Covid-19 : le pays à la croisée des chemins, les yeux rivés sur les variants
« Le nombre de nouvelles contaminations est stable voire diminue légèrement. La pression sanitaire reste forte dans notre pays mais elle n’augmente pas. En tenant ensemble comme nous le faisons, nous espérons gagner assez de temps pour éviter un confinement. » C’est ce qu’a déclaré le ministre de la Santé, hier, lors de son point presse hebdomadaire. Le gouvernement a choisi, depuis une quinzaine de jours, de prendre le contre-pied des recommandations de nombreux scientifiques – et de certains élus locaux – et de ne pas confiner à nouveau le pays, tablant sur une « stabilisation » de l’épidémie, certes à un niveau élevé, mais sans explosion du nombre de cas. Sauf que la progression des variants pourrait, rapidement, tout changer.
La situation à ce jour
Jusqu’à maintenant, les chiffres semblaient donner raison au gouvernement : on ne peut pas parler de progression exponentielle du virus. Depuis plus de quinze jours, le nombre de nouveaux cas, calculé en moyenne glissante sur sept jours, est stable. Hier, selon les chiffres de Santé publique France, le nombre de patients covid-19 admis dans les hôpitaux était en très légère baisse, mais le nombre de patients admis en réanimation était en augmentation.
Le nombre de décès quotidiens est, lui aussi, assez stable, mais à un niveau élevé – entre 300 et 400 par jour.
Vaccination et tests salivaires
Du côté de la vaccination, la campagne se poursuit sans changer notablement de rythme. La barre des deux millions de personnes ayant reçu la première dose a été franchie. À noter, hier, une information concernant le vaccin AstraZeneca, administré aux personnels soignants de plus de 50 ans. Selon l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament), ce vaccin provoque chez certains patients (149 répertoriés par l’Agence) un syndrome grippal assez violent (forte fièvre, maux de tête). Attention, cela ne signifie pas que le vaccin soit dangereux, et ces effets sont « documentés », rassure l’ANSM. Cela veut simplement dire que certaines personnes seront malades pendant quelques jours, ce qui amène l’agence à recommander, dans les services de santé, à échelonner les vaccinations pour ne pas risquer de se retrouver avec une partie importante d’un service en arrêt maladie.
Hier, l’hôpital de Saint-Lô (Manche), a par exemple annoncé qu’il interrompait momentanément la vaccination pour « revoir les plannings », une partie des personnels vaccinés étant touchée par de « fortes fièvres ».
Signalons aussi qu’hier, la HAS (Haute autorité de santé) a donné son feu vert au déploiement en France des tests salivaires, qui seront principalement utilisés dans les écoles – étant plus simples et moins désagréables que les tests nasopharyngés.
Variants : inquiétude à Dunkerque et en Moselle
Olivier Véran a répété hier que toute l’attention des autorités sanitaire est tournée vers l’évolution des variants. Globalement, c’est toujours la souche repérée en Grande-Bretagne qui progresse le plus vite, représentant aujourd’hui entre un cinquième et un quart des cas (20 à 25 %). Dans certaines régions, ce chiffre monte à 35 %.
L’une des villes les plus touchées par le variant dit anglais semble aujourd’hui être Dunkerque. Hier, le maire de la ville, Patrice Vergriete, a enregistré une vidéo à l’hôpital de la ville, le ton grave, pour appeler les habitants à « la plus grande vigilance ». « La situation sanitaire de notre agglomération est préoccupante. Le virus circule très rapidement, le taux de pénétration du variant anglais est trois fois supérieur à la moyenne régionale et six fois supérieur à la moyenne nationale. » Le maire, accompagné de deux cadres de l’hôpital, indique que l’accueil à l’hôpital « atteint la cote d’alerte », que le service de réanimation est « saturé », au point que les patients sont à présent envoyés dans les autres centres hospitaliers de la région. Patrice Vergriete a demandé au préfet, ce matin, la fermeture des collèges et lycées sur l'agglomération.
Mais les souches repérées en Afrique du Sud et au Brésil progressent aussi, bien que moins rapidement, dans le pays, ce qui suscite une vive inquiétude dans la mesure où elles semblent être plus résistantes, « moins sensibles à certains vaccins disponibles », a indiqué hier Olivier Véran. Le ministre a particulièrement pointé le cas de la Moselle, où environ 500 cas de variants repérés en Afrique du sud ou au Brésil ont été repérés, dont 300 « ces quatre derniers jours ». Les autorités ne sont pas en mesure d’expliquer cette poussée, repérée en particulier à Metz et autour de Saint-Avold et Forbach. Le ministre va se rendre aujourd’hui dans la région.
Le maire de Metz, François Grosdidier, s’est exprimé hier et ce matin sur ce sujet, rappelant qu’il demande depuis « plusieurs semaines » des mesures plus dures dans son département. Ce matin, le maire a clairement demandé au gouvernement un confinement du département, « dur et court, strict », comparable à celui du printemps dernier, avec fermeture des écoles. Avis partagé par le maire de Thionville, Pierre Cuny, qui demande que les vacances scolaires soient avancées d’une semaine en Moselle afin de commencer dès ce soir. Patrick Weiten, le président du conseil départemental, au sortir d’une réunion avec le préfet, a déclaré ce matin que cette mesure était « bien à l’étude ». Le maire de Thionville, par ailleurs médecin, parle ce matin d’une « accélération très brutale depuis 48 heures, exponentielle ».
Si ce type de situation devait se multiplier dans le pays, cela sonnerait le glas du « pari » évoqué hier par Olivier Véran. On peut d’ailleurs noter que le ton de celui-ci a un peu changé en quelques jours seulement. Alors qu’avant-hier, la tendance était plutôt à l’optimisme, avec un ministre de la Santé qui déclarait dans la presse qu’il n’y aurait peut-être « jamais besoin de reconfiner », Olivier Véran a reconnu hier, en conférence de presse, que les jours prochains diront s’il faut « se résigner à prendre des mesures de type confinement ».
Franck Lemarc
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