Une nouvelle proposition de loi au Sénat pour « garantir l'autonomie financière » des collectivités territoriales
Modifier la Constitution pour garantir l’autonomie financière des collectivités locales. C’est le projet ambitieux porté par le groupe socialiste au Sénat. La proposition de loi constitutionnelle portée par Éric Kerrouche vise à éviter que les collectivités soient l’éternelle « variable d’ajustement budgétaire » du gouvernement.
Rappelons que les dispositions relatives aux finances des collectivités sont décidées en loi de finances, c’est-à-dire dans l’examen du texte qui définit le budget de l’État. Pour les besoin de celui-ci, il est donc possible de diminuer, par exemple, le montant de la DGF, comme cela fut le cas en 2014.
A contrario, le budget de la Sécurité sociale, par exemple, ne dépend pas de la loi de finances mais d’une loi de financement, comme celle qui est actuellement en discussion au Parlement. Une telle loi de financement consacre le fait que le budget de la Sécurité sociale est distinct de celui de l’État, et elle fixe une sorte de « pacte financier » entre les deux entités.
Loi de financement
Éric Kerrouche relève, dans l’exposé des motifs de sa proposition de loi, qu’il « n’existe pas de cadre retraçant les prévisions de recettes et de dépenses des collectivités territoriales. Alors que l'autonomie fiscale des collectivités territoriales, par ailleurs jamais consacrée par la jurisprudence constitutionnelle, est largement remise en cause, il [s'agirait donc] d'un moyen efficace permettant de garantir l'autonomie financière, et donc politique, des collectivités territoriales et de leurs groupements. »
Il propose donc de créer un « PLFCT » (projet de loi de financement des collectivités territoriales), qui serait discuté annuellement par le Parlement, « indépendamment du projet de loi de finances mais en cohérence avec lui ».
Rappelons que la création d’une telle loi de financement est évoquée depuis 2014 et le rapport Pour un redressement des finances publiques fondé sur la confiance mutuelle et l’engagement de chacun, d’Alain Lambert-et Martin Malvy (lire Maire info du 17 avril 2014). La Cour des comptes l’a aussi réclamé à plusieurs reprises.
L’AMF et Territoires unis, quant à eux, partagent pleinement la préoccupation d’une loi « spécifique » sur les finances locales. Ils ne réclament pas, toutefois, de loi de financement, mais « l’inscription dans la Constitution de la mise en place d’une loi d’orientation pluriannuelle des finances locales déclinée chaque année dans une loi de finances spécifique aux collectivités qui regroupera les dispositions financières, budgétaires et fiscales les concernant » .
Transfert de compétences
La proposition de loi du sénateur Kerrouche vise également à « garantir la compensation financière des transferts de compétence dans le temps ». En effet, explique l’élu des Landes, « la Constitution affirme en effet que tout transfert, création ou extension de compétences entre l'État et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Cette règle de compensation est en réalité neutralisée puisqu'elle n'est pas assurée dans la durée. » Il propose donc que le montant des ressources transférées « fasse l’objet d’un réexamen régulier, de sorte à permettre un contrôle effectif du Parlement et des collectivités sur le respect de cette règle ».
La proposition de loi elle-même est assez brève. Elle propose de modifier le titre V de la Constitution (sur les rapports entre le Parlement et le gouvernement), en y ajoutant : « Les lois de financement des collectivités territoriales et de leurs groupements déterminent leurs ressources et les conditions générales d’équilibre de leurs comptes, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique. Cette loi de financement vise à garantir l’autonomie financière des collectivités territoriales et de leurs groupements. »
L’article 2 du texte modifierait l’article 72-2 de la Constitution, consacré aux collectivités territoriales. Alors que le texte actuel dispose que « tout transfert de compétences entre l'État et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice », il est moins précis sur les « créations ou extensions de compétences » : dans ce cas, dit l’actuelle Constitution, ce mouvement doit « s’accompagner de ressources déterminées par la loi ». Sans fixer le niveau de celles-ci, donc. Le texte proposé par Éric Kerrouche efface ce flou : « Toute création ou extension de compétences ou toute modification des conditions d’exercice des compétences des collectivités territoriales résultant d’une décision de l’État et ayant pour effet d’augmenter les dépenses de celles-ci est accompagnée de ressources équivalentes au montant estimé de cette augmentation ».
Le texte propose enfin le « réexamen régulier » de ces ressources, dont les conditions seraient fixées par une loi organique.
Il sera intéressant de voir l’accueil que le gouvernement va réserver à ce texte, qui pourrait être examiné par le Sénat « prochainement ». On saura alors ce que valent les déclarations du président de la République et de la Première ministre sur la nécessité de renforcer la décentralisation.
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