David Lisnard rappelle aux députés les positions de l'AMF sur les grands sujets d'actualité
Par Franck Lemarc
David Lisnard, président de l’AMF, a été auditionné hier par les membres de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de l’Assemblée nationale.
Après avoir présenté à la délégation l’AMF, cette « vieille dame créée en 1907 pour défendre les libertés locales », « plus grande association de maires urbains, de maires de villes moyennes, de maires ruraux », David Lisnard a listé, dans son propos liminaire, les « grands défis » qui se présentent aux maires et aux présidents d’intercommunalités : « Le défi écologique et climatique, le défi numérique, le défi démographique, le défi économique et social », et enfin « le défi démocratique, priorité absolue, car on ne relèvera pas les précédents défis si on ne résout pas la crise civique ».
« Nous ne voulons pas perdre un euro »
Le maire de Cannes a ensuite répondu aux questions des membres de la délégation, sur des sujets très divers.
Il a pu rappeler les positions de l’AMF sur le ZAN, en expliquant pourquoi l’AMF avait déposé un recours devant le Conseil d’État sur les décrets d’avril dernier. « Les décrets d’application ont été transmis dans l’urgence, à la veille de l’élection présidentielle, avec une nomenclature qui nous paraît mal établie », et des dispositions qui ne figuraient pas dans la loi. « C’est une pratique dont on ne veut plus », a affirmé le maire de Cannes. « Apparemment les choses vont évoluer », a-t-il poursuivi, annonçant que le ministre Christophe Béchu s’est engagé à faire « rapidement des propositions ».
La députée de la Creuse Catherine Couturier a abordé les questions financières et l’inflation. « Les collectivités ont eu la possibilité d’être des amortisseurs sociaux. Elles n’en ont plus les moyens. Nous savons tous ici qu’une capacité d’autofinancement en baisse met en péril les investissements futurs, sauf à augmenter les tarifs des services, voire à les supprimer. La marge des manœuvres des communes et leur libre administration sont mis à mal. »
David Lisnard a entièrement partagé ce constat, ajoutant que « la prochaine étape » que les collectivités vont subir, « c’est la hausse des taux d’intérêt. L’emprunt sera plus rare et plus cher ».
Sur la suppression de la CVAE, David Lisnard s’est défendu de vouloir faire « un procès d’intention au gouvernement en début de quinquennat » : celui-ci s’est engagé à compenser « à l’euro près » cette suppression. « Mais dans le temps, on sait que les compensations ne sont jamais équivalentes aux suppressions. Nous voulons garder nos ressources et ne pas perdre un euro. Par ailleurs, il faut garder un lien fiscal entre la commune, les intercommunalités et les entreprises. On nous a annoncé, sans concertation, la suppression de la CVAE. Nous demandons, a minima, un dégrèvement. L’État nous répond que la compensation se fera par une fraction de TVA. Toute la question est de savoir comment celle-ci sera territorialisée. » Cette question sera un enjeu majeur des débats sur le projet de loi de finances pour 2023, qui va s’engager en octobre.
Indexation de la DGF
Sur l’inflation toujours, Christine Pires Beaune, députée du Puy-de-Dôme, a demandé si l’AMF souhaitait « des aides uniformes aux collectivités » pour faire face à l'explosion des prix de l'énergie. La députée, spécialiste des finances locales, a insisté sur la nécessité d’une réforme de la péréquation, relevant que la péréquation « est payée par les communes elles-mêmes » et que cette situation « ne peut plus durer ».
« Il y a une mesure uniforme que l’on demande et qui ne devrait même pas être discutée, a répondu le maire de Cannes, c’est l’indexation de la DGF sur l’inflation. » Comme celle des bases locatives, elle serait « logique et normale ». En revanche, « une application différenciée » serait acceptable par exemple sur la question des aides en matière d’énergie, dans la mesure où toutes les collectivités, en fonction des contrats qu’elles ont négociés, ne sont pas dans la même situation. David Lisnard a dit « partager » les positions de Christine Pires Beaune sur la péréquation, et « l’AMF les fera valoir ». Il a évoqué « l’urgence de la revalorisation des valeurs locatives des locaux commerciaux ».
Droit de véto
Interrogé par le député des Vosges David Valence sur les évolutions que souhaite l’AMF sur la question des rapports entre communes et intercommunalités, le maire de Cannes a développé sa vision de la « subsidiarité ». « C’est simple, je suis pour un droit de véto des maires : qu’on ne puisse rien imposer sur une intercommunalité à un maire. À lui de voir où est l’intérêt de sa commune et de s’expliquer avec les habitants qui l’ont mandaté. Ce n’est pas un détricotage (de l’intercommunalité), c’est cela la subsidiarité. »
La délégation a également abordé les questions de sécurité. Le président de l’AMF a annoncé à cette occasion que, lors d’une rencontre avec la ministre chargée des Collectivités locales, Caroline Cayeux, le matin même, il avait été décidé de réactiver la CCPM (commission consultative des polices municipales), en état de mort cérébrale depuis trois ans. David Lisnard a rappelé les positions de l’AMF sur le sujet des polices municipales : « Un, la sécurité est une compétence régalienne, elle est du domaine de l’État. Deux, la liberté doit prévaloir : on doit pouvoir avoir une police municipale ou pas – pas d’obligation –, l’armer ou pas – pas d’obligation. Enfin, on doit permettre d’avoir un vrai continuum de sécurité. (…) Mais on ne veut pas nous voir imposer un transfert de responsabilité sur le régalien. »
N'ayant pas pu répondre à toutes les très nombreuses questions posées par les députés, David Lisnard s’est engagé à revenir « très prochainement » poursuivre ces échanges avec la délégation.
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