Réintégration des soignants non vaccinés : ça commence aujourd'hui
Par Franck Lemarc
Le texte ayant instauré l’obligation vaccinale était long et complexe. Celui qui y met fin est nettement plus simple : le décret n° 2023-368 publié au Journal officiel du 14 mai ne comporte qu’une simple phrase : « L'obligation de vaccination contre la covid-19 prévue par l'article 12 de la loi du 5 août 2021 susvisée est suspendue. »
Chiffres incertains
C’est la fin d’un épisode qui a démarré le 5 août 2021, quand le gouvernement a publié la loi obligeant les professionnels de santé et les étudiants à « être vaccinés, sauf contre-indication médicale reconnue, contre le covid-19 ». La loi prévoyait également que les personnes refusant de se soumettre à la vaccination, après un certain nombre de procédures, seraient suspendues, c’est-à-dire « feraient l’objet d’une interdiction d’exercer », sans rémunération.
Cette obligation s’imposait, selon les chiffres du gouvernement, à quelque 2,7 millions de personnes, dont des agents de la fonction publique territoriale.
Il reste, aujourd’hui encore, impossible de connaître le nombre précis des professionnels qui ont été suspendus en application de cette loi. Si ce nombre semble presque infinitésimal en métropole, il est en tout cas plus important outre-mer, notamment en Martinique, en Guadeloupe et en Guyane.
Le ministère de la Santé avait donné un chiffre de « 0,3 % » des agents suspendus, à l’échelle nationale. Mais dans les grands établissements hospitaliers de Guyane par exemple, selon des chiffres fournis par Guyane La Première, ce taux pourrait atteindre 15 % à 25 %.
En Guadeloupe, les chiffres varient selon les sources : l’agence régionale de santé parle de 252 soignants suspendus sur 9 807 personnels (2,6 %), quand un collectif syndical pointe plutôt 450 soignants (4,6 %).
« Aucune reconstitution de carrière »
Le décret ne dit rien des conditions de réintégration des personnels suspendus. C’est une instruction du ministre de la Santé, diffusée début mai mais non publiée, qui a donné aux employeurs la doctrine du gouvernement en la matière. La question essentielle, pour les soignants suspendus, était de savoir s’ils allaient récupérer tout ou partie de leur traitement, après, pour certains, presque deux ans sans salaire.
La réponse du gouvernement est négative : il est clairement indiqué dans l’instruction que « l’agent suspendu ne peut se prévaloir d’aucune reconstitution de sa carrière pendant la période durant laquelle il a été écarté du service (droit à l’avancement ou aux promotions, traitement, congés, reconstitution des droits sociaux) ». Autrement dit, outre la perte de leur salaire, les agents concernés perdront la période de suspension pour la constitution de leur droit à la retraite.
L’instruction précise que la réintégration doit se faire rapidement : elle est possible dès aujourd’hui (lendemain de la parution du décret) et il est demandé d’y procéder autant que faire se peut « dans les deux semaines » qui suivent.
Les agents doivent se voir proposer de reprendre, quand c’est possible, leur ancien poste. Si celui-ci a été occupé entretemps, un « poste équivalent » doit lui est proposé, qui ne doit présenter « aucun caractère discriminatoire ». L’instruction précise que si l’agent refuse le poste proposé, c’est à ses risques et périls, puisque cela peut lui valoir d’être radié des cadres pour abandon de poste. Mais le ministre évoque également la possibilité d’une sortie de conflit par le biais d’une rupture conventionnelle. Rappelons qu’en février, le gouvernement a publié un arrêté permettant aux soignants de Martinique et de Guadeloupe de quitter la fonction publique par rupture conventionnelle dans des conditions dérogatoires – cette possibilité étant ouverte jusqu’au 30 juin prochain. L’arrêté prévoit que l’indemnité offerte à l’agent soit automatiquement placée « au montant maximum réglementaire ».
Suspension vs abrogation
Répétons enfin que le décret paru hier ne fait que « suspendre » l’application de la loi du 5 août 2021, il ne l’abroge pas. Dans ce cas où une reprise de la pandémie se produirait, le gouvernement a donc toute possibilité de réactiver le dispositif.
À moins que, d’ici là, la proposition de loi adoptée début mai en première lecture par les députés, contre l’avis du gouvernement, finisse son parcours parlementaire. Cette loi prévoit, elle, l’abrogation de l’obligation vaccinale et non sa suspension. Elle doit être examinée par le Sénat, mais aucune date d’examen n’a pour l’instant été publiée.
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