Deux instructions donnent les orientations de la politique d'accueil des réfugiés pour 2023
Par Franck Lemarc
La triste affaire de Saint-Brévin-les-Pins, ces dernières semaines, lors de laquelle le maire de la commune, Yannick Morez, a subi harcèlement et violences de la part de l’extrême droite, rappelle que l’installation d’un Cada (centre d’accueil des demandeurs d’asile) dans une commune peut se heurter à des difficultés importantes. Pourtant, dans une instruction du 19 avril qui vient juste d’être rendue publique, le ministère de l’Intérieur rappelle l’objectif pour 2023 : 2 500 places en Cada doivent être ouvertes, ainsi que 1 500 places en Caes (centre d’accueil et d’examen des situations).
Demandeurs d’asile
Le ministère rappelle que quelque 140 000 demandes d’asile ont été enregistrées en France en 2022. L’un des objectifs prioritaires du gouvernement est de « rééquilibrer leur prise en charge sur le territoire ». Dans la mesure où le nombre de demandeurs d’asile devrait rester « particulièrement élevé cette année », le ministère demande aux préfets d’ouvrir « dès que possible » les places autorisées par la loi de finances, de « garantir la mise à disposition par les opérateurs de toutes les places financées par l’État » et de veiller à réduire le nombre de personnes en « occupation indue ».
Il fixe un objectif chiffré : parvenir à « 2 500 orientations mensuelles » à partir de l’été prochain. Pour atteindre ce chiffre, « l’implication personnelle » des préfets, aux côtés des élus, sera indispensable, rappelle le ministère.
Ce dernier exige également que le taux d’indisponibilité des places financées par l’État reste sous le seuil de 3 %, et demande aux préfets « d’intervenir » auprès des opérateurs qui dépassent ce taux, en leur appliquant si besoin des sanctions financières après mise en demeure, sous forme de minoration de la dotation de financement de l’État.
Enfin, pour ce qui concerne la « présence indue », les préfets sont appelés à appliquer fermement le dispositif permettant notamment d’exiger des personnes déboutées du droit d’asile qu’elle quittent les lieux d’hébergement. Ce dispositif, appelé « référé mesures utiles », fera désormais l’objet « d’un suivi mensuel par département ». Là encore, des pénalités financières pourront être mobilisées contre les opérateurs qui ne se montreraient pas suffisamment diligents pour « prévenir l’occupation indue ».
Pour les bénéficiaires de la protection internationale (BPI), l’accompagnement vers le logement doit « constituer une priorité ». Les préfets devront veiller « à ce que les opérateurs accompagnent l’autonomie de ces personnes, le cas échéant en mobilisant le dispositif des frais de participation, dont l’arrêté d’application fera prochainement l’objet d’une simplification ».
Réinstallation
Une seconde instruction, signée le 23 mai, a été publiée au même moment : elle concerne la « réinstallation des réfugiés vulnérables ».
La notion de « réinstallation » concerne une situation particulière : il s’agit d’accueillir des réfugiés qui ont fui leur pays d’origine pour un autre pays – dit « pays de premier asile » – dans lequel elles sont placées sous la protection temporaire du Haut-Commissariat aux réfugiés des Nations unies. Mais ce pays de premier asile ne pouvant leur offrir une protection pérenne, elles sont ensuite « réinstallées » dans un pays d’Europe, pour « leur offrir des perspectives de vie meilleures et éviter qu’elles ne s’engagent sur les routes migratoires au péril de leur vie », détaille une plaquette du ministère de l’Intérieur consacrée à la réinstallation.
Par exemple, de nombreux réfugiés syriens qui ont trouvé un premier refuge en Turquie ou au Liban sont ensuite réorientés vers les pays d’Europe. La France a signé une convention pour accueillir des réfugiés venus de neuf pays de premier accueil (Liban, Turquie, Jordanie, Égypte, Cameroun, Tchad, Rwanda, Niger et Éthiopie). Comme en 2022, elle a prévu d’en accueillir 3 000 en 2023, ce qui est nettement moins que les années précédentes. Ceci s’explique par le contexte particulier issu de la guerre en Ukraine, qui induit des besoins nouveaux en matière d’accueil des réfugiés.
Ce sont les régions qui sont « l’échelon de coordination et de déploiement des programmes de réinstallation ». Un budget de 7 000 euros par personne accueillie est débloqué par l’État, afin de financer « l’ensemble des missions qui incombent aux opérateurs, y compris l’hébergement temporaire des personnes réinstallées à leur arrivée lorsqu’une solution pérenne n’a pas pu être identifiée à temps ».
L’instruction du 23 mai fixe un certain nombre de règles que les préfets doivent veiller à faire respecter : 40 % des logements consacrés à l’accueil des personnes réinstallées doivent être issus du parc privé ; et ces publics doivent se voir ouvrir des droits le plus rapidement possible, notamment auprès de la Caisse nationale d’assurance maladie.
En 2022, les personnes réinstallées étaient majoritairement issues de Syrie (1 829 sur 3 000), suivies par les réfugiés de Centrafrique (422), du Soudan (217) et de la République démocratique du Congo (208).
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