification attendue ne figurerait ni dans l’un ni dans l’autre texte. 

Un problème bien connu des maires
À l’heure actuelle, la seule législation sur le sujet figure dans le Code de l’environnement, à l’article L541-3. Cet article pose, après constatation des faits, le principe d’un délai de 10 jours signalé au contrevenant pour « présenter ses observations », suivi d’une mise en demeure avec obligation pour le contrevenant de « consigner entre les mains d’un comptable public une somme correspondant aux mesures prescrites », puis éventuellement de faire procéder à l’enlèvement des déchets en se servant des sommes consignées pour financer l’opération. 
Le problème – que connaissent tous les maires – est que cet article formalise une procédure lourde et complexe, et surtout universelle, puisqu’elle s’applique aussi bien à un « petit »  dépôt sauvage – une épave d’appareil électro-ménager ou un mètre cube de gravats déposés au bord d’un chemin communal – qu’à une décharge sauvage de 5 hectares ! De fait, de nombreux maires confrontés au problème renoncent à appliquer les mesures préconisées par le Code de l’Environnement, du fait de leur lourdeur. La « consignation »  ne fonctionne souvent pas, parce que les comptables publics refusent le plus souvent de mettre en place la procédure pour des sommes jugées trop faibles. Quant au délai de 10 jours, il apparaît également inadapté : en matière de dépôts sauvages, tous les maires savent qu’il faut agir vite. Faire enlever très rapidement une machine à laver déposée n’importe où peut être assez simple… mais si l’on tarde, les déchets appelant les déchets, d’autres dépôts ne tarderont pas à la rejoindre et un « petit dépôt »  peut très rapidement devenir grand. 

Amendement rejeté
Lors de l’examen au Sénat du projet de loi Économie circulaire, un amendement de bon sens avait été adopté pour simplifier la procédure et, surtout, la faire figurer non pas au Code de l’environnement – peu familier des maires – mais au Code général des collectivités territoriales. Il s’agissait de permettre aux maires constatant la présence d’un dépôt sauvage d’agir contre le contrevenant avec un délai réduit de 10 jours à 48 heures, avec « versement d’une amende administrative »  et « mise en demeure au contrevenant d’effectuer les opérations nécessaires »  sous peine d’astreinte journalière. En cas de besoin, la commune pouvait faire procéder à l’enlèvement « aux frais du contrevenant », sans processus de consignation. 
Cet amendement, présenté lors de l’atelier sur les dépôts sauvages au congrès de l’AMF, avait fait l’unanimité parmi les maires. 
Sauf que dès l’examen du texte en commission du développement durable, à l’Assemblée nationale, cet amendement a été supprimé. Motif : la majorité – et apparemment les services de l’État – estiment que les dispositions du Code de l’environnement sont amplement suffisantes.
Jusqu’au bout, l’AMF a négocié avec le cabinet du ministère de la Transition écologique et solidaire pour que le gouvernement réintroduise cet amendent dans le texte, en séance publique. Quitte à préciser clairement que ces dispositions ne s’appliqueraient qu’aux petits dépôts (moins de 5 mètres cubes). Le gouvernement et la majorité ont joué la montre et, au dernier moment, ont fait savoir à l’AMF qu’aucun amendement ne serait finalement réintroduit sur ce sujet. 
Il n’y aura donc pas de simplification du droit, ni dans Engagement et proximité ni dans la future loi Économie circulaire. De quoi doucher les espoirs des maires sur une question qui n’a rien d’un détail, et constitue, au contraire, une préoccupation quasi quotidienne. Sauf si cette question refait surface lors de la commission mixte paritaire députés/sénateurs, qui, selon nos informations, devrait avoir lieu le mardi 7 ou le mercredi 8 janvier.

Franck Lemarc

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