De nombreuses propositions de loi à suivre par les maires
Par Franck Lemarc
Une fois terminé l’interminable tunnel budgétaire au Parlement, l’activité normale devrait finir par reprendre, et les députés auront du pain sur la planche : depuis les élections législatives de juillet dernier et le début de la 17e législature, ce sont pas moins de 842 propositions de loi qui sont en attente d’être débattues ! Naturellement, toutes ne le seront pas, et seules quelques-unes d’entre elles iront jusqu’au débat en séance publique à l’occasion des niches parlementaires des différents partis ou si le gouvernement souhaite mettre en avant l’une ou l’autre d’entre elles.
Il faut noter que parmi les 50 textes déposés avant-hier, l’écrasante majorité l’a été par des députés du groupe Les Démocrates, c’est-à-dire MoDem. Il paraît vraisemblable que cette avalanche de textes du MoDem ne soit pas sans lien avec le fait que ces députés ont désormais un des leurs à Matignon, et peuvent ainsi espérer voir certaines de leurs propositions aller jusqu’au bout.
Quel que soit l’avenir de ces textes, certains ne sont pas sans intérêt pour les élus locaux.
Mobilité dans les territoires ruraux
C’est le cas par exemple de la proposition de loi de la députée Les Démocrates du Puy-de-Dôme Delphine Lingemann, consacrée à l’amélioration de la mobilité quotidienne des jeunes dans les territoires ruraux. Partant du constat que les problèmes de mobilité dans les territoires ruraux ont un impact direct sur l’emploi des jeunes ou leur accès aux études, la députée propose tout une série de mesures qui permettraient de prendre en compte l’origine géographique dans l’attribution de certaines aides ou bourses. Par ailleurs, il est proposé d’inclure les jeunes résidant dans les communes rurales « parmi les bénéficiaires des services de mobilité solidaires et des aides individuelles à la mobilité », ou de prendre spécifiquement en compte « les besoins spécifiques des jeunes de 16 à 25 ans » dans les plans de mobilité simplifiés (PDMS) mis en place par la loi d’orientation des mobilités.
Réforme de l’organisation des scrutins
Autre proposition ambitieuse : celle du député des Français établis hors de France Frédéric Petit, qui souhaite « lever certains freins à la participation électorale ». Parmi les mesures proposées, on retiendra celle « d’automatiser le changement d’inscription sur une liste électorale lors d’un déménagement » et de créer un « émargement numérique national », permettant « l’émargement à distance », l’idée étant, par exemple, de permettre à un électeur de voter sur son lieu de villégiature ou lorsqu’il est en déplacement, dans un autre bureau de vote que le sien.
Le député propose également de ne plus constituer les bureaux de vote uniquement à l’occasion d’un scrutin, mais sur une période de trois ans. Il serait constitué, dans chaque commune, une « commission citoyenne pour l’organisation des élections », et ses membres seraient réunis par le maire au moins une fois par an « pour anticiper les opérations et la mobilisation pour les élections à venir ».
Dernier point – et non le moindre –, le député souhaite relancer le débat sur l’autorisation du vote par correspondance et du vote électronique.
Gens du voyage
Une proposition de Bruno Fuchs (Haut-Rhin) concerne l’accueil des gens du voyage. C’est un texte assez ambitieux d’une vingtaine d’articles, qui se donne pour objet de « trouver une ligne de crête, un savant point d’équilibre offrant davantage de protection aux gens du voyage mais exigeant, avec plus de fermeté, leur respect de l’ordre public ». Parmi les propositions phares de ce texte : intégrer les aires d’accueil des gens du voyage dans le quota de logements sociaux imposé par la loi SRU. Autres mesures proposées : garantir réellement l’accès à l’eau et à l’électricité dans les aires d’accueil, avec une réécriture « unique, stricte et impérative » du règlement intérieur de celles-ci. L’auteur du texte demande également une réactualisation obligatoire des schémas départementaux d’accueil avant le 31 décembre 2025, ainsi que le ramassage scolaire obligatoire des enfants du voyage, opéré par les départements mais aux frais de l’État.
La deuxième partie du texte concerne les obligations des gens du voyage, et modifie notamment le Code pénal pour durcir la répression en cas de dégradations. Il est également prévu d’élargir le champ des motifs d’évacuation forcée d’un campement.
REP pour les cartouches de gaz
D’une portée moindre mais non sans intérêt est la proposition de loi de Laurent Croizier (Doubs) visant tout simplement à « appliquer le principe pollueur-payeur aux producteurs de cartouches de protoxyde d’azote ». Constatant les problèmes récurrents que pose le traitement de ces fameuses cartouches métalliques de « gaz hilarant » qui pourrissent la vie d’un bon nombre de maires, et les coûts très important que ce traitement peut impliquer, le député propose l’intégration de ces cartouches dans les REP DDS (déchets diffus spécifiques). Cette filière devrait dès lors « prendre en charge les coûts de ramassage et de traitement des dépôts sauvages constitués de bonbonnes et de cartouches de gaz ».
Fonds local pour les personnes âgées
Autre idée intéressante, cette fois du député Mickaël Cosson, des Côtes-d’Armor : autoriser les communes à créer « un fonds de solidarité locale intergénérationnelle », destiné à améliorer les conditions de vie des personnes âgées, qu’elles soient à domicile, en résidence ou en Ehpad. Ce dispositif reposerait sur une participation des habitants, « dont le montant serait fixé par délibération municipale ».
Droit des oppositions municipales
Le député Les Démocrates de la Loire, Emmanuel Mandon, a déposé un texte visant à « renforcer la démocratie locale ». Parmi d’autres mesures, cette proposition contient tout un chapitre consacré au droit des élus d’opposition et à leurs relations avec leur collectivité. Il est notamment proposé d’instituer systématiquement un « médiateur territorial » dans chaque arrondissement, nommé par les préfets, dont la saisine serait « un préalable obligatoire à toute forme de contestation par un élu local du refus qui lui aurait été opposé » dans un certain nombre de cas, comme leur « liberté d’expression », la prise en charge des frais liés à l’exercice de leur mandat, les rentes Fonpel, etc. L’existence d’un tel médiateur est déjà prévue par la loi Lecornu, mais elle n’est pas obligatoire.
Combien de ces textes seront finalement débattus et avec quels résultats ? Il est impossible de le savoir aujourd’hui. Mais certains d’entre eux feront certainement l’objet de débats intéressants pour les maires. À suivre.
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