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Édition du jeudi 10 juillet 2025
Démographie

Démographie : le déclin de la natalité française est parti pour durer, selon une étude

Si le modèle de la famille à deux enfants reste ancré chez les Français, le nombre d'enfants désirés par les jeunes est en baisse, selon une étude de l'Institut national d'études démographiques, alors même que le plus faible nombre de naissances depuis la fin de la Seconde guerre mondiale a été atteint l'an passé.

Par A.W.

Les Français et les Françaises « veulent moins d’enfants ». L’intitulé de la dernière étude de l’Institut national d’études démographiques (Ined) est on ne peut plus clair : constatée depuis plusieurs années, la baisse de la fécondité devrait irrémédiablement se poursuivre dans le futur. C’est ce que concluent les auteurs de ce travail publié hier, dans lequel ils constatent que le désir d’enfant est en net recul, en France, ces dernières années. Et notamment chez les plus jeunes.

En chute de 20 % en dix ans, l’indicateur conjoncturel de fécondité a déjà connu une baisse « rapide »  en passant de deux enfants par femme en 2014 à 1,6 en 2024. Si ce phénomène se retrouve dans tous les pays d’Europe, l’Ined estime que la fécondité française devrait rester « vraisemblablement supérieur »  à la moyenne continentale actuelle de 1,4 enfant par femme.

Deux enfants « maximum » 

Basée sur un échantillon représentatif de 12 800 personnes, âgées de 18 à 79 ans en France, cette enquête révèle que les Français privilégient dorénavant une cellule familiale plus petite puisque le « nombre idéal d'enfants »  est passé de 2,7 enfants en moyenne en 1998 à 2,3 en 2024. Une baisse jugée « importante »  en 25 ans.

Si la moitié des Français de 18-49 ans considéraient, en 1998, que la famille idéale devait être composée d’au moins trois enfants, ils ne sont ainsi plus que 29 % à le penser. Les deux tiers (65 %) d’entre eux préfèrent dorénavant s’en tenir à deux enfants souhaités, contre moins de la moitié (47 %) en 1998.

« Entamé de longue date », ce moindre attrait pour les familles nombreuses va de pair avec « une augmentation récente »  des familles à enfant unique et des personnes sans enfant bien que celles-ci restent « rares »  (seuls 6 % des Français déclaraient un nombre idéal d’enfants inférieur à deux). 

Le nombre d'enfants que les personnes interrogées ont l'intention d'avoir dans leur vie suit, d’ailleurs, « la même évolution »  que les réponses sur le nombre idéal d’enfants. Dans ce contexte, c’est le modèle de la famille à deux enfants qui se diffuse le plus, mais il est désormais perçu par les jeunes « comme un maximum et non plus comme un minimum », note l’Ined.

Plus marqué chez les jeunes

« Comme pour l’ensemble des adultes, la moitié des jeunes de 18 à 29 ans envisagent d’avoir exactement deux enfants », mais ils se différencient sur un point : ils sont plus nombreux à ne vouloir qu’un seul – voire aucun – enfant qu’au moins trois enfants. C'était l’inverse en 2005.

Si elle touche tous les groupes sociaux, la baisse de la fécondité est « beaucoup plus marquée »  chez les plus jeunes. Le nombre total d’enfants souhaités par les jeunes adultes de moins de 30 ans a ainsi diminué de 0,6 enfant en moyenne en 20 ans, passant de « 2,5 à 1,9 enfant souhaité pour les femmes »  et « de 2,3 à 1,8 pour les hommes ». 

Après avoir réalisé une série de projections de la fécondité, l’Ined constate, en outre, que, « dans tous les scénarios, les femmes nées après 1985 ont moins d’enfants que les générations précédentes ». « La descendance finale varie entre 1,8 et 2 enfants pour la génération 1990, et entre 1,6 et 1,9 pour la génération 1995 (âgée de 30 ans en 2025). […] Pour les femmes plus jeunes, l’avenir est plus ouvert [puisque celles] nées dans les années 2000 pourraient avoir […] probablement environ 1,6 enfant en moyenne », observe l’Institut, ce qui explique donc que la baisse de la fécondité est ainsi « probablement appelée à se prolonger ».

Égalité dans le couple et changement climatique

Pour quelles raisons les intentions de fécondité ont-elles ainsi diminué dans tous les groupes sociaux ? Et ce « quels que soient le sexe, l’âge, le pays de naissance, le niveau de diplôme, la catégorie socioprofessionnelle ou le niveau de vie ». 

Selon les auteurs de l’étude, cela tient en partie à « la manière dont les individus conçoivent la famille et appréhendent l’avenir ». Concrètement, ce sont « les personnes ayant une conception égalitaire des rôles des femmes et des hommes »  et celles « très inquiètes du changement climatique et des perspectives pour les générations futures »  qui souhaitent avoir moins d’enfants. 

On observe là un changement majeur puisque la conception égalitaire des rôles des femmes et des hommes dans la société n’avait « aucun effet en 2005 »  sur les intentions de fécondité. 

En 2024, la différence est désormais marquée. Ainsi, à caractéristiques socio-démographiques égales, « parmi celles et ceux qui pensent que la politique, les études ou l’emploi sont plus importants pour les hommes, alors que les femmes s’occupent mieux du foyer et des enfants, 47 % ont probablement ou certainement l’intention d’avoir un enfant (ou un enfant supplémentaire), contre 38 % de celles et ceux qui considèrent que ces domaines sont aussi importants pour les deux sexes », souligne l’Ined. 

Reste que ce sont « uniquement »  les hommes aux conceptions plus traditionnelles qui souhaitent « un nombre d’enfants plus élevé ».

Vers un « congé de naissance » 

Deux phénomènes qui ne représentent « sans doute qu’une partie de l’explication », nuance l’Ined en rappelant que « la baisse des intentions d’avoir des enfants tient à des tendances plus larges qui traversent la société dans son ensemble ».

Alors que la chute de la natalité entamée ces dernières années risque d'aggraver les difficultés de financement de la protection sociale basée sur la solidarité, la ministre de la Santé, Catherine Vautrin, vient de dévoiler sa stratégie pour remédier à cette situation. 

Dans un entretien à L’Express, elle a confirmé « travailler »  à un « congé de naissance »  qu'elle souhaite « porter dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2026 ». Ce nouveau congé, annoncé par le président Emmanuel Macron en janvier 2024, pourrait être pris « par la mère et le père à la suite l'un de l'autre », avec un « accompagnement financier plus important »  que l'actuel congé parental, indemnisé 456 euros par mois.

« Les enfants qui naissent aujourd’hui seront chargés de la société dans 25 ans. C’est un enjeu majeur pour l’avenir du pays », explique-t-elle, alors qu'en 2024, 663 000 bébés ont vu le jour en France. Soit le plus faible nombre de naissances sur un an depuis la fin de la Seconde guerre mondiale.

Consulter l'étude.

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