Transferts de compétences aux communes et intercommunalités : le gouvernement ferme la porte
L’AMF, dans sa résolution adoptée la semaine dernière, a répété la position qu’elle défend depuis des mois, en accord avec Régions de France et l’ADF : l’ouverture d’un « chantier de nouveaux transferts de compétences », en particulier sur trois sujets majeurs : la santé, le sport et la culture. Dans ces trois domaines, où les collectivités locales – et singulièrement les communes – jouent un rôle extrêmement important, l’AMF estime que l’État pourrait leur déléguer, tout ou partie, ses compétences, afin de se recentrer sur ses tâches régaliennes.
Confirmation
Ce n’est pas une réelle surprise, mais le gouvernement n’entend pas donner suite à cette demande. Dans son interview aux Échos, la ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, Jacqueline Gourault, a douché les espoirs des maires en la matière, en expliquant qu’il n’y aurait pas, sauf à la marge, de transferts massifs de compétences au bloc local.
Détaillant le contenu du futur projet de loi 3D (ou 4D, on ne sait pas encore), qui devrait être présenté en Conseil des ministres « début février », la ministre a été interrogée sur les communes et intercommunalités. Elle n’évoque pas une fois les domaines de la santé, de la culture ou du sport, ni d’ailleurs aucun autre transfert de compétence. La ministre ne mentionne que deux points : Afin de donner aux communes et intercommunalités « des outils renforcés de maîtrise foncière », le gouvernement entend leur faciliter « la récupération des biens abandonnés », et « abaisser de trente à dix ans le délai de prise de possession des biens dits ‘’sans maître’’ ». Point.
Sur la santé, la ministre annonce simplement que les communes (et les départements) « pourront recruter du personnel pour les centres de santé qu’elles gèrent », et que le texte « donnera une base légale claire au financement des établissements de santé par les collectivités ».
Le gouvernement semble être un peu plus ouvert, en revanche, sur la demande de l’AMF de voir les collectivités disposer d’un « réel pouvoir réglementaire » : « Les communes vont aussi avoir de nouvelles marges de manœuvre réglementaire sur certaines dispositions qui sont aujourd'hui prises par décret au niveau national », assure Jacqueline Gourault. Lesquelles ? Il faudra attendre l’avant-projet de loi pour le savoir. Le seul exemple donné par la ministre est « le droit de décider des pièces nécessaires pour inscrire un enfant à l’école », mais « d’autres dispositions » pourraient être prises, « en fonction des demandes qui seront faites ».
Régions et départements
Ce seront, apparemment, les régions qui auront le droit au plus de transferts de compétences. Jacqueline Gourault évoque en particulier la poursuite « jusqu’au bout » de la décentralisation des routes nationales, avec une expérimentation de cinq ans, à partir de 2023, des « routes d’intérêt régional ». « Le texte va aussi donner la possibilité aux régions de récupérer la gestion et la propriété des petites lignes ferroviaires et de leurs gares. Nous allons aussi faciliter la décentralisation des aéroports ne figurant pas sur la liste des aéroports d'intérêt national ou international vers les collectivités qui se porteraient candidates », indique la ministre.
Sur le terrain de l’écologie, le gouvernement envisage le transfert aux régions de la gestion de « la totalité du réseau Natura 2000 terrestre », ainsi que « des moyens d’intervention en matière d’économie circulaire et de production de chaleur renouvelable ».
Quant aux départements, ils se verraient transférer les services de médecine scolaire, mais, apparemment, pas la gestion des Ehpad.
Enfin, la ministre ferme également la porte à une demande des régions : celle d’occuper la présidence des Agences régionales de santé. « Nous sommes en période de crise et nous n’allons pas tout bousculer », indique Jacqueline Gourault. Mais il y aura bien une réforme des conseils de surveillance des ARS, qui seront « transformés en conseils d’administration afin d’y faire entrer plus d’élus » : un tiers des sièges de ces conseils d’administration devrait être réservé aux élus. Mais ce seront les préfets qui les présideront.
C’est la première fois que la ministre donne des éléments concrets sur le contenu de ce texte, qui n’avait jusqu’à présent fait l’objet que de déclarations très générales. Elle pourrait donner davantage de détail devant les sénateurs de la Délégation aux collectivités territoriales, aujourd'hui.
Le texte devrait, selon la ministre, être débattu au Sénat dès le premier semestre, ce dont beaucoup doutent au vu de l’embouteillage législatif colossal du début 2021. Il reste un doute sur la possibilité de voir ce texte adopté avant la fin du quinquennat.
Franck Lemarc
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