Vaccination : le Comité consultatif national d'éthique rappelle la nécessité d'un consentement éclairé
« Début de la campagne de vaccination française et européenne dimanche ! » Le ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran, l'a annoncé, hier sur Twitter, après que l'Agence européenne du médicament a autorisé le vaccin mis au point par Pfizer et BioNTech.
Vaccination « après examen médical, information et recueil du consentement »
Les premières vaccinations contre le covid-19 auront donc lieu dans cinq jours et seront réservées, dans une première phase, aux « plus vulnérables d'entre nous d'abord, après examen médical, information et recueil du consentement », a expliqué Olivier Véran. La stratégie française prévoit, en effet, de vacciner en priorité les personnes âgées en Ehpad ainsi que les travailleurs présentant des facteurs de risque qui y travaillent, soit environ un million de personnes.
Une annonce qui arrive concomitamment avec l'avis du Comité consultatif national d'éthique (CCNE) qui avait été saisi par le ministre de la Santé afin qu’il « contribue à la définition d’un cadre éthique sur la politique de vaccination ».
À ce titre, si le CCNE souligne que la campagne vaccinale qui se met en place est « porteuse d’espoir contre une infection responsable de plus de 60 000 décès en France », il rappelle d'emblée que l'« on manque encore de données sur l’efficacité de ces vaccins à moyen et long terme en fonction des populations-cibles, leurs éventuels effets secondaires et on ne sait pas encore s’ils réduisent la transmission du virus ». Une « incertitude » qui contribue « en partie à nourrir le doute au sein d’une partie de la population ».
Une information transparente et compréhensible
Le Comité insiste ainsi sur le fait que, « quel que soit le contexte d’urgence », il est nécessaire de « respecter les principes qui fondent l’éthique médicale », notamment ceux « d’autonomie et de consentement ». « Toute vaccination implique le consentement de la personne délivré au cours d’un processus d’information et de recueil de la volonté en plusieurs temps et selon des modalités adaptées à la personne », expliquent les auteurs de l'avis qui ont axé notamment leur réflexion sur les Ehpad.
Le « consentement libre » à la vaccination doit ainsi être exprimé par les résidents après avoir obtenu « une information loyale et compréhensible des bénéfices et des risques de la vaccination et surtout une réelle écoute de la personne, un échange avec l’ensemble des parties prenantes, à commencer par les usagers et leurs représentants, et les familles ».
Ensuite, un « temps de réflexion personnelle » devra être accordé à la personne concernée, sans que le CCNE en précise la durée. Reste que ce temps doit « permettre de mettre à distance l’émotion, les éventuelles pressions des uns et des autres, explorer les différentes options, et finalement donner un sens à son choix » avant d'accepter ou non la vaccination.
Ces « points clés » composent le protocole vaccinal qui doit être mis en place « dès maintenant à l’échelle de chaque l’établissement », indique le Comité qui incite les établissements à appuyer leur démarche sur « la réflexion éthique ». « Dès à présent et en amont de la première phase de vaccination, en particulier dans les Ehpad, il est recommandé que chaque établissement et service accueillant des personnes vulnérables organise, dans un climat de confiance et de transparence, un temps d’information et de dialogue à destination de l’ensemble des usagers et des tiers (personne de confiance, représentant légal, famille), en associant à la démarche le président de l’instance représentative des usagers (CVS), ainsi qu'un professionnel formé à la réflexion éthique (comité éthique d’établissement ou territorial, ERER) », conseille le Comité qui recommande également aux établissements de « se doter d’un protocole d’information de l’usager ou du tiers qui le représente, afin d’octroyer au personnel soignant un temps d’échange nécessaire pour l’élaboration d’un choix, adapté au degré de compréhension de la personne vulnérable ».
Face aux incertitudes, un consentement à formaliser
Selon ses membres, un « consentement particulier » doit être formalisé pour la première phase de vaccination, et contrairement à une vaccination classique, telle que la grippe, « où il y a une forme de consentement par défaut, sans vérification que l’information ait bien été reçue et comprise par la personne ». Une pratique justifiée par les « incertitudes » qui demeurent en « l’absence des résultats de l’étude de phase 4 » et dont « il est nécessaire que la personne soit consciente ».
Un consentement écrit est, dès lors, envisageable, selon eux, à la condition « qu’il ne soit pas conçu comme le seul moyen de protéger l’institution, ou de rassurer la famille, mais qu’il soit la dernière phase de la recherche effective d’un consentement ».
De la « vigilance » vis-à-vis des personnes vulnérables
Concernant les personnes qui ne sont pas en mesure de s’exprimer, « la vigilance doit être particulièrement grande », mettent en garde les auteurs de l'avis. Dans ce cas, « le choix devrait être opéré au terme d’un processus délibératif à partir de l’avis exprimé par la personne de confiance, ou en l’absence de personne de confiance, par la famille », soulignent-ils. Pour ce qui est des personnes bénéficiant d’une mesure de protection juridique (tutelle, habilitation familiale judiciaire, mandat de protection future), le consentement doit être donné par son représentant légal si celle-ci n’a pas désigné de personne de confiance.
Même dans ces situations de vulnérabilité reconnue, le consentement de la personne à la vaccination ne doit pas être négligé. « Dans tous les cas, et même dans le régime de protection le plus fort, il faut veiller à faire primer la volonté de la personne, dans la mesure où son état le permet, et ne pas sous-estimer la pression que des tiers pourraient faire peser sur des personnes vulnérables ».
Plus globalement, les membres du CCNE invitent également à « prendre en compte la diversité des points de vue sur la vaccination » et à « réexaminer constamment » les décisions prises « au vu des nouvelles connaissances ». Ils suggèrent ainsi de mettre en place, au printemps 2021, un « débat national » afin de « prendre le temps d’échanger, d’analyser les évolutions et les résultats initiaux de la campagne de vaccination, dans un climat serein et confiant » qui se tiendrait « en dehors de la période d’urgence sanitaire immédiate ». Le comité citoyen du vaccin mis en place par le Conseil économique, social et environnemental (Cese) pourrait également y « apporter son éclairage », selon le CCNE.
A.W.
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