Le Sénat estime que la crise sanitaire pourrait faire perdre près de 5 milliards d'euros aux collectivités
La commission des finances du Sénat vient de publier une « note de conjoncture » relative au suivi du plan d’urgence face à la crise sanitaire, élaborée fin mars. Il s’agit notamment de commencer à estimer les conséquences économiques et financières de la crise, en particulier pour les collectivités territoriales.
Récession
De façon générale, déjà il y a deux semaines, les sénateurs estimaient que la crise allait se solder par une récession (diminution du PIB) de « 3 à 5 % » en 2020, avec pour corollaire une hausse mécanique du poids du déficit public (et de la dette) dans le PIB : celui-ci pourrait monter au-delà des 6 %.
Les comptes de l’assurance maladie seront également très lourdement impactés par la crise, à la fois du fait de la hausse des dépenses de santé et de la baisse mécanique des recettes à cause de la paralysie de l’économie. « Le retour à l’équilibre des comptes de la sécurité sociale attendu en 2023 apparaît aujourd’hui totalement remis en cause », concluent les sénateurs.
Les départements pourraient être les plus impactés
Concernant la « sphère locale », la commission des finances du Sénat table sur une perte de recettes pour les collectivités locales qui friserait les 5 milliards d’euros.
Pour les régions, l’addition risque d’être lourde, dans la mesure où leurs recettes sont essentiellement fiscales et donc particulièrement « sensibles à la conjoncture économique ». Les conseils régionaux seront impactés « dès avril 2020 », notent les sénateurs, puisque le gouvernement a dispensé les entreprises de régler leurs échéances fiscales de mars. « Compte tenu de la mécanique de la CVAE, une baisse des recettes devrait également être constatée en 2021. En effet, les entreprises versent en année N deux acomptes de CVAE qui sont eux-mêmes versés en année N+1 aux collectivités territoriales ».
Les pertes pour les régions pourraient s’échelonner « entre 130 et 910 millions d’euros », selon le Sénat.
La problématique est en partie la même pour les départements, dont les trois quarts des recettes sont de nature fiscale (TFPB, DMTO, TSCA et TICPE). C’est pour cet échelon de collectivité que l’addition sera la plus sévère, avec, pour la pire des hypothèses, une baisse de recettes qui pourrait atteindre 3,4 milliards d’euros. C’est surtout « un choc sur les recettes liées au DMTO » qui est à craindre, estiment les sénateurs, du fait de la contraction brutale des transactions immobilières. Mais les départements devraient aussi avoir à subir de moindres recettes de CVAE et, du fait de l’arrêt complet des activités touristiques, une diminution des recettes liées à la taxe additionnelle à la taxe de séjour que perçoit la moitié des départements.
Les communes un peu « moins exposées »
Les communes pourraient être « moins exposées » que les régions et les départements, dans la mesure où la part fiscale de leurs recettes est un peu moins importante. De plus, « ces ressources (fiscales) semblent a priori moins sensibles à l’évolution de la conjoncture » : la taxe foncière et la taxe d’habitation, fixées en fonction de la propriété ou de la jouissance d’un local au 1er janvier, ne seront pas impactées par la crise.
Les EPCI en revanche sont plus exposés, détaille le Sénat, dans la mesure où leurs recettes fiscales comprennent une part plus importante liée aux entreprises (CFE et CVAE). « Les recettes des EPCI pourraient se réduire de 46 à 316 millions d’euros en 2021 selon le scénario retenu. »
Ceci dit, les communes vont être touchées par une diminution des recettes et redevances liée à la fermeture des services publics locaux : pertes de recettes des crèches fermées, perte des recettes de droits de place dans les marchés. Parallèlement, les collectivités vont devoir faire face à une nécessaire augmentation des dépenses. Pour les communes, le Sénat cite en vrac « l’accueil des enfants du personnel soignant dans les écoles par les Atsem, le portage des repas pour les personnes âgées ne pouvant pas faire leurs courses, ou encore une hausse probable des dépenses des centres communaux d’action sociale (CCAS) » – sans compter d’éventuelles participations volontaires au fonds de solidarité destiné aux petites entreprises.
Toutes ces questions font actuellement l’objet d’une évaluation approfondie par les associations d’élus, sur laquelle Maire info reviendra dès demain.
Franck Lemarc
Télécharger la note de conjoncture du Sénat.
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