Patrick Marengo, maire de Royan : il va falloir « remonter à la surface »
Dans la commune très touristique de Royan, le maire doit d’ores et déjà faire essayer d’anticiper l’après-crise, et les conséquences d’une saison touristique qui sera forcément très impactée par l’épidémie.
A la veille du week-end de Pâques, d’ordinaire, sur la façade atlantique, Royan se réveille. L’effervescence gagne le front de mer, car ce week-end férié marque en effet l’ouverture de la saison pour cette cité balnéaire de Charente-Maritime. Mais rien de cela ces jours-ci : malgré le beau temps, les touristes et résidents secondaires ne sont pas les bienvenus. Les contrôles policiers ont été renforcés et les policiers municipaux sont à l'œuvre, en relation permanente avec le maire, Patrick Marengo. Depuis le début de l'interdiction de circuler sans attestation et motifs prédéfinis, ils ont réalisé 8 200 contrôles, dressés 154 PV.
Dans son bureau surplombant le parc de la mairie d’où l’on aperçoit la mer, Patrick Marengo a vu s’ouvrir les volets de certaines résidences secondaires. Il comprend que certains aient préféré venir y vivre leur confinement plutôt qu’à Limoges, Poitiers ou Bordeaux. Mais aujourd'hui, il n'excuse plus ceux qui veulent contourner les interdictions, « il faut respecter les règles au risque de faire courir des risques à la population ».
Une ville fragile
Or si la ville compte beaucoup de résidences secondaires, elle compte aussi beaucoup de personnes de plus de 60 ans – près de la moitié des 19 000 habitants. Cela la rend « plus fragile », selon le maire, qui se voit obligé d'être encore « plus protecteur ». C'est ce qui l'a poussé à prendre, la semaine dernière, cet arrêté municipal obligeant au port du masque qui l'a propulsé à la une des médias. « Je me suis fait pourrir sur les réseaux sociaux par des anonymes mais j'ai reçu aussi des courriers, cette fois signés, de gens qui me soutiennent ». Et de préciser : « Je n'imposais pas le masque mais une mesure de protection buccale et nasale ». De même, c'est lui qui a « retiré (son) arrêté », sur demande de la préfecture (lire Maire info du 10 avril) même si l'idée d'aller au tribunal administratif l'a effleuré. Patrick Marengo ne regrette rien, au contraire, « car cela a provoqué un choc et une prise de conscience dans la population qui, je le vois depuis quelques jours, se protège davantage ». Il a d'ailleurs pris un nouvel arrêté, qui incite à se protéger : « Le masque, c'est le gilet pare-balles du citoyen en plus des gestes barrières et du confinement ». Il en va « de la responsabilité du maire de prendre les mesures nécessaires » argumente-t-il, en s’appuyant sur le fameux article article L22-12-2 du CGCT – sa « bible rouge », toujours à portée de main. Le maire se dit d'ailleurs favorable à ce que ces pouvoirs de police du maire soient renforcés : « Nous avons la connaissance du terrain, nous avons la capacité de gérer au plus près ».
« Ramener tout le monde »
« J’ai 19 106 administrés, je me suis fait la promesse de ramener tout le monde », lance celui qui a fini sa carrière militaire général quatre étoiles, en usant de la comparaison avec cette promesse qu’il s’était faite de ramener les 1506 « paras » de son unité en mission à Sarajevo, en 1995, lors de la guerre en ex-Yougoslavie. Une promesse qu’il n’avait pu tenir. Si cet ancien militaire ne parle pas de guerre aujourd'hui, il veut en revanche mettre tous les moyens pour « se battre contre cette menace ».
Cela passe, entre autres, par le concours de la ville à la mise en place (avec les médecins, Allo garde et la communauté d'agglomération de Royan Atlantique), de consultations médicales en ville à distance. Celles-ci fonctionnent depuis le 6 avril. La ville soutient également le centre d’accueil et de tri covid-19, installé dans un gymnase de la ville. L'ARS devait prendre en charge le personnel paramédical… mais elle a « oublié son engagement », fulmine le maire. La ville compense sur ses deniers – 7 000 euros en avril.
Dans cette période rendue encore plus inhabituelle par ce long entre-deux-tours électoraux – Patrick Marengo a viré en tête au premier tour avec 47,3 % – le maire entend rester serein. La situation n'a certes rien de simple, « mais cela n’a rien à voir avec (ce que vivent) les maires de l’Est ou d’Ile-de-France qui doivent gérer des situations émotionnellement autrement plus fortes » souligne-t-il. S’excusant presque de leur voler la vedette, il tient à leur témoigner toute sa « compassion et (sa) solidarité ».
Entre deux mondes
Pour le maire de Royan, il y a « le monde d'avant », et il y aura « le nouveau monde », celui dans lequel, « par palliers, il va falloir remonter à la surface ». Ce qu'il prépare déjà surtout, ce sont « les conditions de reprise économique » : « Comment aider les commerçants, les hôteliers à passer la période et redémarrer ? ». Car l'économie de la ville repose sur le tourisme et ses emplois sur la saison. Pragmatique, Patrick Marengo « agit là où il en a les compétences ». En suspendant, pour l'heure, les loyers commerciaux, les taxes locales et redevances sur le marché – pour lequel il a obtenu la dérogation d'ouvrir deux jours par semaine, au lieu des six habituels.
L'autre priorité sera de renforcer les capacités du CCAS. « En élargissant les critères d'attribution des aides et secours, car nous allons avoir une nouvelle partie de la population en difficulté vers laquelle il faudra se tourner ». « S'il faut ajouter 300 000 euros au budget (de 850 000 euros du CCAS) nous investirons moins par ailleurs », tranche-t-il.
Quant aux Violons sur le sable, la manifestation phare de la station qui, fin juillet, draine des dizaines de milliers de spectateurs plusieurs soirs dans la semaine, Patrick Marengo voudrait encore y croire : « Rien n'est encore décidé ».
A Royan, Emmanuelle Stroesser
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