La majoration de la dotation élu local devrait finalement être versée à toutes les communes éligibles
La commission mixte paritaire (CMP) chargée d’élaborer un texte de compromis sur le deuxième projet de loi de finances rectificative, hier, a été conclusive. Dans le texte issu de cette CMP, quelques-uns des ajouts du Sénat, favorables aux collectivités locales, ont été conservés, dont une hausse de la dotation élu local.
Dotation élu local : + 8 millions
Cela avait été l’une des mauvaises surprises de ce printemps, en matière de dotations : lors de la publication par la DGCL des montants des dotations de l’État aux communes, il était apparu que le gouvernement avait imposé une condition supplémentaire pour percevoir la majoration de la dotation particulière élu local (DPEL). Conséquence, 3 500 communes qui espéraient percevoir cette majoration s’en retrouvaient privées (lire Maire info du 9 avril).
On se rappelle qu’à l’automne, au congrès de l’AMF, le Premier ministre s’était engagé à ce que la DPEL – qui permet notamment aux petites communes de payer les indemnités des élus – soit « doublée » dans les communes de moins de 200 habitants et augmentée de 50 % dans celles de 200 à 500 habitants. Il était apparu, lors de la discussion sur la loi de finances pour 2020, que le gouvernement avait choisi de faire financer cette hausse de la DPEL par les départements et les régions, via une diminution équivalente de certaines de leurs dotations.
Ensuite, en mars, le gouvernement a présenté un projet de décret (rejeté par le Conseil national d’évaluation des normes et le Comité des finances locales) ajoutant une condition supplémentaire pour toucher la majoration : seules les communes de moins de 500 habitants dont le potentiel financier par habitant est inférieur à la moyenne des communes de moins de 1000 habitants devraient avoir droit à la majoration. Alors que le décret n’a pas été publié, c’est bien en s’appuyant sur cette règle que l’État a calculé les dotations, privant 3 500 communes de la hausse qu’elles espéraient.
Lors de la discussion du deuxième PLFR au Sénat, un amendement – proposé par l’AMF – a été défendu notamment par Sophie Vermeillet (UC, Jura) et adopté : cet amendement augmente de 8 millions d’euros la DPEL de façon à « élargir le bénéfice de la majoration à l’ensemble des communes de moins de 500 habitants éligibles à la dotation élu local ». Malgré un avis défavorable du rapporteur et du gouvernement (estimant que cet amendement était « trop loin du sujet » dans un PFLR consacré à l’aide aux entreprises), l’amendement a été adopté. Et confirmé en CMP. Toutes les communes de moins de 500 habitants éligibles à la DPEL devraient donc voir leur dotation majorée.
Maintien des subventions aux associations
Autre amendement apporté par le Sénat : en cas d’annulation « d’un projet, d’un événement ou d’une manifestation » faisant l’objet d’une subvention d’une collectivité ou d’un EPCI, ceux-ci pourraient décider de maintenir tout de même tout ou partie de la subvention, limitée cependant aux dépenses éligibles déjà décaissées. Il s’agit d’une « dérogation à la règle du service fait », a expliqué Bruno Retailleau (LR, Vendée), concernant notamment les festivals de l’été, afin de ne pas « aggraver considérablement la situation de certaines associations ».
Cet amendement a été adopté contre l’avis du gouvernement. Ce qui est assez surprenant, quand on se souvient que mardi, à l’Assemblée nationale, le gouvernement annonçait qu’une circulaire était en préparation pour inciter tous les ministères à « honorer les subventions quand bien même le projet ne pourrait pas être mené à bien » … et invitait les collectivités à « suivre cette voie ».
L’amendement a été confirmé en CMP, il figurera donc bien dans le texte final.
Des mesures rejetées en CMP
D’autres mesures décidées par le Sénat n’ont pas, en revanche, été conservées par la CMP.
Les sénateurs avaient par exemple demandé la création d’un programme budgétaire spécial consacré au soutien de la filière équestre, doté de 10 millions d’euros. En effet, si les établissements équestres ont dû fermer et ne peuvent plus dispenser de cours, cela n’empêche pas que l’entretien des animaux est toujours nécessaire – et coûteux. Le gouvernement a rejeté l’idée de cette enveloppe supplémentaire, estimant que le programme déjà voté de 19 millions d’euros pour le soutien « des zoos et des cirques familiaux s’appliquerait aussi aux centres équestres et aux poneys-clubs » (Olivier Dussopt). La CMP a confirmé le retrait de cette disposition.
Un autre débat a eu lieu sur une disposition souhaitée par le Sénat : permettre de façon dérogatoire que les dépenses des collectivités pour « fournir des masques en tissu alternatif aux personnes » soient imputées en investissement et non en fonctionnement. En séance, au Sénat, la secrétaire d’État Agnès Pannier-Runacher a rejeté cette proposition, l’estimant inutile d’abord parce que « les contrats de Cahors sont suspendus », ce qui signifie qu’il n’y a plus de limitation contractuelle à la hausse des dépenses de fonctionnement ; et ensuite parce que le gouvernement estime que « les collectivités sont entrées dans la crise avec une situation financière favorable », ce qui leur permet, selon lui, de faire face.
Même refus du gouvernement (et de la CMP) sur la proposition du Sénat de proroger d’un an (jusqu’au 15 mars 2021) « les délais d’engagement et de clôture des opérations financées par les subventions d’investissement » (notamment la DETR et la DSIL). Du fait du blocage de l’activité économique, de la non-installation des conseils municipaux et « de la suspension de l’élection des exécutifs intercommunaux », a plaidé Nadia Sollogoub (UC, Nièvre), les sénateurs ont jugé indispensable une telle prorogation « afin de ne pas pénaliser les territoires ». Le gouvernement a émis un avis défavorable, estimant qu’il existe déjà « une marge de manœuvre laissée aux préfets ». L’amendement a été supprimé par la CMP.
Le PLFR adopté définitivement hier soir prévoit une baisse de 40 milliards d’euros des recettes fiscales prévues par la loi de finances pour 2020. En contrepartie, une augmentation équivalente des crédits a été adoptée dont la majeure partie (37,2 milliards d’euros) est constituée d’un nouveau programme « plan d’urgence face à la crise sanitaire ». Au total, ce plan d’urgence pour porter secours à l’économie atteint désormais la somme astronomique de 110 milliards d’euros. 20 milliards d’euros vont être consacrés à « recapitaliser, voire nationaliser provisoirement » certaines entreprises stratégiques en très grande difficulté.
Franck Lemarc
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